Louis Arene. Munstrum. Paris L'été. © Fabrice Robin

Les clowns de Louis Arene

Dans le cadre du Festival Paris l’été, le Munstrum de Louis Arene et Lionel Lingelser présente Clownstrum, une aventure burlesque.

Dans le cadre du Festival Paris l’été, le Munstrum de Louis Arene et Lionel Lingelser prend possession d’une cour du lycée Jacques-Decour et invitent le public à basculer dans une dimension post-apocalyptique dans laquelle seuls quelques clowns ont survécu. Tragicomédie loufoque, Clownstrum est une aventure burlesque entre rires et larmes. 

Comment l’idée de Clownstrum est-elle née ? 

Louis Arene : Avec Lionel (Lingelser), qui codirige avec moi la compagnie, on met beaucoup de temps à monter nos différents projets. Il faut penser à la production, souvent lourde financièrement, à la conception, aux costumes, aux accessoires, réunir une troupe. Tout cela est très chronophage. Par ailleurs, nous avions l’envie d’un objet un peu différent de ce que l’on fait d’habitude et qui puisse parler à d’autres publics. L’idée était en gestation quand Frédéric Remy, directeur du festival des arts de la rue de Mulhouse et aussi maintenant de celui d’Aurillac, nous a proposés d’imaginer, en partenariat avec la Filature où il avait vu nos précédents spectacles, un objet théâtral qui pourrait rentrer dans sa programmation. En nous donnant l’opportunité d’une carte blanche, il a réveillé notre désir d’explorer un peu plus encore la forme clownesque. Le nez de clown est à mon sens le plus petit masque qui puisse exister. On continue donc d’explorer cet objet qui nous est cher mais avec une approche nouvelle et décalée et un pont de vue résolument burlesque.

Que raconte cette courte pièce ? 
Clownstrum du Monstrum. Louis Arene. Paris l'été. © Darek Szuster

Louis Arene : Avant tout, nous avons cherché un lieu dans la ville qui nous inspirait. En déambulant, nous avons découvert un endroit singulier sous la dalle du marché à Mulhouse, un long couloir bétonné, qui avait quelque chose d’un peu post-apocalyptique. On avait l’impression d’être chez …. C’est vraiment cet espace cendreux, poussiéreux, qui a fait remonter à la surface toutes nos obsessions sur les mondes d’après, sur les projections poétiques après qu’une ait ravagé l’humanité. De là est venu l’idée de raconter l’histoire de trois clowns qui auraient survécu à un désastre et que je joue avec Delphine (Cottu) et Sophie (Botte), qui sont aussi de l’aventure 40° sous Zéro. Ensuite, Nous nous sommes interrogés sur la manière dont ils allaient s’accaparer ce monde en ruine. Vont-ils essayer de rebâtir une nouvelle civilisation ? Ou ne rien faire et attendre la fin ? Le clown nous permet de créer des lignes de tension très fortes entre naïveté et monstruosité. Il n’est pas là simplement pour faire rire. Sa tâche est plus noble que de juste amuser. 

Comment avez-vous travaillé ?

Louis Arene : Très vite, nous avons décidé de nous confronter au plateau. Avec les comédiennes, Lionel et François de Brauer, notre collaborateur artistique sur ce projet, nous avons éprouvé les personnages en situation. Nous avons laissé libre cours à l’imagination de chacun et fait pas mal d’improvisations durant plus de trois semaines. A partir de ces matières riches et denses que nous avons filmées, nous avons commencé à mettre en forme la pièce, à imaginer un synopsis, puis à écrire la pièce. Tout ça est très organique. François est plus sur la structure, sur l’architecture globale, c’est son principal point fort. Avec lui, je peaufine les dialogues. Il y a avec lui une facilité à faire du ping-pong de répliques. Quant à Lionel, c’est plus le rythme et la situation comique qui l’intéresse et qui sont sa grande force. Chacun ainsi apporte sa pierre à l’édifice. C’est un vrai travail commun, une aventure humaine. Comme, par ailleurs, l’objet s’appuie surtout sur le jeu, il était important pour nous que Sophie et Delphine, soient là tout le long du processus. Leur intuition et leurs désirs de jeu guident la trame de l’histoire, la dramaturgie. 

