David Jacskon © Marie Pétry
David Jacskon © Marie Pétry

David Jackson : « Je voulais redonner à Belle-Île ce qu’elle m’a offert »

Depuis 1998, le Festival Lyrique en Mer fait vibrer les paysages, les églises et les cœurs de Belle-Île-en-Mer au rythme de l’opéra et de la musique sacrée. Pour sa première saison en tant que directeur artistique, le Chef de chœur de l'Opéra de Tours inscrit son attachement personnel à l’île dans une programmation qui marie grands classiques et œuvres plus inattendues. Rencontre.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de prendre la direction artistique du Festival Lyrique en Mer ?

David Jackson : C’était une évidence intime. Belle-Île est profondément liée à mon parcours personnel et artistique. C’est là que j’ai fait mes premiers pas professionnels en France. Ce festival, c’est ma porte d’entrée dans la vie culturelle française. J’y ai dirigé mes premières répétitions en français, j’y ai grandi artistiquement, entouré d’une équipe bienveillante et d’un public fidèle. 

C’est aussi grâce à cette aventure belliloise que j’ai finalement demandé la nationalité française. Treize saisons aux côtés de Philip Walsh m’ont forgé. Alors quand il m’a proposé de reprendre la direction artistique, je n’ai pas hésité longtemps. J’ai bien sûr réfléchi à l’équilibre avec mon poste à Tours, mais au fond, j’avais ce besoin de rendre quelque chose à cette île et à ce public qui m’ont tant donné.

Qu’avez-vous souhaité insuffler à cette première édition ?

David Jackson : J’avais envie de poursuivre l’élan du festival tout en l’ouvrant davantage vers de nouveaux horizons. L’opéra peut parfois sembler réservé à un cercle d’initiés, et je crois profondément que nous avons, en tant qu’artistes, une responsabilité : celle de faire rayonner cette musique auprès de publics plus larges. Il faut créer des ponts. 

Par exemple, cette année, avec Venez chanter ! Carmen on propose une journée de chant collectif autour de l’air du Toréador, où le public est invité à faire les chœurs. C’est une première à Belle-Île. On crée un moment participatif, joyeux, populaire, sans rien sacrifier à l’exigence artistique. Ce projet, je le porte avec Jazmin Black Grollemund qui fait un travail remarquable comme cheffe de chant et pédagogue. Elle a une énergie, une ouverture qui correspondent parfaitement à ce que je veux défendre.

Comment avez-vous construit votre programmation ?

David Jackson : En suivant un fil clair : l’équilibre entre les chefs-d’œuvre du répertoire et la découverte. La Traviata, par exemple, est une œuvre que je porte depuis longtemps. Elle n’avait pas été donnée ici depuis au moins quinze ans. Il était temps de la faire revivre à Belle-Île. En parallèle, j’ai voulu proposer Misatango, une œuvre de Palmieri qui mêle sacré et tango, dans une atmosphère festive et lumineuse. Elle résonne merveilleusement dans les églises, où nous présenterons plusieurs concerts. C’est aussi une façon de faire entendre une autre couleur du sacré.

Et puis, pour la première fois, nous ouvrons le festival à une œuvre contemporaine. L’ensemble Sybarite 5, que j’ai souhaité accueillir en résidence cette année, apporte avec lui une fraîcheur, une connaissance fine du répertoire actuel et une vraie complicité avec la mezzo-soprano Blythe Gaissert. Ils ont cette capacité à passer du tango aux créations contemporaines avec la même intensité. Cette dimension nouvelle me semblait essentielle pour inscrire le festival dans une dynamique de renouvellement.

Quels sont les lieux que vous avez choisis d’investir cette année ?

David Jackson : Nous revenons à la Pointe des Poulains avec une série de concerts exceptionnels de musique de chambre. C’est un site magnifique, chargé d’histoire, et je suis très heureux d’y programmer à nouveau. Le festival s’ouvrira le 1er août à Palais, avec la restitution en plein air de Venez chanter ! Carmen. C’est une première là aussi : sortir cette restitution des murs, créer une ambiance plus détendue, plus chaleureuse, plus festive.

Et bien sûr, nous retrouverons les lieux emblématiques du festival : les quatre églises de l’île pour les concerts sacrés, et la salle Arletty pour La Traviata. Une nouveauté que j’aime beaucoup aussi : les concerts pour bébés, en partenariat avec la nouvelle bibliothèque de Palais. Douze concerts courts, d’une demi-heure, spécialement pensés pour les tout-petits et leurs familles. Une manière douce et ludique d’initier les enfants à la musique.

Et vous, en tant qu’artiste, à quels moments serez-vous sur scène ?

David Jackson : Je dirigerai les trois grands rendez-vous de cette édition : Venez chanter ! Carmen, La Traviata et Misatango. Je serai là dès le premier jour, pour animer, accompagner, créer du lien. C’est important pour moi d’être présent, d’être au cœur du projet. J’ai envie que ce festival soit vécu comme un moment partagé, pas comme un événement cloisonné.

Qu’espérez-vous pour cette première édition en tant que directeur artistique ?

David Jackson : Je crois sincèrement en cette programmation. Les artistes sont formidables, les œuvres puissantes, les lieux inspirants. On a une très belle équipe, des chanteurs professionnels, des jeunes talents prometteurs, un public déjà curieux. Ce que je souhaite maintenant, c’est que les Bellilois, les vacanciers, les amoureux de l’opéra et les curieux viennent nombreux. Que la musique les touche, les rassemble, les transporte. Que ce soit une fête. Si les concerts affichent complet, ce sera magnifique… C’est bien « guichet fermé » qu’on dit en français ? (rires)


Lyrique en mer – Belle-Île-en-Mer
du 1er au 15 août 2025

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