Les Lila's - François Nouel - Christine Fernandez - Romane Bernard © DR
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François Nouel, Christine Fernandez et Romane Bernard : «Il nous tenait à cœur de donner la parole à des femmes porteuses de projets »

François Nouel et Romane Bernard ont repris en 2023 la direction du Théâtre des Lila’s à Avignon, jusqu’alors porté par Christine Fernandez. Ensemble, ils ont choisi une identité forte en dédiant leur plateau aux autrices.
11 juillet 2025
Comment la passation s’est-elle faite ?

Christine Fernandez : En 2015, lorsque nous avons fondé ce lieu, nous l’avons fait en souvenir de Lila Nett, chorégraphe et danseuse américaine, qui a introduit la danse contemporaine à Lyon. Arrivée en France dans les années 1970, Lila était une femme engagée, antimilitariste et lesbienne. Depuis 2018, nous avons un partenariat avec le centre LGBT d’Avignon. En mai, lors de l’IDAHO, (journée internationale annuelle de lutte contre l’homophobie et la transphobie), nous avons organisé des évènements dans le lieu.

Comme cela devenait difficile de résister à Avignon avec L’âme dans la pluie, le collectif d’artistes et de techniciens avec lequel je gérais le lieu, on s’est questionné. Depuis 2019, on cheminait avec Passage production et Art et Cités qui nous apportaient des spectacles. Quand j’ai annoncé que le collectif de l’Ame dans la pluie allait arrêter de participer au Festival Off, François était intéressé pour reprendre la gestion du théâtre. Nous avons parlé de son projet. Il y a une cohérence avec ce qu’étaient les Lila’s.

Pourquoi avoir choisi de reprendre ce théâtre ?
Les Lila's - La fille mère © Stéphane Pagano
« L’histoire de la fille d’une mère qui devient la mère d’une fille qui ne sera pas mère » d’Emilie Alfieri © Stéphane Pagano

François Nouel : J’avais envie de mettre en avant un projet. C’était un lieu de valeur qui avait une histoire forte, avec des pièces marquantes (Molly B avec Cécile Morel, Contrebrassens avec Pauline Dupuy, Toxique de Sagan avec Christine Culerier, Grosse Fringale solo de clown avec Céline Barbarin…). Avec Romane, on s’est dit qu’on pourrait essayer de faire un lieu de rencontres où le théâtre et les compagnies réfléchiraient ensemble. On souhaitait avoir une démarche plus solidaire.

Pourquoi avoir choisi cette identification ?
Les Lila's - Celle qui © Stéphane Benchimol
Celle qui de Romane Kraemer, librement inspiré de « Femmes qui courent avec les loups de C.P. Estès © Stéphane Benchimol

Romane Bernard : On a tout de suite pensé que dans un petit lieu (46 places), ce serait intéressant d’avoir une identité forte pour se démarquer. Les autrices, metteuses en scène sont encore sous-représentées à Avignon. Je suis sensible à cette cause comme Christine et François. Il nous tenait à cœur de donner la parole à des femmes porteuses de projets. La deuxième année, on a voulu affiner avec l’écriture et affirmer que le plateau était dédié aux autrices, à leur plume et à leur création.

François Nouel : Et de permettre aux spectatrices et spectateurs de faire un parcours dans la programmation pour découvrir la variété des propositions.

Comment organisez-vous votre programmation, qui est assez variée ?

Romane Bernard : C’est la qualité artistique de la proposition qui prime. Il y a aussi le contact humain qu’on peut avoir avec les artistes quand elles nous présentent leur projet. Il s’avère que nous avons cette année une belle diversité. C’est un hasard mais cela reflète qu’il y a mille femmes qui écrivent sur mille sujets. Quelque chose de merveilleux existe entre les compagnies programmées ici, cette sororité. Elles s’entraident et se soutiennent tout au long du festival.

Il y a majoritairement des créations mais vous présentez aussi deux reprises de l’année passée.
Les Lila's - L'apparence des choses © Rémi Bourdeau
« L’apparence des choses » d’Alison Demay © Rémi Bourdeau

Christine Fernandez : Nous nous sommes interrogés sur la question des reprises, car cela enlevait de la place aux autres. Mais, c’est aussi un moyen d’accompagner une compagnie. Cette année, nos coups de cœur de la saison passée sont L’histoire de la fille d’une mère qui devient la mère d’une fille qui ne sera pas mère et Mal élevée.

François Nouel : Effectivement, il y a différents niveaux dans la pratique artistique des compagnies programmées. Il y a de jeunes compagnies qui font leur premier Avignon, comme ÉchosLa nuit n’en finit plus, à côté d’autres, qui l’ont fait plusieurs fois et dont les créations tournent, des autrices reconnues comme Sarah Pèpe.

Après le festival, vous continuez à suivre les compagnies ?

Romane Bernard : On les suit humainement parce qu’on a tissé des liens assez forts. Sinon, artistiquement, nous sommes attentifs avec notamment le Local des Autrices, que Sarah Pèpe a ouvert cette année à Paris, pour faire un pont entre son lieu et le nôtre. 

Christine Fernandez : C’est ce qui a déjà été mis un peu en place cette année, avec Mal élevéeTyphaine D ou Appels d’urgence, programmés chez nous il y a deux ans, et qui ont joué là-bas. Échos y a fait ses avant-premières.

Romane Bernard : Sarah Pèpe avait joué chez nous il y a deux ans son spectacle Celle qui ne dit pas a dit, et revient cette année avec sa nouvelle création, Croî(t)re.

Et votre public…
Les Lila's - Mal élevée © DR
« Mal élevée » de Laetitia Wolf et Astrid Tenon © DR

Romane Bernard : On est encore trop jeunes pour bien s’en rendre compte, mais on y travaille. En tout cas, il y a des personnes qui connaissent depuis longtemps les Lila’s. Ils savent qu’ils vont trouver des spectacles qui vont les questionner.

François Nouel : La charte graphique va aussi permettre de totalement nous identifier.

Christine Fernandez : Depuis toujours, nous organisons le mercredi, jour de notre relâche, des événements sur la place, devant le théâtre. Nous avons la chance d’avoir ce havre de paix à notre disposition. Cette programmation en extérieur, féministe et gratuite, faite de spectacles, tables rondes, performances, concert, est bien repérée. Le 9, ça a été We’re here, we’re Queer et le 16, ce sera Textes et voix de femmes.


Théâtre des Lila’s
Festival Off Avignon
Du 5 au 26 juillet 2025

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