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L’hiver, quatre chiens mordent mes pieds…, une ode poétique et sensible à l’humanité

Au grenier à sel, la plume de Philippe Dorin nous entraîne aux confins du réel dans L'hiver, quatre chiens mordent mes pieds et mes mains

Dans un décor apocalyptique, inhospitalier, alors qu’une tempête glacée gronde au loin, menaçant de tout détruire, deux âmes esseulées, isolées, vont apprendre à partager, à survivre, à s’aimer. Métaphore d’un monde à la dérive, d’une humanité moribonde, ce conte surréaliste imaginé par Philippe Dorin est une ode à la vie que transcende l’étonnante mise en scène de Bertrand Fournier.

Malgré la chaleur étouffante qui règne dans les rues de la cité papale, c’est une sensation de froid qui assaille le public, dès qu’il pénètre dans la salle du grenier à sel. Sur scène, un amas de bois empilés, recouverts d’une fine pellicule de poudre blanche simulant la neige, et quelques bâches blanches salies, abîmées, semblent être les seuls vestiges d’un monde ravagé par quelques cataclysmes. Au centre de cet apocalyptique décor, une masse humaine (épatant Denis Monjanel) somnole. Est-ce un ogre, le dernier survivant d’un peuple exterminé ou tout simplement un SDF ayant trouvé quelque abri pour la nuit ? Difficile, à dire, rien n’éclairera notre lanterne, dans l’étrange et surréaliste récit qui va nous être, ici, conté.

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Grommelant, l’homme s’étire, explore les lieux, cherchant en vain de quoi se sustenter. Peu après, il est rejoint par une jeune femme (émouvante Sandrine Monceau), emmitouflée dans un manteau de peau, lui donnant des airs de Tilda Swinton incarnant la Sorcière blanche dans le long-métrage Le Monde de Narnia : Le Lion, la Sorcière blanche et l’Armoire magique. Entre ces deux êtres perdus et solitaires, une surprenante complicité va voir le jour, une forme d’amour conjugal. L’un comme l’autre vont devoir faire sort commun, apprendre à partager le néant et donner à leurs rêves l’illusion de la réalité.

Loin des contes de fées idylliques, féériques de notre enfance, Philippe Dorin signe de sa plume ciselée et poétique, une fable fantastique qui commence comme une tragédie, révélant la nature sombre d’un monde en perdition, pour s’achever, non sans humour et tendresse, sur un message d’espoir qui donne foi en une humanité renouvelée. S’emparant de ce texte puissant, Bertrand Fournier en souligne l’étrangeté, la magie par sa mise en scène particulièrement soignée, léchée. S’appuyant sur la très réussie scénographie d’Elodie Grondin et la bande-son imaginée par Jean-Philippe Borgogno, il nous entraîne dans un voyage immobile au cœur de cette contrée où le vent froid balaye, contre attente, la solitude mortifère pour laisser place à la vie.

Bouleversé par le jeu tout en nuance des comédiens, on se laisse transporter par les mots, les images de cette ode vibrante à la beauté de la nature humaine, qui finit toujours par ressurgir même au cœur de la fange. Captivant !

Par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore


Affiche l'Hiver, quatre chiens mordent mes chiend et mes mains

L’hiver, quatre chiens mordent mes pieds et mes mains de Philippe Dorin
Festival d’Avignon le OFF
Le Grenier à sel
2, rue du Rempart Saint- Lazare
84000 Avignon
jusqu’au 27 juillet 2017
tous les jours à 10h00 relâches les 10, 17, 24 juillet 2017
Durée 1h10

Mise en scène de Bertrand Fournier
avec Sandrine Monceau, Denis Monjanel, Sacha Menez- Allanic, Angèle Chédotal, Julian Le Moigne, Noëmie Filoche, Titouan Olivier, Philomène Hulot
Lumière de Julien Guenoux
Son de Jean-Philippe Borgogno
Scénographe d’Elodie Grondin
Machiniste : Yannick Thomas

Crédit photos © Kiosque de Mayenne

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