L'effet miroir de Léonore Confino, mise en scène de Julien Boisselier © Fabienne Rappeneau

L’effet Miroir, une irrésistible comédie douce-amère signée Léonore Confino 

Au Théâtre de l’Œuvre, Julien Boisselier s’empare avec une gourmandise frénétique de la nouvelle pièce de Léonore Confino, L’Effet miroir.

L'effet miroir de Léonore Confino, mise en scène de Julien Boisselier © Fabienne Rappeneau

Au Théâtre de l’Œuvre, Julien Boisselier s’empare avec une gourmandise frénétique de la nouvelle pièce de Léonore Confino, L’Effet miroir. Surlignant l’absurdité des relations humaines et les travers délirants de notre inconscient, il fait feu de tout bois et signe un spectacle haut en couleur. Un petit bijou d’humour noir ! 

© Fabienne Rappeneau

Dans un salon bourgeois, baigné d’une lumière diffuse, un homme se tient de dos face à un immense miroir. Veste d’intérieur très chic, jogging vert, il semble se perdre dans son propre reflet. Arraché à ses pensées par sa virevoltante épouse, prise d’une frénésie de rangement, l’air hirsute, il suit les mouvements énervés de cette dernière, comme si le quotidien ne le concernait pas. Entre eux, l’atmosphère refroidit à vue d’œil. Oisif, Théophile (excellent François Vincentelli), auteur à succès, n’a rien écrit depuis cinq ans faute d’inspiration. Excédée, sa pétulante femme (détonante Caroline Anglade), gestionnaire de métier, s’occupe de faire bouillir la marmite et de survenir aux besoins du couple et de ses jumelles. Mais trop c’est trop. Il est temps que tout change. 

L'effet miroir de Léonore Confino, mise en scène de Julien Boisselier © Fabienne Rappeneau
© Fabienne Rappeneau

Rêvant de s’éloigner de l’image de romancier à l’eau de rose, Théophile s’attèle à la rédaction d’un petit conte philosophique pour enfants, où un petit bigorneau orphelin, ayant perdu sa coquille, cherche un sens à sa vie en parcourant les fonds marins. Rencontrant au cours de son périple différentes créatures, dont un oursin stérile, une sirène nymphomane et une crevette frustrée, il s’émancipe de ses préjugés, se libère de ses doutes et trouve enfin sa voie. Loin d’imaginer l’impact que vont avoir ses écrits sur sa vie et celles de ses proches, l’auteur semble soulager d’un poids, prêt à en découdre à nouveau avec l’existence. 

À l’image de l’effet miroir, où chacun voit dans son reflet ce que son inconscient dit de soi-même, femme, frère et belle-sœur vont s’identifier peu ou prou aux différents personnages qui peuplent cette fable enfantine, engendrant un déluge de quiproquos loufoques autant surréalistes. Les uns après les autres, chaque membre de cette famille disparate va déverser son sac, mettre à nu ses angoisses et dire tout ce qu’il a sur le cœur, adultère, dépression et autres petites entorses au contrat nuptial.

L'effet miroir de Léonore Confino, mise en scène de Julien Boisselier © Fabienne Rappeneau
© Fabienne Rappeneau

Plume acérée, enlevée, Léonore Confino croque une galerie de personnages particulièrement ciselés, bigarrés et pittoresques, allant du poète maudit à l’épouse au bord de la crise de nerf, en passant par le frère neurasthénique et la belle-sœur cynique. Sans jamais tomber dans la caricature, Julien Boisselier s’empare avec subtilité de cette matière hautement tragicomique et signe un spectacle tout en émotions contrastées. Drôle autant que touchante, cette fable contemporaine est des plus savoureuses. Il suffit de se laisser emporter par ce tourbillon de répliques cinglantes, de situations ubuesques et d’histoires de famille sommes toutes assez banales.  

Au service du texte et de la mise en scène, les comédiens et comédiennes s’en donnent à cœur joie et libère au plateau tout leur potentiel comique. En cousine de la famille Addams, Jeanne Arenes est tout simplement divine. Face à elle, Éric Laugérias est épatant en mari attentionné, totalement dépassé et déprimé. En épouse modèle un brin agité du bocal, Caroline Anglade est survoltée à souhait. Ce quatuor d’artistes serait bancal sans la présence flegmatique et charismatique du quatrième larron, l’inénarrable François Vincentelli. Se glissant avec gourmandise dans le rôle de l’auteur incompris, il est tout simplement fantastique. 

Prenant plaisir à jouer avec les petits travers de la nature humaine, cet Effet miroir est une belle découverte, certainement l’une des meilleures pièces de cet automne. Une réussite sur toute la ligne, à voir absolument !


L’effet miroir de Léonore Confino
Théâtre de l’Œuvre
55 rue de Clichy
75009 Paris
Jusqu’au 13 janvier 2024
Durée 1h40

Mise en scène par Julien Boisselier assisté de Clotilde Danault
Avec Caroline Anglade, François Vincentelli, Eric Laugérias, Jeanne Arènes
Décors de Jean Haas
Lumières de Jean-Pascal Pracht
Costumes de Sandrine Bernard
Musique de Pierre Tirmont

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