Salle des fêtes de Baptiste Amann © Pierre Planchenault

Salle des fêtes, la nouvelle fresque sociétale de Baptiste Amann

Au TnBA, dont il est artiste compagnon, avant une belle tournée à travers la France, Baptiste Amann continue à explorer les relations humaines.

Salle des fêtes de Baptiste Amann © Pierre Planchenault

Au TnBA, dont il est artiste compagnon, Baptiste Amann continue à explorer les relations humaines. Après la famille, il croque avec humour tendre et bienveillante lucidité le microcosme d’un village de campagne. 

Marion est autrice. Il y a cinq ans, son premier roman a été un beau succès de librairie. Depuis, c’est panne sèche. Son inspiration s’est tarie. Paris l’étouffe, l’angoisse. Avec sa compagne Suzanne, tatoueuse, elle cherche, comme beaucoup de parisiens post-confinement, un lieu rural, éloigné du monde citadin, une bâtisse à rénover, un projet à bâtir à deux. Enfin, à trois plus exactement. Samuel, le frère de Marion, fait partie de l’aventure. Atteint de troubles psychiatriques, il ne peut vivre seul. 

Une usine à retaper
Salle des fêtes de Baptiste Amann © Pierre Planchenault

Dans un méandre de fleuve, sur un îlot, une usine à l’abandon retient leur attention. Tout est à refaire, mais c’est ce qui leur plait. Pas le temps de réfléchir, il faut saisir l’affaire. En moins de temps qu’il en faut pour dire ouf, le trio s’installe. Mais très vite, leur propriété devient le centre d’enjeux politiques locaux et écologiques. Convoqués pour un conseil consultatif à la Salle des fêtes du petit village voisin, par le maire du coin, un jeune homme de 25 ans, tout frais, tout beau, tout inexpérimenté, Marion, Suzanne et Samuel, vont devoir tenter de concilier rêves et réalités, se faire adopter par les gens du cru, se confronter aux responsabilités liées à leur acquisition et s’adapter à leur nouvelle vie. 

Une année à huis-clos

En choisissant comme unité de lieu, la salle des fêtes, sorte de nouveau forum plébéien, Baptiste Amann poursuit son travail de tissage, de maillage entre intime et politique, entamer avec Des Territoires. S’attachant à raconter quatre tranches de vie, chacune en lien avec une saison, il esquisse par touches la vie d’un village, fait apparaître en creux les non-dits, les petits secrets, les drames, la solitude des uns, la tristesse des autres, la tendresse aux détours des guerres de clochers, la solidarité derrière les rebuffades, les sarcasmes. En révélant l’attachement de chacun à une terre, à une histoire familiale, aux liens qui les unit les uns aux autres, l’auteur et metteur en scène avignonnais signe une fresque humaine qui sent bon le terroir, l’authenticité d’un microcosme, où il est encore possible d’être vrai. On peut regretter quelques facilités, avoir de petites réserves sur la finalité du propos, mais, et c’est sa grande force, Baptiste Amann a le sens du récit, du rythme, du cadre, d’une mise en scène au cordeau. En conservant, comme à son habitude, à chaque rôle, le prénom de l’acteur, de l’actrice, il facilite l’identification et ainsi nous donne l’illusion d’une réalité, d’une vérité. 

Des partitions ciselées 
Salle des fêtes de Baptiste Amann © Pierre Planchenault

S’inspirant d’une histoire vraie, celle de La Pointerie en Bourgogne, il croque des personnalités, des caractères. De la petite boule de nerfs, gouailleuse au paysan neurasthénique, acculé par les dettes, en passant par le petit notable, l’écolo de service, forcément exalté, la parisienne en goguette, fantasmant la vie rurale, il offre à chaque comédien, chaque comédienne, un bel espace de jeu pour donner corps aux personnages, à leurs émotions contrastées. Mais c’est Samuel Réhault, qui emporte la mise. Loin de son personnage Des Territoires, il campe avec virtuosité le frère psychiatriquement instable. Tour à tour, inquiétant, aimable ou lunaire, il brûle les planches et touche au cœur sans jamais tomber dans la caricature.

Spectacle de transition, s’inscrivant dans la lignée de la trilogie, Salle des Fêtes questionne les grands bouleversements de nos sociétés, du monde rural confrontés à de nouveaux défis, l’écologie, les dérèglements climatiques, invasion de citadins. De que séduire le public bordelais, les spectateurs des rencontres d’automne du Méta, le public exigeant de Théâtre ouvert et les curieux de la nouvelle programmation du théâtre public de Montreuil. 

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Bordeaux 

Salle des fêtes de Baptiste Amann
Salle Vauthier
TnBA
Place Renaudel 
33032 Bordeaux Cedex
Jusqu’au 15 octobre 2022
Durée 2h30

Tournée
les 18 et 19 octobre 2022 au Metà CDN de Poitiers dans le cadre des rencontres d’automne
du 11 au 13 janvier 2023 à La Comédie de Béthune 
du 17 au 29 janvier 2023 à Théâtre Ouvert – Paris 
du 02 au 11 février 2023 au Théâtre Public de Montreuil – CDN 
du 23 au 24 mars 2023 au ZEF, scène nationale de Marseille 
du 04 au 07 avril 2023 à La Comédie de Saint-Etienne 
du 25 au 29 avril 2023 à La Comédie de Saint-Etienne en décentralisation (dans le cadre de la Comédie itinérante)
le 5 mai 2023 à L’Odyssée, scène conventionnée de Périgueux 

Mise en scène de Baptiste Amann
Collaboratrice artistique – Amélie Enon
Avec Olivier Brunhes, Alexandra Castellon, Julien Geffroy, Suzanne Jeanjean, Lisa Kramarz Caroline Menon-Bertheux, Rémi Mesnard, Yohann Pisiou, Samuel Réhault & Marion Verstraeten
Création lumière de Florent Jacob
Création sonore de Léon Blomme
Scénographie de Baptiste Amann et Florent Jacob
Costumes de Suzanne Aubert et Estelle Couturier-Chatellain

Crédit photos © Pierre Planchenault

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