Couv_FIT_chaillot_ ©Rahi Rezvani 2018_online_7_@loeildoliv

Le Nederlands Dans Theater 2 tutoie les étoiles à Chaillot

A Chaillot, le NDT2 fait un show incandescent porté par des interprétations virtuoses.

Au sommet de leur art, les jeunes interprètes âgés de 17 à 23 ans du Nederlands Dans Theater 2, la seconde troupe de l’excellente compagnie basée à La Haye, enchantent par leur virtuosité et leur maîtrise impeccable. Réunissant trois pièces chorégraphiques à la grammaire résolument contemporaine, mais fort différente les unes des autres, le programme proposé par le théâtre national de la danse, qui a tout d’un rêve éveillé, se révèle un incontournable de la saison. 

La foule se presse dans le foyer de Chaillot. L’excitation est à son comble. La compagnie, ayant pour artistes résidents, le duo Sol León et Paul Lightfoot, dont deux pièces font actuellement leur entrée au répertoire du Ballet de l’Opéra de Paris, propose un triptyque chorégraphique qui souligne l’incroyable talent de ces interprètes juniors. Dédoublée depuis 1978, la compagnie offre, avec NDT2, à une vingtaine de jeunes artistes, de se confronter à des écritures contemporaines singulières, à des langages chorégraphiques très différents, très personnels. Invitant la crème de la crème de l’émergence, les stars tendance du monde de la danse, la troupe convie le public à un cocktail sur-vitaminé mêlant sensualité, gestuelles robotiques et transes hypnotiques. D’Eckman à Goecke, en passant bien évidemment par León & Lightfoot, c’est tout un panel de styles qui défile devant nos yeux ébahis par la performance. 

Rideau noir baissé, un ténébreux jeune homme aux yeux bleus joue les maîtres de cérémonie. Mêlant répliques humoristiques et pantomimes drolatiques, il donne le ton à Fit, la pièce chorégraphiée par le suédois Alexander Eckman, spécialement pour la NDT2. Enfant terrible de la danse, déjouant les codes avec beaucoup d’humour, il invite à un voyage singulier par-delà les genres – tous portent des tutus blancs – , les univers. Dans un décor minimaliste, postapocalyptique, sous un nuage de fumigène, entre rêve fantasmagorique et vision un brin angoissante, la troupe s’en donne à cœur joie et, avec une vitalité mordante, espiègle, envahissant le plateau de leur folle farandole, de leur loufoquerie ensorcelante. 

À peine le temps de se remettre de cette première partie enlevée lumineuse, que Marco Goecke nous entraîne dans un songe obscur où se confrontent les compositions romantiques de Franz Schubert, à celles plus rock de Placebo, ou plus expressionnistes d’Alfred Schnittke. Mouvements saccadés, corps secoués de spasmes, l’écriture se fait nettement plus sérieuse, plus dramatique. Si l’écriture froide, mécanique de l’artiste allemand, laisse à l’écart, la virtuosité, l’engagement de la jeune troupe fait son effet, et charme sur le fil. Avec « Wir sagen uns dunkles » – soit littéralement, nous nous disons des choses sombres – l’atmosphère se tend quelque peu. 

Enfin, pour clôturer cette soirée sous le signe de l’excellence, Signing off, une pièce courte concoctée par León & Lightfoot, vient nous enchanter. Entrelaçant poésie épurée, précision des gestes et suavité des performances, le duo d’artistes à la tête du NDT cisèle son écriture au plus près des corps, déliant les membres et redessinant grâce au jeu de lumière les silhouettes élancées des six danseurs. Délimitant les espaces par un ensemble de voiles noirs, il nous convie à un poème dansé d’une rare intensité qui s’accorde magistralement aux musiques de Philip Glass.

Bien que chorégraphiquement parlant rien de nouveau sous le soleil de Chaillot, le programme présenté par le NDT2 fait la part belle aux artistes et à leur qualité d’interprétations. Un moment à ne pas rater ! 

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore


Programme León & Lightfoot / Ekman / Goecke
Théâtre national de danse de Chaillot
1 place du Trocadéro
 75116 Paris
jusqu’au 19 mai 2019 
durée 2h00 avec entractes

FIT
chorégraphie d’Alexander Ekman
avec 16 danseurs

Wir sagen uns dunkles
chorégraphie, scénographie et costumes de Marco Goecke
lumières d’Udo Haberland
conseil musical : Jan Pieter Koch
musiquede Franz Schubert, Placebo & Alfred Schnittke
avec11 danseurs

Signing Off
chorégraphie et scénographie de Sol León et Paul Lightfoot
lumières de Tom Bevoort
costumes de Sol León & Paul Lightfoot
musique de Philip Glass : from Concerto for violin and orchestra [1987] part I & II
avec 6 danseurs

Crédit photos © Rahi Rezvani

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