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Cléopâtre in love, portrait revisité et féministe de la dernière reine d’Egypte

A Nouveau théâtre de Montreuil, Judith Henry se glisse dans la peau de Cléopâtre

Mais qui est donc Cléopâtre, un être de passion, un sex-symbol aux charmes vénéneux, une matrone sexy en diable ou une femme tout simplement ? Un peu de tout cela. Entre réalité historique et mythe véhiculé par le péplum de Mankiewicz ou par la tragédie de Shakespeare, Judith Henry et son complice Christophe Fiat, imaginent quels pourraient être aujourd’hui les états d’âme de l’inimitable et scandaleuse « Pharaonne ».

On a tout dit sur elle, le pire comme le meilleur. Souveraine flamboyante, vindicative, cheffe de guerre sans merci, stratège sans pitié, femme fatale d’une rare intelligence qui parlait plus de 10 langues différentes, amoureuse passionnée, capricieuse, héroïne tragique chez Shakespeare, diva couverte d’or chez Mankiewicz, Cléopâtre s’est construite, au fil des siècles, une légende qui compte autant d’adorateurs que de détracteurs.

Cleopatre3_Montreuil_© Jean Louis Fernandez039_@loeildoliv

Avant tout, au-delà de sa mort romanesque, de ses amours romaines, du mythe qui en découle, la dernière reine d’Égypte est une femme. C’est à ce titre qu’elle est jugée par l’histoire, par les hommes. Trop belle, trop charnelle, elle ne peut être l’égale des rois. Elle est, forcément, grande putain, sorcière. Un tombereau d’insultes, de préjugés sexistes, sculpte à jamais dans l’inconscient collectif cette image sulfureuse qui lui colle à la peau. Sa réincarnation au cinéma sous les traits de l’incandescente Liz Taylor et ses incroyables yeux violets, ne fait que confirmer cette vision ultra sexuée de cette personnalité hors du commun.

Tempérament de feu, lucidité hors norme, Cléopâtre est surtout une femme confrontée à la solitude, celle du pouvoir bien sûr, mais aussi celle, plus intime, d’être un objet de désir, de convoitise. Aimée de César et de Marc-Antoine, elle est prête à toutes les folies, tous les sacrifices pour eux, ainsi que pour son peuple, la réciproque est loin d’être aussi évidente. Hantée par son propre mythe, lassée de la bassesse des hommes, par le biais de l’éblouissante Judith Henry, à l’origine du projet et qui semble s’amuser follement, la plus belle femme du monde antique, livre ses états d’âme, ses doutes, des blessures.

En s’emparant des pensées imaginaires de cette femme d’exception que la Rome impériale à tout-fait pour abattre, l’auteur Christophe Fiat a souhaité offrir à la comédienne, césarisée pour son interprétation dans La Discrète de Christian Vincent en 1990, un rôle à sa (dé)mesure. Sur le papier – les alléchantes photos teasers de Jean Louis Fernandez prises au Louvre en atteste – tout était réuni pour nous séduire, nous saisir.

Il n’en est rien. A force de redondance, d’une dramaturgie quasi inexistante, ce manifeste féministe pour une égalité de traitement entre rois et reines fait flop. La présence et l’interprétation de Judith Henry, habitée et investie, ne changent rien. Cléopâtre in love a tout d’un immense gâchis à notre grand désespoir.

Par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore


Cleopatre3_Montreuil_© Jean Louis Fernandez060_@loeildoliv

Cléopâtre in love, un projet de Christophe Fiat et Judith Henry
Nouveau théâtre de Montreuil– Salle Marie Casarès
63, rue Victor Hugo
93100 Montreuil
Jusqu’à 22 février 2019
du mercredi au vendredi à 20h
durée 1h20

texte et musique Christophe Fiat
mise en scène de Judith Henry, Christophe Fiat & Claire Ingrid Cottanceau
création lumière de Stéphanie Daniel
photographies de Jean-Louis Fernandez
régie générale Ronan Cahoreau Gallier
régie son de Raphaël Barani

avec Judith Henry et Christophe Fiat
voix off Nicolas Bouchaud

production déléguée Nouveau théâtre de Montreuil – CDN
soutien Montévidéo, Créations Contemporaines – Atelier de Fabrique Artistique
remerciements Théâtre Ouvert

Crédit photos ©Jean-Louis Fernandez

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