Vos spectacles sont énormément sur la transformation physique des personnages via des masques, des prothèses. Comment se passe le processus créatif ? 
Clownstrum du Monstrum. Louis Arene. Paris l'été. © Darek Szuster

Louis Arene : Dès le départ sur Clonwstrum, comme je l’ai évoqué plus haut, il y avait l’idées des clowns et d’un monde dévasté. Je suis donc parti de ce point de départ avec une image en tête d’un espace gris, terne dont le seul élément de couleur sont les trois nez rouges, comme trois points de suspension sanglants… Partout où l’on joue, on habite le lieu, on lui donne un aspect cendreux. Clairement, nous nous sommes inspirés de May B de Maguy Marin, un spectacle qui nous avons tous beaucoup regardé pendant les répétitions. C’est assez simple comme scénographie, assez brut , mais ça crée une unité entre la scène et le jeu, qu’il nous intéressait d’explorer. Nous nous sommes aussi beaucoup nourris de vidéos de clowns, des spectacles de James Thiérrée, de l’univers des Monty Python mais aussi des oeuves d’Edward Bond et Samuel Beckett

Vous êtes programmé dans la forme courte du Festival Paris l’été. Comment s’est faite la rencontre ? 

Louis Arene : Depuis trois ans, le Monfort théâtre, dirigé par Laurence de Magalhaes et Stéphane Ricordel, qui sont aussi à la tête de Paris l’été, accueille nos créations. Ils suivent notre travail, sont sensibles à notre esthétique et à notre humour. Ils cherchaient pour leur programmation des spectacles tout public, jouables en extérieur. De notre côté, nous avions Clownstrum créé en 2018, mais qui depuis le début est un peu maudit. Il a été victime d’annulations indépendantes de notre volonté. Ce qui a, chez nous, fait naître une sorte de frustration. Du coup, quand ils nous ont parlé de leur idée de finalement maintenir Paris l’été, on leur a envoyé une captation du spectacle, qui les a séduits. Ils nous ont donc proposé de rejoindre l’aventure. 

Où Allez-vous le jouer ?

Louis Arene :  Dans une cour du lycée Jacques-Decour, que nous allons devoir réaménager, habiter et salir un peu pour lui donner un aspect plus brut. 

Avez-vous d’autres projets en cours ? 

Louis Arene :  Avec Lionel et Kevin Keiss, nous travaillons actuellement à l’écriture du prochain gros spectacle du Munstrum, intitulé Zypher Z. Ce sera une « zoo-robot-dystopie », une fiction quelque peu futuriste où un homme se dédouble en une incarnation de lui-même qui représente toutes les pulsions qu’il a refoulées. Lui va vivre une descente aux enfers, alors que son négatif va être propulsé vers les hautes sphères du pouvoir. Ce sera bien sûr très visuel et esthétiquement très ambitieux. Je vais collaborer pour les masques, les marionnettes et les prothèses avec Carole Lallemant, qui travaille énormément avec Valérie Lesort et Christian Hecq. J’ai eu la chance de la rencontrer au Français, lorsqu’on a monté vingt mille lieues sous les mers. La création se fera en novembre 2021 à La Filature à Mulhouse, puis tournera notamment au Monfort théâtre et au Quai à Angers qui nous coproduit.

Entretien Olivier Frégaville-Gratian d’Amore

Clownstrum du Munstrum
Festival Paris l’été
Lycée Jacques-Decour en extérieur
12, avenue Trudaine
75009 Paris
Dimanche 2 août 2020 à 15h30 et 19h00
Durée 50 minutes
Gratuit sur réservation

Conception et interprétation de Louis Arene, Sophie Botte et Delphine Cottu
Mise en scène de Louis Arene et Lionel Lingelser
Collaboration artistique de François De Brauer
Création nez, costumes, maquillages de Louis Arene

Crédit portrait © Fabrice Robin et crédit photos © Darek Szuster

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