Le songe d'une nuit d'été © Debby Termonia

Les muppets font leur show dans Le Songe d’une nuit d’été

Au 11•Avignon, la compagnie Belge Point Zéro propose une version queer du "Songe d'une nuit d'été" pour marionnettes à taille humaine.

Le songe d'une nuit d'été © Debby Termonia

L’artiste belge Jean-Michel d’Hoop et sa compagnie Point Zéro nous proposent une version des plus réjouissantes du Songe d’une nuit d’été de Shakespeare. L’art de la marionnette est ici mythifié dans l’allégresse pour nous offrir un petit morceau d’anthologie qui restera dans les annales. À ne pas manquer !

© Debby Termonia

La comédie féérique de Shakespeare, avec ses bois magiques, ses fées taquines et sa nuit magique, sied bien à l’univers des marionnettes. C’est donc tout naturellement que Jean-Michel d’Hoop, quand il s’en empare, décide de faire jouer des poupées animées aux côtés d’humains. Pour autant, ne vous attendez pas à voir surgir des petites bestioles, des personnages tous mignons, qui sembleraient sortir d’un livre d’image pour enfants sages….

Les reines de la nuit
Le songe d'une nuit d'été © Debby Termonia
Le songe d’une nuit d’été © Debby Termonia

Obéron, Titania, Puck et les petites fées de la forêt appartiennent au monde de la nuit. Ils et elles sont drag-queens, queer ou bear, exubérants et totalement folles. Les costumes de Camille Collin sont impayables ! Jean-Michel d’Hoop est dans l’air du temps. Cet artiste de talent s’amuse avec les codes du genre et de l’identité. Cela fonctionne à merveille parce que si rien n’est dans la caricature, tout est dans la démesure de la fête. On est véritablement dans ce « rêve étrange et pénétrant » imaginé par ce bon vieux Will au XVIe siècle. On hurle de rire en les découvrant dans leur excès et leurs délires.

L’excellente adaptation actuelle permet d’accéder plus aisément à saisir l’intrigue, sans rien perdre de l’esprit et la poésie du matériau initial. Le Songe d’une nuit d’été est un écheveau assez compliqué d’aventures sentimentales : deux couples d’amoureux transis se retrouvent, involontairement, aux prises avec une dispute entre le roi et la reine des fées. Tout ça parce que l’elfe Puck s’est mélangé les pinceaux avec sa potion magique. Tout ce petit monde s’entrecroise alors, le temps d’une nuit d’été torride, dans une forêt où les sens se perdent.

Des marionnettes plus vivantes que jamais
Le songe d'une nuit d'été © Debby Termonia
Le songe d’une nuit d’été © Debby Termonia

Dans cette pièce, tout tourne autour du désir. On s’aime et on croit aimer. L’auteur a pris un malin plaisir à brouiller les pistes. La jeunesse se rebelle contre l’ordre paternel. Comme on les a aimés, Lysandre, Hermia, Démétrius et Héléna ! Ils sont délicieusement croqués avec les tics et les tocs des gamins d’aujourd’hui. Chaque détail de leurs gestuelles a son importance, déclenchant souvent de grands éclats de rire.

Ces marionnettes sont à taille humaine, sauf pour les représentants de l’autorité, le roi et la reine d’Athènes et le père d’Hermia. Ce sont des lilliputiens aux traits grossiers et grotesques. Toutes ces créatures, merveilleusement conçues par Loïc Nebreda, font corps avec leurs manipulateurs et manipulatrices, qui s’en donnent à cœur joie. Il y a une telle osmose entre la muppet et les humains qui la font vivre, que l’on finit par oublier qu’elle n’est qu’une poupée de chiffon !

La célébration du théâtre

Pour corser l’histoire, Shakespeare y a ajouté une troupe d’artisans qui préparent un spectacle pour le grand mariage royal à Athènes. Pour incarner ces comédiens amateurs, Jean-Michel d’Hoop a délaissé la marionnette au profit du clown. Les manipulateurs et manipulatrices se révèlent à nous alors dans une maîtrise parfaite de la bouffonnerie. Et quand Bottom se transforme en âne, nous sommes aux anges.

La scénographie est magnifique, voire enchanteresse. La musique nous entraîne sans soucis jusqu’au bout de la nuit. La mise en scène est inventive et d’une grande fluidité. Le songe d’une nuit d’été est la pièce de Shakespeare qui célèbre le plus le théâtre et le pouvoir de l’imaginaire. Tout cela est magnifié dans cette version, dans laquelle la compagnie Point Zéro nous entraîne dans un tourbillon psychédélique qui met nos zygomatiques à mal et notre plaisir au zénith.

Marie-Céline Nivière

Le songe d’une nuit d’été de William Shakespeare.
Festival Off AvignonLe 11-Avignon.
11 bd Raspail 84000 Avignon.
Du 7 au 26 juillet 2023 à 22h10, relâche les 13 et 20 juillet.
Durée 1h40.

Adaptation et mise en scène de Jean-Michel d’Hoop
Assistanat à la mise en scène Lucile Vignolles
Avec Ahmed Ayed, Adrien de Biasi, Soazig De Staercke, Yannick Duret, Fabrice Rodriguez, Amber Kemp, Héloïse Meire, Simon Wauters.
Musique de Boris Gronemberger.
Marionnettes et masques de Loïc Nebreda, assisté par Isis Hauben, Maël Christyn, Ségolène Denis.
Stagiaire marionnettes Garance Bancel.
Scénographie d’Olivier Wiame assisté par Olivia Sprumont.
Costumes de Camille Collin.
Confection costumes par Cinzia Derom.
Stagiaire costumes Evy Demotte.
Lumières de Xavier Lauwers.
Chorégraphie de Jérôme Louis.
Construction décor de Vincent Rutten
Régie générale de Grégoire Tempels, Marc Defrise.
Régie de John de la Hogue, Candice Hansel, Antoine Steier.


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