Sophie Cattani © Stéphane Gallois
Sophie Cattani © Stéphane Gallois

Sophie Cattani : une artiste engagée et vibrante

Au Théâtre des Halles à Avignon, en collaboration avec Antoine Oppenheim, cofondateur du collectif ildi ! eldi, la comédienne et metteuse en scène porte à la scène À ce stade de la nuit, roman de Maylis de Kerangal, et plonge dans les récits de vie et les drames qui habitent l’île de Lampedusa.
Vos débuts

Votre premier souvenir d’art vivant ?
Cela remonte à l’école élémentaire. J’avais une excellente institutrice, passionnée de théâtre, qui nous faisait travailler tous les vendredis. J’étais une élève plutôt moyenne, et en tout cas dissipée, mais le vendredi, j’étais sa préférée. J’ai joué Harpagon dans L’Avare et j’ai découvert la joie de faire rire — un plaisir qui ne m’a plus quittée depuis.

Chasser les fantômes d’Hakim Bah - Mise en scène d'Antoine Oppenheim © Pauline Le Goff
Chasser les fantômes d’Hakim Bah, mise en scène d’Antoine Oppenheim © Pauline Le Goff

Pourquoi ce métier ?
En parallèle de mes études de lettres, j’étudiais le théâtre dans un conservatoire de quartier. J’ai été happée par l’atmosphère, le goût des textes, et surtout l’ambiance de la bande. Fabriquer ensemble, c’est encore ça qui m’anime aujourd’hui, lorsque le talent de chacun se met au service d’un projet. L’émulation créée me fait toujours sentir à ma juste place.

Racontez-nous le tout premier spectacle auquel vous avez participé. Une anecdote marquante ?
C’était aux Bouffes du Nord, un lieu tellement inspirant. J’ai envie de croire que toutes les aventures de théâtre qui ont habité cet espace circulaient encore dans les murs. Je me suis sentie portée par l’endroit. Nous jouions une comédie musicale sur le jazz, mais je chantais tellement mal que, la veille de la première, on m’a demandé de me mettre en sourdine. J’ai fait du playback tout du long… avec fougue ! J’ai appris l’art de faire semblant avec conviction.

Passions et inspirations

Votre plus grand coup de cœur scénique ?
Mes coups de cœur en tant que spectatrice sont beaucoup liés à la danse. Les spectacles d’Alain Platel, d’Anne Teresa De Keersmaeker, de Peeping Tom et ceux de Tg STAN ont été, à mes débuts, une grande source d’inspiration : transmettre de grands textes en désacralisant l’acte théâtral. Mademoiselle Julie de Gwenaël Morin reste aussi un spectacle de référence. Plus récemment, le travail de Séverine Chavrier, notamment Les Palmiers sauvages de Faulkner, m’a beaucoup marquée.

© Guillaume Bosson

Quelles rencontres ont marqué votre parcours ?
J’ai été invitée par des metteurs en scène qui m’ont fait grandir : Michel Raskine, Galin Stoev, Cyril Teste, Denis Marleau.
Au cinéma : Claude Miller, Nicole Garcia, Céline Sciamma, Dorothée Sebbagh, Jean-Xavier de Lestrade.
Je prends ces collaborations comme des invitations à entrer dans un monde.

Mais puisque j’ai toujours pris plaisir à penser la fabrication — et que je n’aime pas dépendre du désir des autres — j’ai créé le collectif ildi ! eldi avec Antoine Oppenheim. Un collectif au sein duquel nous invitons des copains à nous rejoindre. Acteurs de génie et camarades de réflexion : Odja Llorca, Grégoire Monsaingeon, Alexandra Castellon, Nelson-Rafaell Madel, notamment, nous ont rejoints. Je crois au travail d’équipe.

Où puisez-vous votre énergie créative ?
J’ai souvent puisé mon inspiration dans la littérature. La rencontre avec une langue me bouleverse. Ces auteurs qui parviennent à mettre des mots justes sur ce que l’on pressent, ressent sans savoir le nommer, m’impressionnent.

J’ai eu la chance de rencontrer et de créer d’étroites connivences avec des auteurs que j’admire, tels qu’Olivia Rosenthal, Antoine Wauters et, aujourd’hui, Maylis de Kerangal. Je me sens très chanceuse d’être en conversation avec eux, et de porter leurs voix à la scène.

L’actualité oriente aussi mes envies. Avec le collectif, nous essayons de fabriquer des objets scéniques qui fassent écho à notre époque.

L’art et le corps

Que représente la scène pour vous ?
Mon rapport au jeu est viscéral, très physique. Lorsque je ne joue pas, je suis un animal agité : je nage dans la mer, je marche dans les collines pour me tempérer.

Rêves et projets

Avec quels artistes aimeriez-vous travailler ?
J’aimerais travailler avec Séverine Chavrier, Julien Gosselin et Gwenaël Morin.

Si tout était possible, à quoi rêveriez-vous de participer ?
Peut-être intégrer la Comédie-Française. Pour jouer, jouer, et rejouer jusqu’à l’épuisement.

Si votre parcours était une œuvre d’art, laquelle serait-elle ?
Si j’étais une œuvre, je serais une sculpture de Miquel Barceló. Un morceau d’argile ocre qui se transforme, solaire et physique, explorant les fonds marins — comme Barceló — mais qui, soudainement, s’emmêle dans un sac plastique sur la tête, sort de sa rêverie, et se dit qu’il faudrait en dire quelque chose.


À ce Stade de la nuit de Maylis de Kerangal (Cie Collectif ildi !eldi)
Théâtre des HallesFestival Off Avignon
du 5 au 26 juillet 2025 – Relâches les mercredis 9, 16 et 23 juillet 2025
à 16h15
durée 55 min

Mise en scène d’Antoine Oppenheim et Sophie Cattani
Avec Sophie Cattani (jeu), Mahmood Peshawa (peinture)
Musique de Pierre Aviat
Scénographie et lumières de Cyril Meroni
régie générale et son de Guillaume Bosson
création vidéo d’Antoine Oppenheim et Cyril Meroni
Texte publié aux Éditions Verticales

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