Couv_Tintoret_72dpi_Judith et Holopherne_© Museo Nacional del Prado, dist- Rmn-GP _ image du Prado_@loeildoliv

Le jeune Tintoret donne mouvement et couleurs au Luxembourg

Au Musée du Luxembourg, une exposition met en lumières les œuvres de jeunesse du Tintoret.

Les ocres, les carmins, les bleu roi, des robes, des tuniques, virevoltent sous les ors du Luxembourg et donnent vie à différents épisodes bibliques, sujets de prédilection du jeune Tintoret. En consacrant une exposition aux vingt premières années de l’artiste vénitien, le musée, qui jouxte le Sénat, propose un voyage au cœur de la genèse créative d’un génie, un peintre du mouvement. Puissant !

Deux yeux clairs observent, avec curiosité, les spectateurs qui pénètrent dans la salle d’exposition. Ce sont ceux de Jacopo Robusti, dit Tintoretto. Quoi de mieux qu’un autoportrait datant de 1547 pour entrer dans le vif de cette rétrospective consacrée aux œuvres de jeunesse du maître italien ? Sur un fond sombre, presque noir, le visage du presque trentenaire, encadré par les boucles brunes de ses cheveux et de sa barbe, se détache, lumineux, inquiet. Il invite au voyage dans son univers créatif.

Tintoret_72dpi_Adoration des mages_© Museo Nacional del Prado, dist_ Rmn-GP _ image du Prado_@loeildoliv
L’Adoration des mages,
vers 1537-1538, huile sur toile (174 x 203 cm),
Madrid, Museo Nacional del Prado
© Museo Nacional del Prado, dist. Rmn-GP / image du Prado

Couleurs étincelantes, visages vaporeux, les personnages bibliques habitent les grands formats, qui ont fait la marque de fabrique du peintre vénitien. Rappelant les œuvres du Titien, les premiers tableaux de celui qui n’est pas encore le Tintoret, tel l’Adoration des mages exécuté en 1537, à l’âge de 18 ans, souligne déjà la virtuosité de l’artiste. Le trait est sûr, le jeu des lumières puissant, particulièrement travaillé. Cassant les codes, maîtrisant parfaitement les perspectives, rêvant de renouveler l’art pictural de la sérénissime, il décentre son sujet principal, l’éloigne du point de mire pour forcer le regard à étreindre la toile dans sa totalité avant d’en étudier tous les détails savamment mis en valeur. Passionné des effets de lumière, le jeune homme joue des clairs-obscurs pour mieux nous amener à plonger dans ses œuvres souvent sculpturales et complexes.

Au fil des tableaux, les influences des maniéristes, tel Véronèse ou Bonifacio de’ Pitati, dont il a été l’élève, et qui ont fait les beaux jours et la réputation de l’école vénitienne, s’estompent, le trait et le style s’affirment. S’appuyant sur une géométrie parfaite des éléments de décor, Le Tintoret peuple avec profusion ses tableaux d’une foule de personnages, dont chacun à son importance pour donner l’équilibre, la beauté à l’ensemble. Ainsi, dans Salomon et la reine de Saba, les gardes de l’un répondent aux servantes de l’autre, que ce soit par les regards, ou les couleurs des étoffes.

Tintoret_72dpi_Judith et Holopherne_© Museo Nacional del Prado, dist- Rmn-GP _ image du Prado_@loeildoliv
Judith dans la tente d’Holopherne, vers 1554-1555, huile sur toile (58 x 119 cm),
Madrid, Museo Nacional del Prado
© Museo Nacional del Prado, dist. Rmn-GP / image du Prado

Si certains de ses tableaux rappellent aussi quelques toiles du Greco, en à peine 20 ans, Le Tintoret a su imposer son travail et devenir un artiste incontournable de la Venise du XVIIe siècle, ses œuvres s’accrochant aux cimaises des églises, des plus importantes confréries religieuses et des somptueux palais des patriciens de la Sérénissime. C’est cette ascension fulgurante, cette maîtrise qui s’affine toile après toile, que le commissaire de l’exposition du Musée du Luxembourg, Roland Krischel, conservateur en charge de la Peinture médiévale au Wallraf-Richartz Museum & Fondation Corboud, basé à Cologne, a souhaité mettre à l’honneur pour célébrer dignement le cinq centième anniversaire de celui que l’on nomma le petit teinturier, en référence au métier qu’exerçait son père. Et c’est parfaitement réussi. Alors, n’hésitez pas à pousser les monumentales portes en bronze réalisées par le sculpteur Cecco Bonanotte et à vous laisser emporter dans un voyage pictural passionnant à deux pas du Grand Canal et de la Lagune.

Par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore


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Tintoret, naissance d’un génie
Musée du Luxembourg – RMN
19 Rue de Vaugirard
75006 Paris
Du 7 mars au 1er juillet 2018 – ouverture tous les jours du lundi au jeudi de 10h30 à 18h
vendredi, samedi, dimanche et jours fériés de 10h30 à 19h
tarif : 13 euros

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