Fluids du collectif Wauhaus - Paris l'été © Quentin Chevrier

Mécanique des Fluids

Au Lycée Jacques-Decour, dans le cadre de Paris l'été, le collectif Wauhaus, dirigé par Juni Klein et Jarkko Partanen, présente "Fluids".

Fluids du collectif Wauhaus - Paris l'été © Quentin Chevrier

Le collectif finlandais Wauhaus mené par le chorégraphe Jarkko Partanen et la metteuse en scène Juni Klein propose une performance singulière dans laquelle l’usage d’un lubrifiant permet de renouveler la gestuelle et d’explorer la vulnérabilité.

© Quentin Chevrier

Dans le théâtre du lycée Jacques Decour, un rectangle blanc plastifié recouvre le sol. Pour rejoindre sa place dans le dispositif quadri-frontal, chacun doit le longer avec précaution pour ne pas risquer de glisser. En certains endroits, produites par un mince filet de liquide qui suinte d’un des projecteurs, des flaques translucides dessinent un relief aquatique.

Par-delà la glisse
Fluids du collectif Wauhaus - Paris l'été © Quentin Chevrier
© Quentin Chevrier

Un léger sourire accroché au visage, un premier interprète prend possession de ce terrain de jeu. Mi-concentré, mi-goguenard, Joonas Tagel (assez irrésistible) avance doucement, imitant les pas d’un patineur sur ce sol glissant qui réserve quelques surprises. Il est rejoint par quatre danseuses. Rapidement, on comprend qu’il ne s’agit pas d’eau, mais d’un gel à la texture légère et élastique (en l’occurrence un lubrifiant, le J-Lube). Sa présence à la fois stimulante, sensuelle mais aussi dérangeante va pousser les cinq interprètes à s’adapter.

De la contrainte naît la créativité. On peut voir le recours à cette matière épaisse et collante comme une façon d’explorer comment les corps réagissent à des conditions matérielles inhabituelles. On se surprend à laisser remonter à la surface le souvenir sublime de Quando l’uomo principale è una donna, solo écrit par Jan Fabre pour Lisbeth Gruwez en 2005 dans lequel elle dansait nue le corps enduit d’huile d’olive… 

Impossible pour le danseur et les danseuses de rester solidement ancrés au sol ou de contrôler totalement leurs mouvements. Partenaire à part entière, cette substance ludique, mais par moments aussi aliénante, leur demande de se concentrer sur l’ajustement de leurs mouvements à cet environnement déstabilisant. Et oblige à reconsidérer le rapport à l’autre, dans sa fragilité et sa vulnérabilité.

Réinvention des gestes
Fluids du collectif Wauhaus - Paris l'été © Quentin Chevrier
© Quentin Chevrier

Les opportunités d’exploration semblent infinies. L’aspect burlesque n’est pas négligé. Enduits de ce gel, les interprètes se métamorphosent, prennent des poses insolites ou amusantes. Comme lorsqu’ils se transforment en toboggans sur lesquels ils dévalent comme des enfants. Le sol toujours plus glissant contraint à une gestuelle minimaliste ou expansive, parfois élégante, ou carrément maladroite. 

« Comment nous abandonner pour pouvoir être ému par une autre personne ? Comment nous laisser surprendre par l’émotion plutôt que de vouloir toujours contrôler le cours de notre existence ? » L’intention de départ de Fluids est intéressante mais ses glissades et ses étreintes tournent court faute d’une dramaturgie plus solide. Où voulaient-ils nous entrainer ? Empêtré dans cette substance onctueuse, ce quintet de sculptures mouvantes si étonnant soit-il fait du surplace.

Claudine Colozzi

Fluids par le collectif Wauhaus
festival Paris L’été
jusqu’au 30 juillet 2023
Lycée Jacques Decour
12 Avenue Trudaine 
75009 Paris
Durée : 50 mn

Auteurs-réalisateurs – Juni Klein, Jarkko Partanen
Avec Keithy Kuuspu, Karolin Poska, Sigrid Savi, Karoline Suhhov, Jonas Tagel.
Ingénieur du son – Heidi Soidinsalo.
Scénographe et éclairagiste – Samuli Laine.
Technicien – Marko Odar.
Costumes de Laura Haapakangas.

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