Une situation délicated'Alan Ayckbourn © Bernard Richebé

Darmon et Courau se déchainent dans Une situation délicate

Au théâtre des Nouveautés, Ladislas Chollat met en scène le duo explosif Darmon-Courau, dans Une situation délicate de l'Anglais Alan Ayckbourn.

Dans Une situation délicate, comédie du dramaturge anglais Alan Ayckbourn, mise en scène par Ladislas Chollat, entourée brillamment par Gérard Darmon, Elodie Navarre et Max Boublil, sur le plateau du théâtre des Nouveautés, Clotilde Courau se révèle en reine du Boulevard.

Il ne faut jamais bouder son plaisir devant une pièce de boulevard lorsqu’elle est de qualité. Ce genre théâtral est difficile, car tout comme le vaudeville, il ne supporte pas la médiocrité. Alan Ayckbourn est en Angleterre, un maître du genre. Il est dit dans sa biographie, qu’il est même le dramaturge anglais le plus joué après Shakespeare, of course. Avec style et humour, il aborde dans presque toutes ses pièces, un sujet qui lui est cher : le couple. Cette œuvre ne déroge pas à la règle. Nous y retrouvons l’éternel trio du mari, la femme et la maîtresse. Son titre original est Relatively speaking. Chez nous, c’est devenu Une situation délicate. Ce qui est assez parlant, non ? Soulignons, parce que son travail est toujours remarquable, l’excellente adaptation de Gérald Sibleyras.

Un cocktail bien dosé

Une situation délicate d'Alan Ayckbourn ©Bernard Richebé

Alors que se passe-t-il dans cette histoire d’adultère ? Julie est une jeune femme assez libre qui a un amant plus vieux qu’elle, Philippe. Ce dernier a une femme, Marianne. Normalement la maîtresse et l’épouse n’ont aucune raison de se croiser. Mais voilà, Julie, qui veut rompre parce qu’elle aime le jeune Nicolas, décide d’aller reprendre à Philippe ses clefs, ainsi que des photos. Elle décide de se rendre chez lui à la campagne. Pour expliquer à son fiancé son absence en ce beau dimanche, elle raconte qu’elle va déjeuner chez ses parents. Curieux, il va la devancer et se pointer chez Philippe et Marianne. C’est la situation de départ, qui, évidemment, va engendrer toute une série de quiproquos, d’incompréhensions, de malentendus et de rebondissements. Qui sont, comme on le sait, les ingrédients nécessaires à une bonne comédie. Ici, ils sont à la fête et nous aussi.

Un divertissement divertissant

Si la pièce met un peu de temps à s’installer, car il faut mettre en place l’intrigue, elle trouve vite son rythme et nous entraîne dans un tourbillon. Les rires fusent alors dans la salle. Avec savoir-faire, Ladislas Chollat a mené rondement cette comédie qui a pour but de divertir. L’objectif est atteint, et quel que soit l’âge, les spectateurs se régalent. Avec le décor et les costumes, le metteur en scène inscrit volontairement et avec goût le spectacle dans la lignée des grandes soirées d’Au théâtre ce soir ! Un jeune couple installé à mes côtés espérait même entendre après la sonnette, les fameux trois coups. Il n’a eu droit qu’à l’annonce pour les portables. Autre temps, autre tradition !

Jeux, set et match

Une situation délicate d'Alan Ayckbourn © Bernard Richebé

Ce sont les comédiens qui font battre le cœur d’une comédie. Possédant le sens de la réplique, du rythme et de la rupture, ils s’envoient, tels  des tennismen chevronnés, des échanges, s’accordant des effets afin de relancer l’action. Il ne faut donc pas manquer son coup, sinon, l’ennui  peut vite s’installer dans la salle. Chollat a su placer ses joueurs pour que répliques et situations, toujours sincères, soient gagnantes. Dans le rôle de la jeune femme qui sait mener sa vie, Élodie Navarre est fabuleuse. Elle sort son personnage du cliché de la maîtresse. C’est une fille de son époque qui sait composer avec la vie. Max Boublil s’est glissé avec une belle aisance, dans le personnage de Nicolas, un garçon rêveur et complètement décalé. Quant à Gérard Darmon, que le public vient voir avant tout, il est au niveau de notre attente, absolument craquant. Maniant la mauvaise foi avec brio, il nous a régalés dans ce personnage d’arroseur-arrosé.

Dans la lignée du boulevard

Mais incontestablement, la Reine de la soirée est Clotilde Courau, qui excelle dans le rôle de la grande bourgeoise totalement déjantée. Sa filiation avec Sophie Desmarets est incontestable. On sent chez la comédienne une grande connaissance de ces riches oisives dévouées à leur tranquillité. La comédienne n’a pas besoin de grands effets, comme des entrées de scène tonitruantes à la Pacôme, pour ramasser le morceau. Il lui suffit d’un regard, d’un geste, d’une attitude pour mettre en place son personnage. Dans ses sourires et ses regards, on voit toute la tendresse, remplie de compréhension, que Marianne porte à son époux. Mais, ce qui est irrésistible, c’est cette gouaille parisienne. Car oui, quand elle parle, la bourgeoise laisse souvent s’échapper des accents à la Arletty. Toute la force de son interprétation réside dans ce décalage entre la stature racée et le langage. Sa prestation nous a laissés béate d’admiration. Voilà, c’est dit !

Marie-Céline Nivière

Une situation délicate d’Alan Ayckbourn
Théâtre Edouard VII
10 place Edouard VII
75009 Paris
Du 27 septembre au 31 décembre 2022.

Du mardi au vendredi à 21h, samedi à 16h30 et 21h, dimanche à 16h

Durée 1h30


Théâtre des Nouveautés
24 boulevard Poissonnière
75009 Paris
Jusqu’au 30 avril 2022

Adaptation française de Gérald Sibleyras
Mise en scène de Ladislas Chollat  
Avec Gérard Darmon, Clotilde Courau, Max Boublil, Elodie Navarre
Assistant à la mise en scène Eric Supply
Décors d’Emmanuelle Roy
Lumières d’Alban Sauvé
Costumes de Jean-Daniel Vuillermoz
Musique de Frédéric Norel
Réalisatrice vidéos de Nathalie Cabrol

Crédit photos © Bernard Richebé

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