Brontis Jodorowsky, un Gorille épatant

Ce petit bijou nous avait émerveillés à sa création au lucernaire en 2010 et à nouveau enchanté en 2011 à sa reprise au Petit Montparnasse. Neuf ans après, Brontis Jodorowsky reprend son grand succès Le Gorille, tiré d’une nouvelle de Kafka, adapté et mis en scène par son père Alejandro Jodorowsky. On ne peut que s’en réjouir. L’homme descend du singe, soit, mais est-ce que ce dernier peut devenir un homme ? C’est ce qu’a décidé ce pauvre gorille après sa capture dans sa forêt africaine. Comprenant que s’il veut échapper à la captivité, éviter d’être exposer dans un zoo comme

Ce petit bijou nous avait émerveillés à sa création au lucernaire en 2010 et à nouveau enchanté en 2011 à sa reprise au Petit Montparnasse. Neuf ans après, Brontis Jodorowsky reprend son grand succès Le Gorille, tiré d’une nouvelle de Kafka, adapté et mis en scène par son père Alejandro Jodorowsky. On ne peut que s’en réjouir.

L’homme descend du singe, soit, mais est-ce que ce dernier peut devenir un homme ? C’est ce qu’a décidé ce pauvre gorille après sa capture dans sa forêt africaine. Comprenant que s’il veut échapper à la captivité, éviter d’être exposer dans un zoo comme une bête de foire, l’animal doit se faire humain. Au prix d’immenses efforts, à force d’observation et beaucoup d’intelligence, il va imiter les hommes, leurs démarches, leurs attitudes. Et le plus surprenant, il finit par parler et, l’inconcevable, penser. Ce qui va faire de lui une immense vedette de music-hall. Une autre bête de foire, en somme.

Sa surprenante transformation et son talent, l’amène à donner une conférence devant les sommités que sont les Académiciens. Chapeau haut-de-forme, portant le frac avec élégance, il se penche sur son passé, sur son apprentissage de sa liberté et dire à tous combien la vie humaine est absurde.

Kafka parle d’une métamorphose, celle d’un animal en être humain. Il souligne, dans ce texte magistral et souvent drôle, toute l’inhumanité qui réside dans l’être humain et dans cette société moderne qu’il ne cesse de réinventer. L’adaptation d’Alejandro Jodorowsky, dans laquelle il a distillé de subtile référence à notre monde actuel, est d’une belle acuité. Il est question d’intégration. Ce Gorille, sorte de migrant malgré lui, décide d’être comme « nous ». Mais peut-on renier ses origines ? Et de cette conscience acquise que va-t-il en faire ? Qu’est-ce qu’un humain ? Qui est le plus libre ?

Pour incarner ce gorille devenu homme, il faut un grand talent. Le comédien ne doit pas imiter mais vraiment incarner cette transformation. Il ne faut pas singer le singe ! Brontis Jodorowsky est extraordinaire. Quel acteur ! Restant toujours crédible, maîtrisant la gestuelle simiesque, il compose un être hybride, à la fois sauvage et éduqué. Il s’agite, comme un primate maladroit, puis nous jette un regard plein de malice dans lequel finit par pointer une lueur de tristesse. C’est magnifique à observer. A l’instar de son personnage, le comédien est une bête de scène. A voir de toute urgence.

Marie-Céline Nivière


Le Gorille d’après Franz Kafka
Lucernaire
53 rue Notre Dame des Champs
75006 Paris
Jusqu’au 3 novembre.
Du mardi au samedi à 21h, dimanche 18h
Durée 1h10 


Texte et mise en scène d’Alejandro Jodorowsky assisté de Nina Savary
Avec Brontis Jodorowsky
Lumière d’Arnaud Jung et Jean-Michel Bauer
Costume d’Elisabeth de Sauverzac
Prothèse de Sylvie Vanhalle

Crédit photos © Adrien Lecouturier

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