Quartett de Heiner Müller mis en scène par Jacques Vincey ©Christophe Raynaud de Lage
©Christophe Raynaud de Lage

Vincey, Alexandridis et Nordey font Quartett

En mettant en scène "Quartett", Jacques Vincey donne une partition de choix au duo Stanislas Nordey-Hélène Alexandridis.

Quartett de Heiner Müller mis en scène par Jacques Vincey ©Christophe Raynaud de Lage
©Christophe Raynaud de Lage

Peut-être que les personnages du Quartett de Heiner Müller épousent particulièrement bien, plus que d’autres, les contours du « grand comédien ». D’abord parce qu’il faut savoir embrasser la froideur bouillonnante qui rend les personnages de Laclos, tels que les réécrits l’Allemand, si obsédants et si ludiques. Mais aussi parce que l’apparition de Stanislas Nordey et Hélène Alexandridis en Valmont et Merteuil dans la mise en scène signée parJacques Vincey rend directement la hauteur régalienne des deux personnages. L’aura et la haute tenue des comédiens esquissent, à la surface du plateau, l’irréalité aristocratique dans laquelle baigne la pièce (et à laquelle les costumes baroques d’Anaïs Romand et les hautes perruques poudrées de Cécile Kretschmar donnent son étoffe). Plus les jouets sont précieux, plus on jouit de les voir se briser.

Alexandridis et Nordey s’adonnent royalement à l’exercice müllerien. Il y a la froideur métallique et souveraine de la comédienne en marquise, mystifiée par une fausse grâce. Il y a le déséquilibre pervers du comédien en vicomte torve, fébrile mais glacial. Surtout, dans cette joute verbale à la cruauté toute théorique, les deux artistes laissent transparaître une complicité souterraine qui annonce le basculement à venir des personnages dans l’interprétation. Bientôt, les costumes changeront à vue, de peu, juste assez pour que Valmont devienne Tourvel, que Merteuil devienne Valmont et ainsi de suite, comme le veut la réécriture d’Heiner Müller. Les jeux des deux libertins deviennent vite un dédale de miroirs où chacun se reflète dans l’autre, et où la marquise finit par tout dévorer dans le noir de son esprit. On regrette que cet énoncé, humainement trouble mais théâtralement limpide, soit un peu faussé par des effets visuels et sonores par trop décoratifs, qui empèsent la mise en scène quand il suffisait de laisser l’intelligence du texte faire œuvre.

Samuel Gleyze-Esteban – Envoyé spécial à Tours

Quartett de Heiner Müller
Théâtre Olympia – CDN de Tours
7 rue de Lucé, 37000 Tours

Du 26 septembre au 7 octobre 2023
Durée 1h15

Tournée
12 octobre 2023 à lÉquinoxe – Châteauroux
17 octobre 2023 au Gallia Théâtre – Saintes
22 février 2023 à la Halle aux grains – Blois
5 au 8 mars 2024 au TNBA – Bordeaux
12 avril 2024 au MA Scène nationale – Montbéliard
16 et 17 avril 2024 à la Comédie de Colmar
5 au 17 mai 2024 à la MC Bourges

Texte Heiner Müller
Traduction française de Jean Jourdheuil et Béatrice Perregaux
Mise en scène Jacques Vincey
Collaboration artistique Blanche Adilon-Lonardoni conseil dramaturgique Irène Bonnaud
Scénographie Mathieu Lorry-Dupuy
Lumière Dominique Bruguière, assistée de Nicolas Faucheux
Musique Alexandre Meyer
Costumes Anaïs Romand
Perruques et maquillage Cécile Kretschmar

Avec Hélène Alexandridis, Stanislas Nordey et le musicien Alexandre Meyer

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