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Martine Chalverat © Nikita Thevoz
Martine Chalverat © Nikita Thevoz

Martine Chalverat : « Offrir une agora ouverte et vibrante »

Depuis 53 ans, le Festival de la Cité métamorphose le cœur de Lausanne en scène artistique à ciel ouvert. Sous l’impulsion de sa directrice, en poste depuis 2022, ce rendez-vous gratuit et pluridisciplinaire défend l’accessibilité, le dialogue avec l’espace public et l’exigence artistique. Du 1er au 6 juillet 2025, plus de 140 projets animeront six jours de festivités.
Le Festival de la Cité célèbre cette année sa 53ᵉ édition. Pouvez-vous nous rappeler ses origines, et ce qui constitue encore aujourd’hui son ADN profond ?

Martine Chalverat : C’est vraiment une institution à Lausanne. Son idée fondatrice, c’est la démocratisation culturelle. C’est une ambition qui reste au cœur de notre action. Tous les spectacles, concerts et autres propositions sont gratuits et investissent l’espace public.

Un autre aspect essentiel, c’est la relation à l’espace urbain : comment s’approprier l’espace public, comment penser l’architecture des lieux en écho aux propositions artistiques. C’est un travail que nous menons chaque année, notamment avec des architectes. Nous avons, par exemple, collaboré avec Joseph Wouters, architecte et chorégraphe bruxellois, pour concevoir l’espace scénique principal sur la place du Château pendant trois ans.

Phusis de Muchmuche Company ©  Pernette Emery
Phusis de Muchmuche Company © Pernette Emery

Cette année, Julian Vogel installe Crescendo, une structure monumentale composée de plus de 95 tubes de céramique, créée dans le cadre des Étés des Subs à Lyon et qui sera un espace à la fois de vie et de performances tout au long du festival.

Vous dirigez le Festival depuis trois ans. Qu’avez-vous souhaité insuffler à ce projet ? Quelle est votre vision pour le faire évoluer ?

Martine Chalverat : Ce que je trouve essentiel — et qui fait aussi partie de l’ADN du Festival — c’est cette ouverture permanente. Nous avons une programmation contemporaine, avec des propositions qui vont du grand public à des formes plus exigeantes.

Le grand défi, c’est de permettre à tous les publics de découvrir des propositions qu’ils n’iraient pas spontanément voir. L’avantage du Festival, c’est qu’il n’y a ni portes à franchir ni billets à acheter.

Nous travaillons activement cette dimension d’accessibilité, en invitant par exemple des maisons de quartier à participer à certains projets, ou en mettant en place des dispositifs spécifiques pour les personnes à mobilité réduite… Et bien sûr, nous cherchons toujours à renforcer ce dialogue si riche entre l’espace public, les publics et les propositions artistiques.

Cette édition 2025 s’annonce particulièrement dense. Quel est le volume de programmation ?
Lynks © Eddie Taz
Lynks © Eddie Taz

Martine Chalverat : Nous avons 140 projets, pour environ 200 représentations, concentrées sur six jours. Le Festival est par essence pluridisciplinaire. Nous accueillons des concerts, des formes d’arts vivants, et beaucoup de projets hybrides. Cette année, c’est frappant : de nombreux projets d’arts vivants intègrent la présence de musiciens et musiciennes sur scène. L’hybridité traverse vraiment l’ensemble de la programmation.

La programmation est-elle pensée autour de thématiques précises ? Ou privilégiez-vous une logique d’ouverture maximale ?

Martine Chalverat : Nous ne travaillons pas par thématique. L’objectif est d’élargir le champ de la programmation, pour multiplier les portes d’entrée et permettre à chacun de s’y retrouver. Bien sûr, au fil des choix, une ligne se dessine. Et c’est souvent en fin de processus, une fois l’image générale stabilisée, que des thématiques ou des tendances apparaissent.

Justement, cette année, quelles sont les grandes lignes et les thématiques qui se dégagent ?
The Scorpios © Pernette Emery
The Scorpios © Pernette Emery

Martine Chalverat : Dans les propositions d’arts vivants, on observe pas mal de thématiques politiques, de prises de position affirmées. Par exemple, Fury room de Fanny Krähenbühl aborde les violences faites aux femmes et le post-partum, en revendiquant le droit d’exprimer sa colère ou sa rage. Florence Minder, avec Good Mourning, propose un monologue à la fois percutant et drôle sur les violences du quotidien.

