L'agrume de Valérie Mrejen - Mise en scène de Mélissa Barbaud © Julien Poulain

Festival du TNB 2023 : diversité de formes et de styles 

Du 15 au 25 novembre 2023, le Festival du TNB, initié en 2017 par Arthur Nauzyciel, a tenu toutes ses promesses artistiques.

L'agrume de Valérie Mrejen - Mise en scène de Mélissa Barbaud © Julien Poulain

Le Festival du TNB, initié en 2017 par Arthur Nauzyciel, a tenu toutes ses promesses artistiques. Multipliant les offres et les lieux de représentations, l’édition 2023 qui a offert, durant trois semaines, aux Rennais un bel éventail de spectacles et d’installations, s’est terminé ce week-end, avec le travail documentaire de Vincent Collet, la déambulation muséale de Mélissa Barbaud et la lecture musicale de Lou Doillon.

© Julien Poulain

Un ciel de plomb gris recouvre la capitale bretonne. Le soleil ne viendra pas du ciel, mais bien des propositions artistiques, qui, disséminées dans toutes l’agglomération rennaise, apportent aux festivaliers réflexions venues d’ailleurs, baumes au cœur et poésies. Loin du bruit de la ville, dans une atmosphère ouatée, le théâtre de L’air libre s’ouvre sur une nouvelle ère. Depuis quelques mois, Le Joli collectif, fondé par les metteurs en scène Enora Boëlle et Vincent Collet, a pris, aux côtés de Babeth Bouëtard et Jenny Dodge, les rênes de ce lieu dédié aux écritures contemporaines. Dans le cadre du Festival du TNB, ils présentent leur dernier volet de leur trilogie sur le pouvoir, Justice.s, le grand tour.

Justice.s - Joli Collectif - Portrait VincentCollet © Lise Gaudaire
Justice.s du Joli Collectif © Lise Gaudaire

Poursuivant leur désir de comprendre le monde et d’appréhender comment tout un chacun s’approprie la notion de justice, les quatre co-auteurs-interprètes – Marie-Lis CabrièresVincent ColletFanny Fezans et Vincent Voisin – sont de 2019 à 2022 partis à la rencontre dans six pays différents, d’habitants de tout âge, de tout métier et les ont filmés. Sorte d’état des lieux des réflexions des uns, des autres, qu’elles soient intimes ou liées à l’histoire, Justice.s se veut comme un parcours, une fable humaine. 

Construisant à vue à la manière d’un meuble Ikéa, la scénographie de l’installation qui permet en fin de spectacle de découvrir les six documentaires qui ont permis de tisser ce récit éthologique autant que sociologique, les quatre artistes racontent à la manière d’un carnet de bord, d’un journal très personnel leurs différents voyages. Si les retranscriptions des entretiens passionnent, leur manière de s’en servir pour faire spectacle laisse le spectateur en dehors. Si la pièce semble anecdotique, la partie installation vidéo immersive est le véritable attrait de cette œuvre hybride. 

L'agrume de Valérie Mrejen - Mise en scène de Mélissa Barbaud © Julien Poulain
L’agrume de Valérie Mrejen, Mise en scène de Mélissa Barbaud © Julien Poulain

S’emparant de L’Agrume, courte nouvelle de Valérie Mrejen, artiste associée du TNB, la metteuse en scène Mélissa Barbaud s’amuse à reconstruire telle une archéologue les vestiges d’une histoire d’amour singulière, celle de l’auteure avec un garçon ni beau, ni laid, un peu trapu, un être qui a une conception bien particulière des relations humaines. Remontant le fil de ce conte contemporain tissé à partir de post-it laissés comme des cailloux dans la mémoire, la comédienne Marie-Bénédicte Cazeneuve reconstitue au cœur d’une salle du Musée des Beaux-Arts de Rennes des instants de vie qui s’écoulent sur quelques mois. 

Souvenirs incertains, anecdotes croustillantes, moments intimes ou attentes interminables, L’Agrume, puisque tel est le surnom qu’il s’est donné, apparait en creux dans toute sa banalité, sa lâcheté et laissent apparaitre les sentiments tièdes, quasi impassibles, qui l’animent. Garçon quelconque, il est rendu extraordinaire par la verve de l’autrice, la mise en scène ingénieuse et le jeu légèrement espiègle d’une actrice finement habitée. Une belle expérience qui réchauffe les cœurs et donne à chacun l’impression d’une vie plus intéressante qu’il n’y parait. 

Lou Doillon © DR
Lou Doillon © DR

Portant une robe longue façon patchwork, Lou Doillon irradie la salle du Paradis. Le feu dans les yeux, la chaleur dans sa voix légèrement rauque, la chanteuse et comédienne se glisse avec passion dans les mots de la mystérieuse poétesse américaine. Ménageant ses effets, tous très simples – jeux d’ombres et de lumières, quelques mouvements, quelques accords de guitare, elle invite les spectateurs, une poignée, dans une balade poétique au cœur de l’intimité d’Emily Dickinson, frêle épistolière née en 1830 dans la petite communauté puritaine du Massachusetts, poétesse majeure ayant peu quitté Amherst, sa ville natale et a fini sa vie recluse dans sa chambre. 

Inclassable, surprenante, renfermée, en rébellion contre les conventions de son époque, faisant le pain pour toute la communauté, Emily Dickinson est insaisissable. Et c’est cette étrangeté, cette singularité qui a séduit l’artiste. À travers une sélection de lettres et de poèmes, Lou Doillon esquisse avec une grâce infinie, une délicatesse extrême le portrait d’une femme unique qui n’a pas fini d’étonner. Offrant son regard sur la poétesse, sans pour autant lever le voile sur cet être autant lumineux que sombre, elle signe une carte blanche envoûtante, une belle épopée littéraire à savourer encore et encore ! 


Festival du TNB
Du 15 au 25 novembre 2023
TNB
1 rue Saint-Hélier
35040 Rennes

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