Julien Kosellek © Natalie Beder

Julien Kosellek, artiste en apnée dans l’univers sombre de Dennis Kelly

Au théâtre de la Reine Blanche, Julien Kosselek, et sa comparse du collectif Estrarre, Viktoria Kozlova, s’emparent de Débris, première pièce du Dennis Kelly.

Au théâtre de la Reine Blanche, Julien Kosselek, et sa comparse du collectif Estrarre, Viktoria Kozlova, s’emparent de Débris, première pièce du Dennis Kelly. Portant sur la scène parisienne, ce récit fragmenté, drôle et monstrueux d’un frère et d’une sœur face à une tragédie familiale, comme souvent chez le dramaturge britannique, ils invitent le spectateur vers une autre dimension entre réalité, fantasme et cauchemar. 

Qu’est-ce qui vous a donné envie de monter une pièce de Dennis Kelly ? 

Débris de Dennis Kelly 
une création de Julien Kosellek et Viktoria Kozlova © Romain Kosellek

Julien Kosellek : Débris est une pièce que je connais depuis longtemps et que j’avais découverte grâce à des élèves de l’école où je suis pédagogue. Elle est restée dans les tiroirs, parmi les très nombreux désirs et projets que j’ai toujours dans un coin de ma tête. J’ai ensuite lu les autres pièces de Dennis Kelly. J’ai d’ailleurs énormément aimé L’abattage rituel de Gorge Mastromas, qui a rejoint ce tiroir à projets ! Nous collaborons avec Viktoria Kozlova qui est co-metteuse en scène de ce spectacle depuis longtemps : je l’ai mise en scène, nous avons joué ensemble. Nous avions envie de travailler d’une manière différente, de faire évoluer notre manière de créer. Nous avons donc cherché un projet à mettre en scène et à interpréter en binôme. Nous avons fait des recherches, lu beaucoup de textes, et nous sommes systématiquement revenus à Débris.C’est un texte dont l’écriture et la structure nous ont paru être une suite logique à notre travail et complètement différent de ce que nous avions déjà fait.

Comment met-on en scène cette écriture dure, âpre ? 

Débris de Dennis Kelly  une création de Julien Kosellek et Viktoria Kozlova © Romain Kosellek

Julien Kosellek : Je suis attiré en tant que metteur en scène, acteur, et spectateur par des écritures un peu « arides ». J’aime les structures fortes dans lesquelles les écritures sont comme « condensées ». Des dramaturgies qui laissent de la place émotionnellement aux spectatrices.eurs comme aux actrices.eurs et qui n’expliquent pas ce que l’on doit ressentir. Des textes qui se servent de cette « âpreté » pour être en même temps plus surprenants et plus incisifs moins lyriques? . 
Les autrices et les auteurs qui me donnent envie de les jouer ou de les mettre en scène sont celles et ceux qui réussissent à rester concret.e.s dans une écriture ciselée, tout en étant teintée d’humour. 
Je retrouve évidemment cela chez Dennis Kelly. Et honnêtement, je ne trouve pas son écriture si âpre ; il met en scène des sentiments violents et des événements sombres, il construit une prise de parole brute, maintenant il y a beaucoup de mouvements à l’intérieur de sestextes.
Nous avons beaucoup travaillé à rester concret.e.s dans la parole, sans la banaliser, l’important étant d’être au plus proche des mouvements de la pensée et de la narration, avant d’être dans un sentiment. La dureté de ce que nous raconte la pièce est selon moi, contrebalancée par l’humour ; c’est un texte qui m’a d’abord fait rire et ce dernier y est noir, ravageur. Quoi monter d’autre que des histoires dures et sombres exprimées avec humour et intelligence ?

Vous utilisez la photo comme support. Qu’est-ce qui vous a plu dans ce travail plastique qui se mêle à l’art dramatique ? 

Débris de Dennis Kelly  une création de Julien Kosellek et Viktoria Kozlova © Romain Kosellek

Julien Kosellek : Quand nous avons commencé le travail, nous avons tout de suite pensé aux diapositives, et aux photos de famille ; la pièce parle de souvenirs d’enfance réels ou pas et pour nous, les diapositives sont à la fois un souvenir d’enfance et la trace d’une histoire familiale. 
Nous avons décidé d’utiliser un vidéo-projecteur, ce qui a ouvert de nouvelles possibilités. Nous connaissions bien le travail de Paola Valentin, qui est plasticienne et comédienne, et qui travaille notamment sur la déformation de photos. Nous avons donc fait appel à elle. Son travail est très poétique, et très sensible. Il a donc fallu trouver comment l’utiliser ; de manière très concrète, comme une séance de projection, ou à la manière d’une toile peinte qui amène de l’onirisme dans notre décor volontairement « pauvre ». C’est avant tout un regard supplémentaire sur la pièce, qui prend une autre place que le nnôtre. De la même façon qu’avec Sophie Mourousi qui collabore à la mise en scène ou Ayana Fuentes Uno qui a créé les musiques de la pièce, la collaboration avec Paola amène un imaginaire qui se mêle aux nôtres. Le théâtre est l’art de la rencontre et du brassage, c’est ce que nous recherchons, avec nos collaboratrices comme avec les spectateurs.rices.

Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore

bris de Dennis Kelly 
traduit de l’anglais par Philippe Le Moine et Pauline Sales

Théâtre de la Reine Blanche
2 bis Passage Ruelle
75018 Paris
Jusqu’au 6 février 2022
Durée estimée 1h05

Tournée
le 13 mai 2022 à La Grange dîmière (Fresnes)
le 3 juin 2022 au Théâtre Jean Arp (Clamart)

une création de Julien Kosellek et Viktoria Kozlova
collaboration artistique Sophie Mourousi 
musique d’Ayana Fuentes Uno 
travail photographique de Paola Valentin 
régie d’Anton Langhoff

Crédit photos © Natalie Beder et  © Romain Kosellek

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