Sylvain Maurice © Tazzio Paris

Sylvain Maurice : « Le narcissisme des tyrans est une donnée qui traverse l’histoire »

Le metteur en scène est l'invité du Théâtre du Peuple de Bussang, où il présente tout l'été une nouvelle création, Le Roi Nu d'après Evgueni Schwartz.
23 juillet 2025
Comment votre choix s’est-il porté sur Le Roi nu, pour ce premier été que vous passez comme metteur en scène invité à Bussang ?

Sylvain Maurice : C’est une pièce que j’adore ! Il était évident pour moi que j’allais la proposer à Julie Dellile, la directrice du Théâtre du Peuple. Le Roi nu, c’est un texte inspiré des contes d’Andersen. Il a été écrit au moment de la montée des périls et des tyrans et met en scène un roi tyrannique qui, désireux d’avoir de beaux vêtements, se fait duper par des tisserands du royaume. Ceux-là lui font croire qu’il portera une étoffe superbe et visible seulement des personnes les plus intelligentes.

© Vincent Zolber

Sauf qu’évidemment, le roi est nu, et cette nudité va pousser le peuple à se révolter. L’auteur de ce texte, Evgueni Schwartz, use avec talent de l’humour pour démonter ce système de la tyrannie. D’une certaine manière, il parvient à en montrer la part terrible.

Et vous pensez que ce texte fait écho à ce que l’on peut lire, ces temps-ci, dans les journaux

Sylvain Maurice : Je ne suis pas historien, je n’ai donc pas la légitimité de vous dire que nous revivons les années 1930. En tous cas, ce roi rappelle beaucoup certaines figures contemporaines. Le narcissisme des tyrans est une donnée qui traverse l’histoire. C’est ce qui rend cette fable aussi actuelle. Et puis, il y a dans le texte une drôlerie qui permet de jouer sur deux niveaux. D’un côté la comédie, de l’autre la dimension profonde de la fable. C’est ce cocktail qui en fait un spectacle profondément populaire et accessible. C’est sans doute aussi cette donnée qui m’a poussé à le monter à Bussang, où l’on milite depuis toujours en faveur d’un théâtre populaire.

Adhériez-vous au projet du Théâtre du Peuple, avant d’y être invité ?

Sylvain Maurice : J’y adhère à tout point de vue : la place donnée aux amateurs, la perspective d’exigence, le partage, l’idée de communauté… On y est un peu comme dans un phalanstère, où l’on cherche à fédérer pour créer un langage commun.

Est-ce différent de jouer avec des comédiens amateurs ?
© Vincent Zobler

Sylvain Maurice : Non, ça ne change rien. Évidemment, les acteurs professionnels tirent le groupe en avant. Ils partagent aux autres leur expérience et le plaisir artistique du jeu. Mais, à force, on ne fait plus la différence entre amateur et pro. Les amateurs apportent leur propre singularité et leur poésie à la proposition. Je n’ai pas essayé d’en faire des professionnels, ils n’ont pas besoin de l’être. Ce qui compte, c’est d’adhérer pleinement au projet. D’avoir envie de s’investir dans cette pièce qui touche tout le monde, et de croire en la nécessité, en ce moment, de pouvoir rire de choses inquiétantes qui régissent notre monde actuel.


Le Roi nu, d’après Evgueni Schwartz
Au Théâtre du Peuple de Bussang
Du 19 juillet au 30 août 2025
Durée 3h.

Texte Evgueni Schwartz 
Traduction André Markowicz
Mise en scène et scénographie Sylvain Maurice
Avec Nadine Berland, Maël Besnard, Mikaël-Don Giancarli, Manuel Le Lièvre, Hélène Rimenaid, les comédien·nes amateurices de la troupe 2025 du Théâtre du Peuple : Michèle Adam, Flavie Aubert, Astrid Beltzung, Jacques Courtot, Hugues Dutrannois, Betül Eksi, Éric Hanicotte, Igor Igrok, Fabien Médina, Denis Vemclefs, Vincent Konik
et les musiciens Laurent Grais et Dayan Korolic

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