Lohan Jacquet © Céline Wetzels

Lohan Jacquet, la danse dans la peau

Au cœur de la pandémie, Lohan Jacquet crée sa compagnie et prépare dans la foulée, son premier spectacle, une œuvre centrée sur Yves Klein.

Regard bleu azur, cheveux mi-longs, blonds comme les blés, Lohan Jacquet cultive dans sa gestuelle la grâce des anges. Fort de ses expériences auprès de nombreux chorégraphes, comme Christophe Garcia ou Tabea Martin, dont il devrait reprendre la tournée de Nothing Left en Suisse, courant juin, le danseur crée en décembre 2020, la compagnie Nahlo, pour laquelle il prépare pour le festival Danser à Milly, qui devrait se tenir en juillet prochain, la première pièce, une œuvre centrée sur le peintre Yves Klein et son rapport à la monochromie. Toujours en mouvement, jamais à l’arrêt, il travaille actuellement avec les compagnies Bitter Sweet et Bobaïnko sur deux nouveaux spectacles. Rencontre avec un jeune artiste foisonnant.

Lohan Jacquet a l'œuvre © Juerg Ramseier

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
À 8 ans, mes parents m’ont offert un spectacle du grand théâtre de Genève. Il y avait au milieu de la pièce une sorte de mêlée humaine où les danseurs se déshabillaient, la musique était forte, les danseurs étaient déchaînés. J’ai demandé à mon père de sortir. C’est maintenant toute la folie et la force que je recherche dans mes créations. Des corps passionnés.

Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ? 
Au lycée, je voulais faire des études « normales » comme les copains. En première, j’ai réalisé un spectacle de danse dans la cave de mes grands-parents avec ma cousine. On a eu 90 personnes, les gens ont adoré et mes proches m’ont fait promettre de faire des auditions pour des écoles de danse professionnelles. Je leurs en suis tellement reconnaissant.

Qu’est ce qui a fait que vous avez choisi d’être danseur et chorégraphe ? 
La danse on ne la choisit pas. J’ai commencé à bouger avant d’être conscient. J’ai besoin de faire vibrer mon corps, de plonger dans les univers artistiques de différents chorégraphes en tant qu’interprète et de pouvoir assouvir mes rêveries chorégraphiques. Le soutien de ma famille et de mes amis a été incroyable.

Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ? 
Ouh là là ! À 6 ans, dans une MJC, Blanche-Neige, je faisais deux soirs de suite l’un des 7 nains et m’ont père m’avait construit une pioche. Je me souviens faire coucou à mes parents, me coincer un orteil dans une porte coupe-feu, être le seul garçon entouré de filles et être rempli de joie avec un ongle en moins. Il y avait une gaieté pure et naïve assez fantastique en étant sur scène.

 Votre plus grand coup de cœur scénique ?
Il y en a beaucoup… Le premier serait Babel de Cherkaoui. Bien sûr, Vollmond de Pina Bausch. Je n’ai jamais connu autant d’émotions contrastées en si peu de temps : du rire, de l’amour, de la nostalgie et une grande paix intérieure.

Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Des professeurs. Nathalie Rousset, ma professeure de danse contemporaine de mes 7 à 18 ans, aujourd’hui vice-présidente de ma compagnie, la compagnie Nahlo. Joëlle Donati à l’ESDC Rosella Hihgtower qui m’a fait prendre conscience de mon corps, de ses capacités et de la beauté du geste pur. Des chorégraphes : Christophe Garcia pour la poésie, Sharon Eyal pour le plaisir intense du corps sur scène, Tabea Martin pour la folie et la nécessité de transmettre des valeurs et une opinion forte au public.

Création de Lohan Jacquet en cours © sophie Millar

En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ?
Le spectacle vivant est essentiel à l’équilibre de chacun. J’en suis convaincu. Voir des artistes faits de chair s’exprimer, a une fonction cathartique absolue sur chacun.
Ce métier me permet de sortir de moi et en même temps d’être pleinement qui je suis. C’est une échappatoire et une balance. Il permet d’exploiter son corps, ses pensées et son âme sans limite.

Qu’est-ce qui vous inspire ? 
Tout. Je suis (bien trop) rêveur. Un mot dans une discussion, une musique, un tableau, une personne, une mimique chez quelqu’un, une émotion… Je viens néanmoins de la campagne. La nature et la beauté sauvage restent avant tout mes deux plus grandes inspirations.

De quel ordre est votre rapport à la scène ?
Mystique. L’espace scénique est l’endroit pour lequel j’ai le plus de respect. J’appréhende un plateau ou un théâtre de manière intuitive. À chaque fois une émotion intense resurgi de moi, je me sens gladiateur et en même temps minuscule.

Création de Lohan Jacquet en cours © sophie Millar

À quel endroit de votre chair, de votre corps, situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Dans mon torse et dans mon crâne. Quand j’en parle, je dois développer énormément de dopamine et de sérotonine.

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ?
Tous les médiums artistiques me captivent. Je rêve du carnet d’adresses de Diaghilev au XXIe siècle. Créer des œuvres avec des artistes venus d’univers très différents.

À quel projet fou aimeriez-vous participer ?
Une comédie musicale de Jacques Demy, Agnès Varda en direction de la photographie et Michel Legrand pour la musique… C’est possible ?

Si votre vie était une œuvre, quelle serait-elle ?
Aujourd’hui une sculpture de feu d’Yves Klein, demain les œuvres de la chapelle Rothko à Houston. Un besoin intense de vivre et de créer, une nécessité spirituelle de paix.

Olivier Fregaville-Gratian d’Amore

Niebo Hôtel
Une création « corona-compatible » de Christophe Garcia 
Cie la parenthèse 
Hôtel Saint-Julien
9, place du Ralliement, 49100 Angers 

Crédit photos © Céline Wetzels, © Juerg Ramseier et © Sophie Millar

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