Vos débuts
Votre premier souvenir d’art vivant ?
J’ai six ans et je vais voir mon père Dominique Tirmont chanter sur la scène à l’opéra de Nancy. Je me souviens de l’odeur très spécifique de « bois » de ce théâtre à l’italienne.

Qu’est-ce qui vous a poussé à choisir cette voie ?
Ma première passion est indéniablement la danse — qu’elle soit classique, contemporaine, jazz ou qu’elle s’impose comme un élément essentiel de la comédie musicale.
Pourquoi ce métier ?
À 10 ans, j’ai vu à l’Alhambra, West Side Story avec les créateurs américains. Je voulais vivre à Broadway. J’ai pris des cours pendant trente-cinq ans. J’ai quand même fait même trois comédies musicales dans les années 1980.
Racontez-nous le tout premier spectacle auquel vous avez participé ?
J’avais seize ans et avec le groupe théâtral du lycée de filles de Neuilly, je joue L’Apollon de Bellac de Giraudoux. Puis, je rejoins pour un spectacle de fin d’année le groupe théâtral de Pasteur, lycée de garçons, pour jouer Les Précieuses Ridicules. Mes camarades de plateau s’appelaient Blanc, Clavier, Jugnot, Lhermitte, Lejeune…
Pour mon premier spectacle professionnel, j’ai 20 ans. Je suis élève au centre de la rue Blanche à Paris et Jean Meyer m’engage pour jouer Armande des Femmes savantes aux Célestins à Lyon. Puis, je rentre au Conservatoire et parallèlement, je joue un petit rôle à l’espace Cardin sous la direction de Claude Régy, La Chevauchée sur le lac de Constance avec Jeanne Moreau, Delphine Seyrig, Samy Frey, Michael Lonsdale et Gérard Depardieu, et à Orsay sous le chapiteau du cirque Fanny, je joue la 4e journée du Soulier de Satin avec la compagnie de Jean-Louis Barrault.
Passions et inspirations

Votre plus grand coup de cœur scénique ?
C’est la comédie musicale qui me transporte. L’atavisme, mon grand-père à l’Opéra, mon père (NDLR comédien, chanteur, voix de Christopher Plummer dans La mélodie du bonheur) et ma mère (NDLR la chanteuse et comédienne Janine Menant) ! J’ai grandi en écoutant La Bohème de Puccini et Judy Garland ! Donc, on va dire, Chicago de Bob Fosse à Broadway en 1975, Amphitryon au Français avec Robert Hirsch et tous les films de Coppola sans exception, je l’adore !
Quelles belles rencontres ont marqué votre parcours ?
Difficile de résumer cinquante ans de vie sur scène ! Mais certaines rencontres restent gravées. Je pense d’abord à Étienne Bierry, au Poche-Montparnasse, avec La Chambre 108 de Gérald Aubert. À Victor Lanoux dans La Mort d’un commis voyageur, à Robert Hirsch, et à toute la distribution du Bel Air de Londres. Ma première nomination aux Molières fut aussi un moment très fort : j’étais très émue, même si je n’ai pas eu de statuette.
Je citerai encore Jean-Paul Roussillon, avec qui j’ai tourné Le Jardin des apparences de Véronique Olmi, Claude Rich dans Pauvre Assassin de Pavel Kohout, Edwige Feuillère, Niels Arestrup dans La Dernière Nuit de l’été…
Et puis il y a eu cette distribution magique d’un Dindon inoubliable au Palais-Royal, mis en scène par Jean Meyer, avec Jean Piat, Pierre Mondy, Jean-Luc Moreau, Nicole Calfan, Claude Gensac, Henri Tisot, Pierre Tornade, Hubert Deschamps… plus de 400 représentations ! Enfin, je n’oublie pas non plus Tailleur pour dames, avec Pierre Arditi.

Avec son père, Dominique Tirmont à Bobino © DR, collection privée
Je ne peux pas oublier Patrice Kerbrat, mon ami que j’admire, qui m’a mise en scène plusieurs fois, ni Michèle Bernier dans Dolorès Claiborne (ma 2e nomination). Et puis bien sûr le présent, avec cette aventure inouïe et énorme succès de Chers Parents d’Armelle et Emmanuel Patron. On forme une vraie famille ! Les Chaises d’Eugène Ionesco avec Bernard Crombey sous la direction de Thierry Harcourt. Et pour terminer, ces cadeaux que nous réserve ce métier de passion : Avoir joué au TNBA il y a quinze jours Place de Tamara al Saadi. Merci à la vie !
Où puisez-vous votre énergie créative ?
Mon énergie, je la puise dans toutes ces aventures.
En quoi ce que vous faites est essentiel à votre équilibre ?
C’est mon équilibre, ma force, mon don d’émerveillement !
L’art et le corps
Que représente la scène pour vous ?
Jean-Paul Roussillon et Matt Mattox, mon maître de Danse, disaient tous deux : « Le premier pas sur un plateau est sacré ! »
Où ressentez-vous, physiquement, votre désir de créer et de jouer ?
C’est sur scène que je m’éclate le plus. On a le temps pour soi. La conscience du corps est la plus forte. On peut s’abandonner plus facilement que sur un tournage… On a une vraie liberté.
Rêves et projets

Avec quels artistes aimeriez-vous travailler ?
J’aurais aimé travailler avec Chéreau et aujourd’hui, j’aimerais tourner avec Klapisch.
Si tout était possible, à quoi rêveriez-vous de participer ?
J’ai été sur scène avec mes parents, avec ma sœur chérie Marie Tirmont. Je joue aujourd’hui dans le privé et le public. Mon mari, régisseur général de théâtre, m’accompagne de temps en temps dans ces aventures théâtrales. Alors, je souhaite que cela continue encore un peu !
Si votre parcours était une œuvre d’art, laquelle serait-elle ?
Allons ne soyons pas modeste, je dirai un tableau de Monet, Les falaises d’Étretat.
Propos recueillis par Marie-Céline Nivière
Chers parents d’Emmanuel et Armelle Patron
Théâtre de la Michodière
4 bis rue de la Michodière
75002 Paris.
Reprise du 21 mai au 29 juin 2025
durée 1h30.
Les Chaises de Ionesco
Le Mois Molière à Versailles les 2 et 3 juin 2025
Festival Off Avignon – Théâtre de l’Essaïon du 4 au 26 juillet