Faisant suite au Barbier de Séville, La folle journée ou Le mariage de Figaro est un chef-d’œuvre du théâtre français. Sous son air de comédie, maîtrisé à merveille, Beaumarchais y dénonce les privilèges de la noblesse, préfigurant ainsi la Révolution française. Elle n’a rien perdu de sa force, car il y est avant tout question des rapports entre les hommes et les femmes, et ce n’est pas encore gagné.
Une comédie d’intrigues, de mœurs et de caractères
Figaro doit épouser Suzanne à la fin de la journée qui va s’avérer bien chargée. Voilà que sa fiancée lui apprend que leur maître, Le Comte Almaviva lui fait des avances. Même si ce dernier avait aboli le droit de cuissage, il va néanmoins tout mettre en œuvre pour obtenir gain de cause et empêcher les noces de son valet. Figaro et Suzanne vont devoir développer toute une stratégie pour faire échouer les plans du Comte. Vaincu, celui-ci permet que la fête commence. Les valets ont eu le dessus.
Un sans-faute
Après Comme il vous plaira de Shakespeare, reconnaissons que c’est avec un beau savoir-faire que Léna Bréban s’empare des classiques. Ayant coupé et remanié avec esprit la comédie de Beaumarchais et en incluant très subtilement des anachronismes, sa version est admirable. Toutes les intrigues sont déroulées dans un rythme soutenu. Quiproquos, péripéties, coups de théâtre et rebondissements forment un feu d’artifice réjouissant. Par le choix de ses costumes, elle inscrit la pièce dans deux siècles, le XVIIIe et le nôtre. Son décor est un hommage à la machinerie théâtrale. Comme le disait Molière, point de théâtre sans « ces étranges animaux » que sont les comédiennes et comédiennes. Léna Bréban les a choisis et conduits à merveille.
Un Figaro de qualité
Ce grand personnage de comédie qu’est Figaro demande du savoir-faire. Ce fieffé coquin, malin comme un singe, possédant du cœur, de l’esprit et le bon sens du peuple, doit autant faire rire qu’émouvoir. Philippe Torreton, qui fut à la Comédie-Française un si beau Scapin et un merveilleux Arlequin, est tout à son aise dans ce rôle. Et dans la bouche de cet homme engagé, le grand monologue de Figaro résonne très fortement. « Parce que vous êtes un grand Seigneur, vous vous croyez un grand génie ! Noblesse, fortune, un rang, des places : tout cela rend si fier ! Qu’avez-vous fait pour tant de biens ? Vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus… »
Une troupe solide
Marie Vialle incarne avec charme et clairvoyance l’adorable Suzanne. Elle forme avec Gretel Delattre (émouvante comtesse), un duo féminin et féministe très efficace. Dans le rôle du Comte qui se transforme en dindon de la farce, Grégoire Œstermann est prodigieux. L’immense Annie Mercier est impayable en Marceline. Salomé Dienis Meulien (Franchette), Antoine Prudhomme de la Boussinière (Chérubin), Jean-Yves Rouan (Antonio le jardinier), Jean-Jacques Moreau (Bartolo) et Éric Bougnon (Basile, Don Gusman, Brid’Oison) complètent à la perfection cette formidable distribution. Bravo.
La folle journée ou Le mariage de Figaro de Beaumarchais
La Scala Provence – Festival Off Avignon
Du 5 au 27 juillet 2025 à 18h30, relâche lundi.
Durée 1h50.
Tournée
À la Scala Paris, du 6 septembre 2025 au 4 janvier 2026.
Adaptation et mise en scène de Léna Bréban
Avec Philippe Torreton, Marie Vialle, Éric Bougnon, Gretel Delattre, Salomé Dienis Meulien, Annie Mercier, Jean-Jacques Moreau, Grégoire Œstermann, Antoine Prud’homme de la Boussinière, Jean-Yves Roan
Assistante mise en scène Ambre Reynaud
Scénographie Emmanuelle Roy
Costumes Alice Touvet
Perruques Julie Poulain
Lumières Denis Koransky
Compositeurs Victor Belin et Raphaël Auclerc.
