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Les Fausses Confidences de Marivaux … Dissonance romantique

Casting de rêve, salle mythique, Les Fausses Confidences de Luc Bondy avaient tout pour séduire, mais par un malencontreux hasard, l’alchimie n’est pas au rendez-vous. Et pourtant, Isabelle Huppert est sublime, joueuse et cabotine. Bulle Ogier est fantastique et irrésistible en douairière acariâtre rêvant d’élévation. La scénographie est sobre, légèrement acidulée et élégante. La mise en scène, par un curieux jeu de déconstruction des codes du théâtre classique, est enlevée, drôle et moderne. Au final, seul le feu de la passion manque cruellement. Un froid insidieux s’installe et empêche aux amoureux de se consumer. Louis Garrel trébuche à convaincre, cassant

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Reprise des Fausses Confidences de Marivaux à l’Odéon

Casting de rêve, salle mythique, Les Fausses Confidences de Luc Bondy avaient tout pour séduire, mais par un malencontreux hasard, l’alchimie n’est pas au rendez-vous. Et pourtant, Isabelle Huppert est sublime, joueuse et cabotine. Bulle Ogier est fantastique et irrésistible en douairière acariâtre rêvant d’élévation. La scénographie est sobre, légèrement acidulée et élégante. La mise en scène, par un curieux jeu de déconstruction des codes du théâtre classique, est enlevée, drôle et moderne. Au final, seul le feu de la passion manque cruellement. Un froid insidieux s’installe et empêche aux amoureux de se consumer. Louis Garrel trébuche à convaincre, cassant la jolie mécanique. Décevant …

L’argument : Dorante, fils d’un avocat et neveu d’un procureur, jeune homme de trente ans, certes bien fait de sa personne, mais désargenté, tombe éperdument amoureux d’Araminte, « veuve d’un mari qui avait une grande charge dans les finances » et disposant d’une fortune de « cinquante mille livres de rente ». Il réussit à devenir son intendant, et avec l’aide de son ancien valet Dubois, dans les quelques heures qu’est censée durer l’action de la pièce, il conquiert sa bien-aimée.

Araminte veille sur le sommeil de Dorante © Pascal Victor
Araminte veille sur le sommeil de Dorante © Pascal Victor

 La critique : Le temps d’une soirée, l’Odéon nous invite dans l’intimité de la riche Araminte (fascinante Isabelle Huppert). Alors que le public s’installe, la maîtresse des lieux s’adonne à un cours de taï-chi. Le ton est donné. La mise en scène s’affranchit des codes du théâtre classique et investit le champ du contemporain. Ici pas de corset, mais un fax. Pas de spectateur, mais autant de confidents que de siège investis. L’effet est renforcé par le jeu des éclairages : la salle n’est jamais réellement plongée dans l’obscurité.
Frêle, gracieuse, la silhouette légère et aérienne, renforcée par la fluidité de son déshabillé en satin, Isabelle Huppert se meut dans le décor minimaliste et mouvant imaginé par Johannes Schütz, et irradie la scène. L’élégance de la mise et la prestance ingénue de la comédienne emporte l’adhésion et fascine l’auditoire, fin prêt à découvrir ses Fausses Confidences remises au goût du jour par Luc Bondy. Rapidement, l’argent, thème central de la pièce après l’amour, fait son apparition. Araminte est aisée. C’est une évidence. Des billets traînent de-ci de-là, dans un livre, sur une étagère.

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Araminte cède à l’amour de Dorante © Pascal victor

Araminte est veuve et règne de main de maîtresse sur sa maison. Avisée et intelligente, elle ne s’en laisse pas compter et s’intéresse de près à ses affaires. Afin de l’aider dans la gestion de ses domaines, elle souhaite engager un intendant, fiable, incorruptible, et droit. Qu’à cela ne tienne : son ami procureur (tonitruant Bernard Verley) a un neveu désargenté (Louis Garrel, ténébreux fort pâle), parfait pour l’emploi. Ce qu’il ignore, ce sont les vues – la secrète passion – du jeune homme de très bonne famille sur la jeune femme. Aidé, voire guidé par son ancien valet, Dubois (habile Yves Jacques), devenu entre-temps celui de la dame, il va user de tous les stratagèmes, des plus fourbes aux plus éculés, pour conquérir le cœur de la belle.

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Dubois conseille Dorante pour réduire Armante © Pascal Victor

De faux-semblants en réels sentiments, en passant par des manipulations éhontées, l’intrigue, riche en rebondissements rocambolesques, est portée par la langue de Marivaux, pleine de fougue, de flammes retenues, d’amours éconduites et de passion sublimée. Et c’est peut-être ici que, trop contemporaine, la mise en scène, de Luc Bondy achoppe et passe à côté du sujet. Si le texte est confit d’amour inavoué, de mensonges savamment distillés, le décor gris, froid, manque de chaleur. Et la lumineuse Isabelle Huppert a bien du mal à faire naître la passion dans le jeu trop sage de Louis Garrel. C’est d’autant plus déroutant que la comédienne cabotine, s’amuse et se donne à fond dans le rapport chaleureux aux autres. La complicité qui la lie à Yves Jacques est palpable. Et l’amour presque maternel qu’elle porte à Marton (Manon Combes, toute en retenue et émotion) semble bien réel. C’est donc bien le duo amoureux qui ne fonctionne pas sur les planches et le feu de la passion qui n’arrive pas prendre. C’est bien dommage, tant le reste semble réussi. En effet, comment ne pas fondre devant Bulle Ogier délicieuse en mère acariâtre… devant l’ingéniosité et la fourberie réjouissante d’Yves Jacques … devant l’élégant parterre de chaussures à talons qui jonchent le sol de la scène et donne un peu de couleur au froid décor… devant les costumes signés Dior, portées avec grâce par une Isabelle Huppert somptueuse… et pourtant, on sort du théâtre désorienté, avec l’impression d’avoir raté une étape cruciale dans le processus artistique de Luc Bondy… La séduction est en demi teinte… dommage…

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Araminte entre sa mère Argante et sa secrétaire Marton ©Pascal Victor

Les Fausses Confidences de Marivaux
Théâtre de l’Odéon
Jusqu’au 27 juin 2015
Durée 2h10
Tarifs de 6€ à 36€

mise en scène Luc Bondy
avec Isabelle Huppert, Jean-Damien Barbin, Manon Combes, Louis Garrel, Yves Jacques, Sylvain Levitte, Jean-Pierre Malo, Bulle Ogier, Bernard Verley et Georges Fatna, Arnaud Mattlinger

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