La maison d'à côté - Cie L'air du Verseau © Clara Ott
© Clara Ott

Dans La maison d’à côté, la mémoire flanche

Après Pôles de Pommerat, la Cie L’air du Verseau poursuit son travail autour de la mémoire avec la pièce de Sharr White. La patine du temps ayant fait son ouvrage, ce texte a gagné en puissance.

Récompensée par de nombreux prix aux États-Unis, la pièce de l’auteur américain Sharr White, La Maison d’à côté a été montée en France une première fois, en 2015, par Philippe Adrien, dans l’adaptation de Gérald Sibleyras. Sa construction, très cinématographique, et les sujets abordés avaient dérouté les spectateurs du Petit Saint-Martin. Mais en dix ans, bien des choses ont changé et les éléments qui nourrissent ce thriller psychologique se font entendre plus clairement.

Juliana est une scientifique brillante au caractère bien trempée. Lors d’une conférence sur sa découverte d’un médicament, censé soigner de graves formes de démence, sa phrase reste en suspens. Elle tombe dans un trou, celui de sa propre mémoire. Que lui arrive-t-il ? Un cancer ? La maladie d’Alzheimer ? La folie ? L’auteur construit alors un puzzle où chaque pièce permet de comprendre le dérèglement d’une femme qui a toujours voulu tout contrôler et pourquoi elle perd pied. Sa fille Laura disparue ne reviendra jamais et cette absence la tue à petit feu. Elle n’aspire plus qu’à retourner dans La maison d’à côté, là où se cachait autrefois le bonheur.

Cette femme meurtrie, peu sympathique au premier abord, est un rôle en or, parce qu’il permet d’explorer de nombreux sentiments. Florence Marschal en a saisi toutes les carnations. Elle transcrit fort bien ce qu’est le déni. En mari attentionné et vigilant, Jean-Jacques Boutin est très touchant. Dans une très belle palette de jeu, Samantha Sanson incarne trois personnages, le Dr Teller, Laura l’adolescente rebelle et la nouvelle propriétaire de la maison d’à côté. La mise en scène conjointe de Christophe Hatey et Florence Marschal est précise. tous deux ont choisi de tout situer dans un seul lieu, installant ainsi l’enfermement mental de Juliana qui se débat avec cette culpabilité qu’elle refuse d’admettre et cette douleur qui la ronge.


La maison d’à côté de Sharr White
Théâtre de l’Opprimé
78/80 rue du Charolais
75012 Paris.
Du 27 mars au 7 avril 2024
Durée 1h20.

Adaptation de Gérald Sibleyras
Mise en scène Christophe Hatey & Florence Marschal
Avec Jean-Jacques Boutin, Samantha Sanson, Florence Marschal, Christophe Hatey, et en vidéo Moon Paing-Pirotin.
Lumières Tristan Godat et Marc Augustin-Viguier

Vidéo de Clara Ott

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