Dans un décor de toiles sombres tendues, qui se transforme à vue en cabane de fortune, en caniveau ou en cocoteraie familiale, un jeune homme, Hereau, cherche à savoir qui est son géniteur, alors qu’il va devenir père à son tour. Il n’est pas prêt. Il préfère s’amuser, pêcher, boire des bières avec Teko, le cousin de sa mère, celui qui, pour lui, ressemble le plus à une figure paternelle. Face à cette paternité imminente, une question s’impose : comment être père sans savoir d’où l’on vient ? Il questionne sa mère sans relâche. Elle parle d’elle, parle beaucoup, mais se ferme dès qu’il aborde ce sujet-là.
À force de silence, Hereau rompt le lien, quitte la maison et s’élance sans repères. Il erre dans la ville, fouille les caniveaux, s’égare en poursuivant le moindre indice. Ce qu’il découvre finit par le dépasser. Plusieurs vérités longtemps enfouies refont surface, portées par l’apparition inattendue d’un fantôme, sa grande-tante, tout juste disparue.
En finir avec les secrets pour vivre
Solenn Denis écrit au plus près du réel, avec ce qu’il faut de fantastique pour faire écho aux croyances polynésiennes. Une langue franche, concrète, qui fait entendre les nuances du quotidien, ses joies, ses peines. Ce n’est pas une pièce à clés. Le nœud est simple, les ressorts évidents. Mais la justesse des dialogues, la manière dont chacun protège l’autre en le blessant, touche au cœur. Les fantômes empêchent d’avancer, le passé empêche d’aimer, et tant que les secrets demeurent, rien ne peut vraiment commencer.
La mise en scène d’Antonin Chalon épouse cette tension. Peu d’effets, beaucoup de précision. Il s’attache aux corps, aux regards, au tremblement. Les comédiens portent avec finesse les contradictions de leurs personnages. Dans cette fable familiale née à Tahiti, chacun tente de dire, enfin, tout ce qui le ronge de l’intérieur. Et c’est dans cette tentative, dans cette parole difficile, que Keshi touche au plus juste !
Keshi de Solenn Denis
11. Avignon – Festival Off Avignon
05 au 24 juillet 2025 – relâche les 11 et 18 juillet 2025
À 10h00
durée 1h20
Mise en scène d’Antonin Chalon assisté de Mélissa Prat
Avec Tepa Teuru, Tuarii Tracqui, Justine Moulinier, Guillaume Gay
Lumières de Quentin Maudet
Musiques Clément Althaus
Scénographie Salma Bordes