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Trans de Vie

Au théâtre de la Bastille, Didier Ruiz donne la parole à sept femmes et hommes transgenres.

Qui est-on vraiment ? De quel droit juge-t-on l’autre ? Avec beaucoup de pudeur, de finesse, Didier Ruiz offre une renaissance à sept femmes et hommes transgenres, qui au-delà des tabous d’une société corsetée, livrent une poignante leçon de vie, d’humanité. Bravo !

Ici, pas d’effets de manche, de faux-semblants. Tout est vrai, tout est réel. Quatre femmes et trois hommes transgenres de Barcelone, les un.e.s après les autres, viennent prendre la parole, raconter leur souvenir, leur histoire. Avec une fluidité, un sens du rythme, les mots s’entremêlent, les récits se croisent, se chevauchent, se percutent. Le rire aux lèvres, les larmes aux yeux, ils.elles livrent sur un plateau ce qu’ils ont été, par où ils sont passés et ce qu’ils sont aujourd’hui.

Epanoui.e.s, heureux.ses, Neus Asencio, Clara Palau, Danny Ranieri, Raúl Roca, Ian de la Rosa, Sandra Soro et Leyre Tarrason Corominas, (re) naissent sur scène comme dans la vie. Des brimades de l’enfance, du regard gêné, intolérant, de certains de leurs proches, de l’incapacité à être bien dans le corps dans lequel ils ont vu le jour, ils.elles n’en gardent qu’une blessure secrète, lointaine. Ils.elles l’exhortent en nous la confiant tout simplement, tout naturellement.

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Se mettre à nu.e, tout abandonner, pour enfin se libérer de cette prison corporelle qui ne leur convient pas, pour être cet.te autre désiré.e, voulu.e, ressenti.e, n’a rien de facile, d’aisé. Pourtant avec beaucoup de générosité, de délicatesse, ils.elles osent parler, dire, afficher leur être profond. Bouleversant.e, touchant.e, poignant.e, Neus, Clara, Danny, Raúl, Ian, Sandra et Leyre recomposent devant un public silencieux, attentif, curieux, bienveillant, leur corps, leur vie. Entre passé et présent, ils.elles, héros ou héroïne des temps modernes, malgré certaines expériences douloureuses, des rejets, font croire, en la fraternité, la sororité.

Non que la vie soit totalement belle, rose, mais bien qu’elle vaille d’être vécue, qu’il existe heureusement derrière l’obscurantisme, le puritanisme, l’intolérance, une lueur d’espoir, un humanisme lumineux, altruiste et sensible.

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Bien sûr, on aurait aimé un peu plus de théâtralité, un geste esthétique et scénique plus radical, plus puissant, moins paresseux, bien évidemment, Trans (Més Enllà) manque d’une dimension dramaturgique, mais Didier Ruiz, par cette forme épurée, presque lapidaire, laisse le récit, les mots parler d’eux-mêmes, ne travestit pas les propos de ses non-comédiens, mais véritables conteurs de vie. Une mise en espace des corps, des maux et des histoires qui touche en plein cœur. En mettant en lumière à l’invisible, il fait plus. Il brise préjugés, aprioris et tabous. C’est bien l’essentiel !

Par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore


Trans (Més Enllà) de Didier Ruiz
Théâtre de la Bastille
76, rue de la Roquette
75011 Paris
Jusqu’au 10 février 2019
Durée 1h environ

Mise en scène de Didier Ruiz assisté de Mónica Bofill
avec Neus Asencio, Clara Palau, Danny Ranieri, Raúl Roca, Ian de la Rosa, Sandra Soro et Leyre Tarrason Corominas
Collaboration artistique Tomeo Vergés
Scénographie d’Emmanuelle Debeusscher
Costumes de Marie Negretti
Création lumières de Maurice Fouilhé
Musique d’Adrien Cordier I
mages de Lu Aschehoug, Garance Bigo, Clothilde Evide, Aurore Fénié, Arthur Gaillon, Anne Hirsch, Yu-Heng Lin et Julia Nuccio Vidéo Zita Cochet
Participation à la distribution Àngels Nogué i Solà
Traduction et surtitrage de Julien Couturier/PANTHEA

Crédit Photos © Christophe Raynaud de Lage

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