Weber à vif © Thomas O'Brien

La rêverie immense de Jacques Weber, colosse aux pieds d’argile

À la Scala de Paris, le grand Jacques présente Weber à vif, un spectacle où les mots et la musique font bon ménage pour titiller nos méninges et raviver nos appétences théâtrales.

Weber à vif © Thomas O'Brien

À la Scala-Paris, le grand Jacques présente Weber à vif, un spectacle où les mots et la musique font bon ménage pour titiller nos méninges et raviver nos appétences théâtrales. Un beau moment qui procure un vif plaisir.

© Thomas O’Brien

Weber sur scène, c’est un bonheur littéraire et théâtral. Littéraire, car les textes, soigneusement choisis, sont des petits chefs-d’œuvre d’humour et d’intelligence. Les mots virevoltent, s’enflamment, s’enchaînent et brillent. Théâtral, car Weber, tout à la joie d’être sur scène, laisse exploser dans un feu d’artifice les nombreuses couleurs et nuances de son jeu.

De l’ancien et du neuf

Ce monstre sacré aime donner des rendez-vous solitaires avec le public. C’est ce qu’il avait fait pour célébrer la réouverture des salles de spectacle, en juin 2021, avec Correspondances, Victor Hugo – Gustave Flaubert au théâtre Antoine. Pendant des années, il a promené son Weber seul en scène sur les planches. Un spectacle dans lequel, à travers un choix de textes savoureux, il racontait l’histoire d’un jeune homme qui, du pensionnat de province, passa au pensionnat de la Comédie-Française. Ce spectacle, qu’il aimait donner l’été à Paris, n’était jamais tout à fait le même. Selon l’humeur et la dérive du temps, il prenait des variations différentes.

Weber à vif © Thomas O'Brien
© Thomas O’Brien

Ce nouveau spectacle n’est pas si éloigné de l’ancien. Il y est toujours question de ce temps qui passe et que l’on ne rattrape guère. L’acteur s’y dévoile dans sa chair vive, non recouvert de tout autre tégument. Pour cela, il alterne anecdotes, réflexions personnelles, et textes qu’il affectionne. Ceux-ci sont signés, entre autres Tom Stoppard, Paul Claudel, Arthur Rimbaud, Frida Kahlo, Antonin Artaud, Vladimir Maïakovski, Marguerite Duras, Anton Tchekhov… On y retrouve certains textes déjà utilisés précédemment, mais cela n’est pas bien grave. Il y a des plaisirs que l’on ne boude pas. À cette prestigieuse liste citée, il faut y adjoindre un auteur possédant une plume bien poétique, Jacques Weber. Selon l’humeur du soir, certains textes sont coupés où ajoutés. Ainsi, nous ne voyons, là encore, jamais tout à fait le même. Il en est de même avec ses digressions.

Comediante ! Tragediante !

Weber est un homme de théâtre passionné et passionnant. Alors, lorsqu’il évoque cet art qu’il aime tant, on se régale. Ses choix des citations de Louis Jouvet sont de véritables délices. Tout comme son interprétation du texte génial de Raymond Devos sur le dédoublement de la personnalité. Et lorsque celui qui fut un des plus beaux Cyrano se lance dans la tirade des « Non merci », l’actualisant pour éreinter critiques et faiseurs, on ronronne de plaisir.
En bon éclaireur, connaissant par cœur le Lagarde et Michard, « guide du routard de la littérature », son explication de texte de Victor Hugo La retraite de Russie est irrésistible. Tout comme son Corneille vieillissant et radotant au fil du temps, ses Stances à Marquise ! Il faut le voir jubiler, lorsqu’il nous sort de sa voix de stentor la réponse de la belle Du Parc qu’imagina Tristan Bernard : « J’ai vingt-six ans, mon vieux Corneille, et je t’emmerde en attendant. »

Weber aime la musique. Dans ses premiers seuls en scène, il était accompagné de musicien. Le grand orchestrateur François Raubert, lui avait même concocté un univers musical. Désirant retrouver ce plaisir de dialoguer avec des musiciens, il a choisi de partager la scène avec un accordéoniste étonnant, Pascal Contet, et un harmoniste extraordinaire, qui accompagnait Johnny Hallyday, Greg Zlap. Leurs parenthèses musicales, où l’improvisation à la part belle, se glissent avec aisance et légèreté dans l’univers du comédien. Après la Scala-Paris, ce spectacle s’installera en juillet, durant le Festival Off d’Avignon, à la Scala-Provence. Les cigales vont adorer !

Marie-Céline Nivière

Weber à vif, saga musicale et poétique
Festival Off AvignonLa Scala Provence
3, rue Pourquery de Boisserin – 84000 Avignon.
Du 7 au 29 juillet 2023 à 15h45, relâche les 10, 17, 24 et 25 juillet.

Durée 1h15.

La Scala Paris
13 boulevard de Strasbourg
75010 Paris.
Du 11 au 26 avril 2023.
Du mardi au samedi à 19h, dimanche 15h, relâche les 16 et 22 avril.

Avec Jacques Weber aux mots, Pascal Contet à l’accordéon et Greg Zlap à l’harmonica.

Bande annonce Weber à vif © La Scala Paris
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