Jonathan Drillet © Philippe Lebruman
© Philippe Lebruman

Jonathan Drillet, joyeux luron du théâtre

Aux côté de sa comparse, l'inénarrable Marlène Saldana, le comédien, metteur en scène et dramaturge revisite à la sauce kitsch Showgirls de Paul Verhoeven.

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
Royal de Luxe, dans les rues de Saint-Brieuc. Un spectacle hors norme, très éclectique, impressionnant, qui transforme tout sur son passage, la ville et les gens.

Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ?
À l’école primaire, un jour, une fille qui s’appelait Céline vient me voir. Je ne la connaissais pas. Elle me salue et me dit dans la foulée que le cours de théâtre, c’est le mercredi après-midi, que ça se passe dans la salle municipale et que c’est mon père qui s’en occupe. Je me souviens avoir pensé qu’elle devait se tromper d’interlocuteur. Je n’avais jamais rien demandé à personne. Et puis en rentrant, j’ai répété la même chose à mes parents. Ils m’ont laissé y aller, et je suis resté.

Qu’est-ce qui a fait que vous avez choisi d’être comédien, metteur en scène, auteur et dramaturge ?
Pour la fantaisie, pour la variété des emplois et des passions, pour les rencontres, parce que je peux me lever tard le matin et travailler toute la nuit si j’en ai envie. Je voyage, j’ai le trac, je me dis que l’art doit bien servir à quelque chose. Je parle d’art en général, parce que j’occupe différents postes, beaucoup de choses m’intéressent. Je peux même décider d’être peintre si je veux. En 2013, pour notre pièce sur Saint-Laurent, nous avons passé des semaines avec Marlène Saldana et toute l’équipe à peindre des reproductions de tableaux célèbres. Si je le souhaite, je peux aussi être danseur comme dans Young people, old voices de Raimund Hoghe ou réalisateur (Starkness). Donc oui, il y a quelque chose de cet ordre. Je pense que j’ai choisi cette voie parce qu’elle me proposait une réinvention permanente de moi-même et de mon rapport au monde, de ce que j’ai à en dire.

Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ?
Le petit prince, une adaptation de Saint-Exupéry par le club de théâtre de l’école primaire dont je viens de parler. C’est à ce moment-là que j’ai compris quelque chose d’essentiel : il existe d’autres mondes.

Votre plus grand coup de cœur scénique ?
Schutz vor der Zukunft, de Christoph Marthaler, Avignon 2010.

Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Phia Ménard, Théo Mercier, Jonathan Capdevielle, Rebeka Warrior, Regina Spektor, John Giorno, Raimund Hoghe… Et Marlène Saldana, bien sûr. On fait tout le temps des rencontres, dans ce monde du spectacle vivant, et elles peuvent être intenses même si elles sont brèves. Récemment on a travaillé sur un projet avec un historien (Pierre-Olivier Dittmar), une chercheuse en sciences sociales (Elen Riot), une rappeuse (Kelly Rose / Uzi Freyja), une chorégraphe (Jolie Ngemi), une musicienne (Marie-Pierre Brébant), une comédienne (Sophie Lenoir), une réalisatrice de fictions sonores (Laure Egoroff), un directeur technique (Moustache), une collaboratrice artistique (Céline Peychet) et 20 jeunes interprètes: un projet de 12 heures de spectacle répété en trois semaines. Bref, et intense, donc.

Remi de Jonathan Capdevielle © Fabrice Robin
Rémi de Jonathan Capdevielle © Fabrice Robin

En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ?
Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée au niveau équilibre, mais ce qui me va bien au teint avec ce métier c’est la possibilité de pouvoir travailler avec des amis, un grand privilège. Par ailleurs, cela me permet de pouvoir assister à la naissance d’œuvres d’art, un phénomène passionnant.

Qu’est-ce qui vous inspire ?
La géopolitique, la science-fiction, le cinéma, l’astrophysique, mes chats, mes collègues.

De quel ordre est votre rapport à la scène ?
C’est un rapport à la fois d’excitation et de peur, une histoire de challenge, de pari, d’expérience, de tentative, d’alchimie et de liberté. Le théâtre, c’est aussi le lieu de la littérature vivante, celle qui prend vie. Et ça, les mots qui sortent de la bouche des gens, c’est quelque chose qui m’intéresse particulièrement.

À quel endroit de votre chair, de votre corps, situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Je n’en ai aucune idée. Au niveau du processus xiphoïde, sûrement, parce que j’aime beaucoup le nom de cette petite structure osseuse du corps humain, ça ferait un bon titre pour une comédie musicale d’anticipation qui se passerait dans un symposium de médecine quantique, par exemple.

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ?
Avec Ann Liv Young, Antonija Livingstone, Paul McCarthy, Léos Carax, Ascendant Vierge, Carlo Rovelli, Romeo Castellucci, les soeurs Labèque, Julia Ducournau, Jack Ferver, et avec des gens que je ne connais pas encore, des jeunes artistes qui inventent des formes nouvelles. Je voudrais aussi apprendre l’hypnose de spectacle, la scie musicale, avoir quelques bases en pyrotechnie, et en aquarelle.

À quel projet fou aimeriez-vous participer ?
Les Jeux olympiques d’hiver à Dubaï, évidemment. Et après, je veux bien la direction de l’Odéon.

Si votre vie était une œuvre, quelle serait-elle ?
Une petite collection d’art brut.


Showgirl de Marlène Saldana, Jonathan Drillet et Rebeka Warrior
présenté en janvier 2022 au Festival WEE ! TAP-Poitiers, Scène nationale
Durée 1H30

Reprise
Théâtre de la Bastille
26 février au 9 mars 2024

Texte et interprétation de Marlène Saldana Jonathan Drillet 
Création musicale Rebeka Warrior Mix Krikor 
Décor de Sophie Perez 
Sculpture de Daniel Mestanza 
Costumes, maquillage, perruques de Jean-Biche
Lumières de Fabrice Ollivier 
Son de Guillaume Olmeta 
Conseil chorégraphique de Mai Ishiwata 
Assistanat – Robin Causse 

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