Fatima Ouassak, que vous connaissez peut-être, est écrivaine et militante écologiste et antiraciste. Elle signe Comme Ali, inspiré des révoltes des quartiers populaires en France après la mort de Nahel Merzouk. Elle jouera cette pièce accompagnée d’un musicien.

Nous accueillons aussi Parade d’intimidation aigre-douce, une très belle proposition de rue signée par la Lausannoise Luana Volet, aujourd’hui basée à Marseille. C’est un gang de femmes qui réinvestit la rue et interroge notre manière d’y (co)exister.

Enfin, le projet Armour, d’Arno Ferrera et Gilles Polet — que nous avions déjà accueilli avec Cuir — interroge les masculinités, les violences contraintes, et ouvre des perspectives vers un amour plus pluriel et plus libre.

Comment sélectionnez-vous les projets ? Existe-t-il une charte implicite, des fidélités avec certains artistes ?

Martine Chalverat : C’est un mélange de plusieurs choses. On essaie de constituer une programmation composée de projets qu’on considère urgents à partager avec le public, mais aussi avec tous les publics. Nous cherchons des propositions engagées, qui savent aussi être drôles et poétiques. Ce qui nous guide, c’est vraiment la singularité des formes — autant dans leur langage artistique que dans le propos qu’elles portent. Bien sûr, il y a aussi des fidélités : des artistes que nous suivons sur plusieurs projets, avec lesquels un dialogue durable se construit.

Le Festival est entièrement gratuit. Comment parvenez-vous à en assurer le financement ?
Yard © Nikita Thevoz
Yard © Nikita Thevoz

Martine Chalverat : L’équilibre budgétaire est assez précaire. Environ 37 % de notre budget vient de financements publics, ville et canton. Un tiers repose ensuite sur les recettes des bars, qui restent très dépendantes de la météo. Enfin, nous menons chaque année un travail conséquent de recherche de fonds auprès de fondations et de partenaires privés. C’est un travail que nous devons recommencer systématiquement.

Vous accordez aussi une grande importance à la participation du public. Quels projets incarnent cette dimension cette année ?

Martine Chalverat : C’est essentiel pour nous que le public ne soit pas seulement spectateur, mais aussi acteur. Nous proposons cette année un projet de chœur participatif : une artiste lausannoise a créé une chanson qui sera interprétée en chœur autour de la cathédrale pour les 750 ans de cette dernière le samedi du festival. Ce type de projet permet aux gens de vibrer ensemble, de se rencontrer. C’est ce dialogue entre les spectateurs et spectatrices, ce sentiment d’unité, qui nous tient particulièrement à cœur.

Quels liens entretenez-vous avec les autres lieux ou institutions culturelles de Lausanne ?
© Nikita Thevoz
© Nikita Thevoz

Martine Chalverat : Nous développons chaque année certains partenariats ponctuels avec des institutions lausannoises, notamment des collaborations au niveau technique, mais aussi sur des projets comme cette année, avec la Manufacture. Nous accueillons Guillaume Tell d’après Schiller, une pièce portée par la Haute École de théâtre de Suisse romande (la Manufacture) et mise en scène par Gwenaël Morin, ou encore un partenariat avec la radio associative Loose Antenna. Ce genre de partenariat est précieux : cela permet de créer des ponts, d’enrichir nos programmations respectives.

Souhaitez-vous ajouter un dernier point sur cette édition ?

Martine Chalverat : Chaque année, nous veillons à ce que le Festival reste un espace de participation, de rencontre, d’appropriation collective. Ce que nous souhaitons, c’est que le public, quel que soit son âge, son parcours ou ses habitudes culturelles, puisse vibrer ensemble dans cet espace commun qu’est la ville, et que la rencontre se fasse avec les projets artistiques. C’est cette dimension profondément humaine et ouverte que nous continuerons à défendre.


Le Festival de la Cité
Du 1er au 6 juillet 2025

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