Débris, Julie Teuf © Pierre Planchenault
© Pierre Planchenault

Débris, bazar organisé pour enfances brisées

En adaptant Débris de Dennis Kelly, Julie Teuf déploie son plateau comme une grande boîte à jouets pour accueillir le malheureux destin de deux orphelins.

C’est d’un conte triste, d’une épopée écorchée que s’empare Julie Teuf, accompagnée par Fred Egginton, son complice du CaBaret GraBuge. Créé au TnBA, où la comédienne et metteuse en scène est artiste associée, Débris commence avec une crucifixion, celle du père de Michelle et Michael, les deux héros malheureux de la pièce. SUICIFIXION, peut-on lire à la craie blanche sur le fond de scène. En frontispice du récit, ce blasphème annonce une chose : Dieu est mort. Il faudra donc ajouter, au tableau des malheurs de cette famille abandonnée par les cieux, la mort de la mère ou l’adoption par un oncle abusif.

Comme son titre le suggère, il s’agit là d’une pièce d’après la catastrophe, un théâtre de pots cassés tentant de se réparer en faisant le récit d’une vie en lambeaux. Mais aussi sombre et violent soit-il, le chemin de Michelle et Michael est guidé tout du long par une petite lumière, celle de l’innocence et de la candeur. Celles-ci rejaillissent dans le jeu, juvénile mais sans caricature, des deux comédiens (Anthony Rzeznicki et la metteuse en scène elle-même), lesquels évoluent dans un plateau déployé à la fois comme une boîte à jouets et un espace mental, où se balade une sorte d’ami imaginaire à tête de gorille (Fred Egginton), et où une sculpture à la Nam June Paik en forme de croix géante finira par se laisser démanteler.

Sous le regard de Julie Teuf et dans le sens du texte voulu par son auteur Dennis Kelly, le spectacle se fait célébration déglinguée, chargée de tristesse mais nourrie d’une énergie vitale, vouée à déborder dans tous les sens. Le soir de la première, la mise en scène méritait encore de se roder et de gagner en puissance, car seule une vibration extrême peut conjurer la malédiction qui se joue. En son absence, c’est une légère complaisance dans la tonalité cynique qui menace de prendre le dessus. Mais l’affaire devrait être vite réglée : il ne fait aucun doute que les artistes veillent avec amour sur ces destins brisés.


Débris de Dennis Kelly
TNBA
3 Place Pierre Renaudel, 33000 Bordeaux

Du 23 au 27 janvier 2024
Durée 1h30

Texte de Dennis Kelly
Un spectacle du CaBaret GraBuge 
Mise en scène Julie Teuf, artiste compagnonne
Co-mise en scène et direction d’acteur·ices Fred Egginton
Scénographie Alexandrine Rollin
Construction et Machinerie Alexandrine Rollin, Cyril Muller, Loïc Férié
Création des costumes Estelle Couturier Chatellain
Création lumière Jérôme Bertin
Création sonore Romain Mater et Maxime Poirion

Avec Fred Egginton, Anthony Rzeznicki et Julie Teuf

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