La société dont parle la pièce d’Olivier Saccomano en 2013 n’est plus tout à fait la même que celle à laquelle fait écho cette mise en scène d’Anaïs Assémat, douze ans plus tard. Mais le contexte a beau être différent, les situations semblent vouées à se reproduire par cycles. Dans un récit qui se développe sur trois journées autour du 14 juillet, quelques personnages deviennent les porte-parole d’une population qu’on a voulu garder à la marge. Dans l’écho rémanent des émeutes de la Révolution, cette invisibilisation pourrait bien mener à une nouvelle révolte tandis qu’en parallèle, d’autres vies sont en train de basculer.
Des mots comme des actes
Avec sa narration à plusieurs regards, Notre jeunesse compose par couches le portrait complexe d’une société toute entière. D’une saynète à l’autre, les liens se font aussi dans ce qui reste suggéré ou soumis à l’interprétation des spectateurs. Pour appuyer cette distance entre la brutalité des faits évoqués et la fiction qui en émerge, la metteuse en scène propose un espace modulable qui accepte le théâtre comme un outil de révélation. Autour de plateformes amovibles et surélevées, Anaïs Assémat dispose ses interprètes dans des coulisses à vue. Et pour cause, la notion de représentation fait partie des thématiques essentielles de ce texte. Ici, c’est la parole qui fait exister les situations mises en lumière.
En appui, la musique composée en direct par Florian Bergé apporte à la fois un lien dynamique et une couleur dramatique à l’ensemble. Dans l’enchaînement narratif, Grégory Nardella et Nader Soufi sont de solides soutiens pour cette création. Dans leur interprétation comme à travers les mots de leurs personnages, ils contribuent à leur manière à révéler l’invisible. Leur histoire rencontrant celle de la jeunesse qui leur fait face, ils jouent ainsi un rôle essentiel dans la dramaturgie : faire exister les injustices à défaut de pouvoir les combattre.
Notre jeunesse d’Olivier Saccomano
11 • Avignon – Festival Off Avignon
Du 5 au 24 juillet 2025
Durée 1h35
Mise en scène – Anaïs Assémat
Interprétation : Adeline Bracq, Fani Carenco, Thomas Garri, Gregory Nardella, Paul Scanu, Nastacia Singla, Nader Soufi
Création son : Florian Bergé
Création lumière : Mylène Pastre