Alarm clocks de Robyn Orlin. Camille. Biennale de la danse et les nuits de fourvière © Mehdi Benkler

Robyn Orlin et Camille donnent le coup de semonce des festivités lyonnaises

Au cœur du théâtre antique de Fourvière, Robyn Orlin et Camille ouvrent le bal des Nuits de Fourvière et la Biennale de la danse.

Au cœur du théâtre antique, sur la colline de Fourvière, la chorégraphe sud-africaine et la chanteuse française ouvrent le bal de deux grands événements culturels lyonnais de ce printemps 2021, les Nuits de Fourvière et la Biennale de la danse. Avec Alarm Clocks, les deux artistes signent une performance ovniesque en forme de manifeste écologique délirant et joyeux. 

Un vent frais souffle sur les pierres noires de l’ancien amphithéâtre. La pluie qui s’est abattue dans la matinée n’a laissé que peu de traces. En rangs éparpillés pour respecter les règles sanitaires, le public – quelques 1000 spectateurs, pour respecter la jauge des 35 %, ont pris place – est là pour cette seconde représentation d’Alarm Clock, un spectacle synergétique entre Robyn Orlin en coulisses et Camille sur scène. Sous les masques qui mangent les visages, les sourires se devinent, les yeux pétillent. 

Un spectacle remanié à cause …
Alarm clocks de Robyn Orlin. Camille. Biennale de la danse et les nuits de fourvière  © Mehdi Benkler

Sur l’immense estrade vide, montée spécialement pour les Nuits de Fourvière, un pathwork de tissus bleus sert d’unique décor. Pensée avant la pandémie, cette performance a souffert des restrictions sanitaires. Aux côtés de la chanteuse, aurait dû se tenir le chœur sud-africain, les Phuphuma Love Minus. Malheureusement empêchés de voyager, ils ne seront pas là ce soir, en tout cas, pas en présence. Mais indéniablement partie prenante du spectacle, ils ouvrent et clôturent le récital à travers deux chants entraînants, envoûtants sur l’écran géant, qui sert de fond de scène. Ils sont aussi dans chaque pensée de l’artiste française. Ils hantent le plateau, soulignent le message subliminal, l’urgence d’agir face aux dangers écologiques qui menacent notre planète. 

Chants climatiques 

Cheveux hirsutes, mal coiffée, vêtue d’une sorte de combinaison noire à pois dorés, Camille semble sortir de son lit. Incrédule devant le nombre de paires d’yeux qui la regardent, elle repart aussitôt en coulisses. Si ce n’était qu’un rêve, un cauchemar, mais non les appels du public, les applaudissements, la rattrapent, la rappellent à la réalité. Espiègle, taquine, elle questionne, interroge les directives de la chorégraphe, ses choix artistiques qui font de cette pièce chorégraphique, une œuvre sans danse. Mettant en abyme avec une légèreté déconcertante, la pénurie d’eau, le monde tout plastique, même recyclé, les catastrophes naturelles qui s’enchaînent elle s’amuse certes mais ébranle en profondeur nos choix consuméristes, nos modes de vie occidentale. Il ne s’agit pas ici de dénoncer, de stigmatiser, d’invectiver, mais bien de réveiller, en douceur, avec humour, nos consciences, à les élever, à changer nos habitudes.

Une artiste à fleur de peau, de mots 
Alarm clocks de Robyn Orlin. Camille. Biennale de la Danse et Nuits de fourvière © Jérôme Seron

Entremêlant paroles à l’emporte-pièce, réflexions sur la vie, la situation actuelle du monde sans jamais évoquer le virus qui le ronge et chants a cappella tous axés sur l’eau, l’artiste habite le plateau, envahit l’espace. Son grain de voix, sensible, joliment grave, sensuellement perché, attrape, saisit, ensorcèle. Prêtresse écologique, enrubannée, entortillée dans une immense robe de tissus rapiécés, allant du Sac poubelle à de vieux anoraks, de bouts de robes en synthétique, de chemises en acrylique, etc., heureuse de retrouver les planches, le public, elle se donne à mille pour cent. Électrique, vibrante, humaine, elle dévoile par touches, par bribes son incandescente présente et irrésistible capacité à embraser une foule. 

Un spectacle joyeux

Véritable plaidoyer écologique, Alarm Clocks est avant tout une performance faite de petits riens, de bons mots, d’amour et d’émotions. Bien sûr, on aurait aimé voir les Phuphuma Love Minus sur scène, voir ce que cela aurait pu donner si la covid n’en avait pas décidé autrement, mais pour des retrouvailles, ce show joyeux, un peu foutraque, léger, empreint de gravité, fait un bien fou. Ouvrant sur de beaux présages, La Biennale de la danse et les Nuits de Fourvière, le spectacle de ces artistes décalées, délirantes est le premier d’un partenariat complice entre les deux structures. Les 9 et 10 juillet, Josef Nadj proposera sur la colline de Fourvière Omma, avant de céder la place les 13 et 14 juin à l’explosif et transcendantal Room with a view, né de la collaboration entre le compositeur électro Rone, et le ballet national de Marseille dirigé par Le collectif (LA) HORDE. De bons moments, à partager, en perspective. Après le confinement, il est temps de danser, de vibrer, de se laisser porter par un art vivant plus que réconfortant, ragaillardissant.

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Lyon

Alarm clocks are replaced by floods and we awake with our unwashed eyes in our hands … a piece about water without water de Camille et Robyn Orlin
Théâtre antique
Les 1er et 2 juin 2021
La Biennale de la danse 
Les nuits de Fourvière
Durée 1h00

Direction artistique de Robyn Orlin
Musique de Camille
Scénographie de Robyn Orlin
Costumes de Birgit Neppl

Crédit photos © Mehdi Benkler et © Jérôme Seron

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