Cabaret de l'Exil- Irish Travellers - Bartabas - Zingaro © Hugo MARTY

La balade de Bartabas dans les vertes contrées d’Irlande 

Au Fort d’Aubervilliers, Bartabas présente Irish Travellers, le deuxième volet de ses cabarets de l’exil.

Cabaret de l'Exil- Irish Travellers - Bartabas - Zingaro © Hugo MARTY

Au Fort d’Aubervilliers, le célèbre cavalier et metteur en scène présente le deuxième volet de ses cabarets de l’exil. Après s’être aventuré en terre Yiddish l’an passé, il plonge dans l’univers des Irish Travellers et signe un spectacle kaléidoscopique, haut en couleurs autant que drôle.

Loin des bruits de la ville, des klaxons, le théâtre équestre Zingaro, son chapiteau de bois, ses caravanes reluisantes, son ambiance tzigane à nulle autre pareil, invite aux rêves, à lâcher prise avec la morosité et l’agressivité du monde. Chaque visite est un enchantement, une balade vers des ailleurs fantasmés, revisités. En attendant d’être appelé à embarquer pour l’Irlande, un bar-restaurant permet de prendre le temps de découvrir d’anciens décors, d’anciens costumes. Tout est fait pour permettre à chacun d’oublier ses soucis, de faire le vide, d’accepter le voyage immobile à venir. Sur une chair mobile, un évêque fait son entrée. Accent de Cork à couper aux couteaux, il harangue la foule, prêche la bonne parole, fustige notre dépendance au téléphone portable tout en conviant par groupes le public à rejoindre l’antre de Bartabas.

Vie(s) de nomades
Cabaret de l'Exil- Irish Travellers - Bartabas - Zingaro  © Hugo MARTY

Après être passé au-dessus des écuries, c’est une ambiance cabaret, rappelant les débuts de l’artiste équin, qui accueille le spectateur. Sur chaque table, quelques boudoirs, des verres, une bouteille contenant une décoction chaude à base de plantes, de miel et de whisky, ont été disposés. Dindes et dindons occupent le milieu de la piste, picorent quelques graines, volètent çà et là indifférent.e.s à ce qui se passe autour. Un forgeron réchauffe l’espace à l’aide d’un feu portatif, dont il ranime régulièrement la flamme. La salle se remplie. L’atmosphère se fait chaleureuse, ouatée. Les lumières se tamisent. Le quatuor de musiciens avec violon, pipe, bodhrán, accordéon et piano accompagne l’entrée de la première cavalière, une jeune qui pleure sa grand-mère. En quelques mots, elle plante le décor, pour éviter à son fantôme d’errer dans les lieux qui lui furent familiers, d’hanter les vivants, sa roulotte doit être brûlée. C’est le début du deuil et de son rituel folklorique. On chante, on boit, on parle shelta, on se souvient des jours heureux. La vie continue. Pas le temps de s’attarder, la troupe de nomades reprend la route, sillonne les plaines de l’île d’émeraude.

Un cabaret fragmenté
Cabaret de l'Exil- Irish Travellers - Bartabas - Zingaro  © Hugo MARTY

Pour évoquer les Irish Travellers, ce peuple libre connu notamment pour être d’excellents cavaliers, Bartabas imagine une fresque kaléidoscopique, un récit fractionné, qui dit peu de leur histoire, mais s’attache à leur donner vie sous les yeux du public. Du « musclor » porteur de tonneaux ou de jeunes filles, à cette voltigeuse qui joue du violon tout en virevoltant sur la croupe d’un magnifique étalon à la robe champagne, en passant par cet homme bouc pavanant devant un troupeau de moutons, tout droit sortie de la fameuse Puck Fair – l’une des plus anciennes foires d’Irlande, qui a lieu chaque année du 10 au 12 août à Killorglin dans le comté de Kerry – à cette mariée de petite taille hissée sur un fier destrier, à son futur époux montant un équidé modèle réduit, c’est tout un monde de tradition qui se dessine par petites touches. Les numéros s’enchainent revisitant les us, les coutumes, suivant des bribes de récits tirés des contes, des histoires que l’on transmet d’une génération à l’autre. Ponctuant de ces chants tristes, imagés, les différents chapitres de ce détonnant cabaret, Thomas McCarthy, traveller lui-même,conjugue les temps pour mieux immerger le public au cœur de cette Irlande rurale, vibrante et captivante. 

De belles fulgurances

S’appuyant sur les présences singulières autant que charismatiques de ses interprètes, Bartabas continue à explorer le monde équin, ces peuples qui ont fait du cheval, un des piliers de leur existences. Il est d’ailleurs frappant de voir comment d’un pays à l’autre, d’une culture à l’autre, des similitudes apparaissent, des échos se font jour. La magie opère à chaque fois. Pousser les portes de Zingaro, reste un événement, un moment suspendu qu’on a plaisir à partager. Souriants, vibrants, habités, les artistes communient avec le public, transmettent valeurs et bonne humeur. Les exploits aériens de Léonardo Montrésor coupent le souffle, mais c’est Perrine Mechekour qui touche au cœur. Souriante, profondément lumineuse, cette comédienne de petite taille est l’âme scintillante de ce cabaret. Chacune de ses apparitions est du pur bonheur. Drôle autant qu’envoûtante, elle a le show dans la peau et fait de cet Irish Travellers, sa spécificité !

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore 

Irish Travellers de Bartabas
Zingaro – Fort d’Aubervilliers
176 avenue Jean Jaurès
93300 Aubervilliers
jusqu’au 31 décembre 2021
Durée 1h45

Une création du Théâtre équestre Zingaro
Scénographie, conception et mise en scène de Bartabas Assisté d’Emmanuelle Santini
avec Thomas McCarthy – Chanteur
Gerry O’Connor (violon), Loic Blejean (Uilleann pipes), Ronan Blejean (accordéon), Jean-Bernard Mondoloni (bodhrán et piano) – Musiciens
Bartabas, Henri Carballido, Sébastien Chanteloup, Michaël Gilbert, Mickaël G. Jouffray (danseur), Manolo Marty (artiste force), Perrine Mechekour, Théo Miler, Bérenger Mirc, Leonardo Montresor (corde volante), Fanny Nevoret, Paco Portero, Bernard Quental, Emmanuelle Santini, Alice Seghier, Cheyenne Vargas, Dakota Vargas, David Weiser – Artistes 
Angelo, Conquête, Corto, Dan, Dicky, Dragon, Famine, Guerre, Guizmo, Homer, Misère, Posada, Raoul, Ted, Totor, Tsar, Ultra, Oberon, Olimpo, Quijo, Schlimak, Zurbarán, la mule et l’âne – cheveaux 
Responsable des écuries – Mickaël Gilbert
Soins aux chevaux – Bérenger Mirc, Sarah Sefraoui, Caroline Viala
Création costumes – Antonio De Jesus
Réalisation Costumes – Lottie Brazier, Antonio De Jesus, Angélique Groseil, Nicolas Maynou
Habilleuse – Isabelle Guillaume
Accessoiriste – Sébastien Puech et Delphine Cerf, assistés de Pierre-Jean Boissard, Juliette Nozière, Samuel Babinet, Adrien Genty
Masque –  Cécile Kretschmar
Charrette Tonneau – Max Barnabé, Erwan Belland
Directeur Technique – Hervé Vincent
Son – Juliette Regnier
Lumières – Clothilde Hoffmann, Léa Mathé
Techniciens plateau – Pierre Léonard Guétal, Julie-Sarah Ligonnière
Technicien de maintenance – Ouali Lahlouh

Crédit Photos © Hugo Marty 

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