En abordant le thème du mariage, de ce lien à la fois fragile et puissant, le grand auteur russe nous pose dans ce roman la question du bonheur conjugal. Est-il une passion éternelle, un éternel recommencement, une relation qui se tisse sur les aléas de la vie et du temps qui passe ?
La beauté de l’âme slave

Tolstoï savait sonder les âmes. Dans ce récit, il donne la parole à une femme. Comment a-t-il réussi à si bien capter les moindres frissons de Macha ? Cette jeune femme qui attend tout de la vie, raconte ses découvertes et ses déconvenues. Il en faut du talent pour faire vibrer tous les bouleversements que traverse cette femme. Cette mouette qui ne demande qu’à prendre son envol et profiter de ce temps à passer sur terre. Anne Richard (Coupables, Rentrée 42), jouant sur la corde raide des émotions, fait entendre à merveille cette petite musique intime et la langue de Tolstoï.
On la voit rayonnante, rêvant au prince charmant. Elle frémit à sa rencontre. Bien que plus âgé que prévu, elle va se donner à lui avec la passion du grand amour.
Puis, l’ennui, l’envie d’être de son époque, de profiter des choses légères, va alors user ses espérances. La jeune fille devenue femme va comprendre que la vie n’est pas ce long fleuve tranquille. « À dater de ce jour, prit fin mon roman avec mon mari ; l’ancien sentiment devint un souvenir précieux, perdu à jamais, et un nouveau sentiment d’amour pour mes enfants et pour le père de mes enfants posa les bases d’une nouvelle vie heureuse, mais cette fois d’une tout autre façon. »
Une mise en scène tchekhovienne
Dans ce bel écrin de la petite salle du Poche Montparnasse, Françoise Petit nous transporte en Russie, celle du XIXe siècle. La peinture en toile de fond représentant un paysage, œuvre de Gaël Davrinche, est splendide. Selon le jeu des lumières d’Hervé Gary, on passe les saisons tout en allant de la campagne à la ville, du dehors au-dedans…
La musique de Beethoven étant très présente dans le roman, la metteuse en scène a pris le très bon parti de la faire jouer en direct par le pianiste Nicolas Chevreau. L’époux, incarné silencieusement par Jean-François Balmer, apparaît en silhouette par instants, l’enveloppant de sa tendresse. Il règne sur ce spectacle une ambiance feutrée, si douce, si réconfortante, qu’il nous fait du bien à l’âme.
Le Bonheur conjugal de Léon Tolstoï
Théâtre de Poche Montparnasse
Jusqu’au 13 juillet 2025
Durée 1h15.
Adaptation et mise en scène de Françoise Petit.
Avec Anne Richard, Nicolas Chevreau (au piano) et la participation amicale de Jean-François Balmer.
Musique Sonate Quasi una fantasia de Beethoven
Lumière d’Hervé Gary
Peinture de Gaël Davrinche
Chanson Natalia Ermilova.