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Ceux que j’ai rencontrés …, une plongée sidérante dans le quotidien des migrants

Le Nimis Groupe nous invite à suivre le parcours semé d'embûches des migrants à leur arrivée en Europe.

Ils sont treize sur scène. Comédiens ou amateurs, migrants en cours de régularisation, ils s’ unissent pour conter le parcours semé d’embûches de ces réfugiés, objets de sombres fantasmes, confrontés à l’inhumanité, l’absurdité d’une politique migratoire devenue un business juteux. Théâtre documentaire et politique, Ceux que j’ai rencontrés… est une œuvre nécessaire à voir de toute urgence.

Tout commence par une bande son en anglais, surtitré en français. C’est à la fois un avertissement, un code de bonne conduite à tenir, une mise en garde sur ce qui va être dit au cours de l’heure quarante à venir. Prononcé par une voix d’hôtesse de l’air, cet étonnant prologue sonne comme les annonces faites avant le décollage d’un avion, le départ d’un bateau en mer, comme si nous embarquions pour un voyage sidérant, hallucinant au cœur d’un système qui broie des femmes et des hommes qui ont fui un pays où leur vie était menacée.

Le Niais Groupe nous invite à suivre le parcours semé d'embûches des migrants à leur arrivée en Europe © DR

En nous immergeant dans le parcours chaotique, douloureux des migrants, le Nimis groupe, composé de comédiens belges et français, ne cherche pas à nous tirer des larmes, mais bien à nous pousser à la réflexion. Né de la rencontre avec six exilés enfermés dans un centre d’accueil en attente d’une décision concernant leur droit d’asile, qui vont au fil des discussions intégrés la troupe, ce projet théâtral entre fiction réaliste et acte politique s’est construit de témoignages et de documents issus d’une recherche minutieuse, d’informations puisées sur le terrain de Lampedusa à Calais, de données universitaires, de statistiques issues d’institutions, d’ONG. Bien sûr, la vision, qui nous est proposée, est subjective mais elle a le mérite de nous éclairer sur les zones d’ombre du flux migratoire, de mettre à mal les fantasmes si communément véhiculés sur ces apatrides, ces exilés.

Derrière les mises en situation de migrants perdus face aux circonvolutions d’une bureaucratie migratoire aveugle, inhumaine et absurde, une autre réalité fait jour, encore plus sombre, plus glauque. Avec finesse et habilité, le Nimis Groupe oppose aux récits de vies bouleversants, les chiffres d’un business particulièrement juteux et dévoile les enjeux économiques que cachent les politiques migratoires particulièrement dures et austères. Ainsi, depuis 2000, l’Union européenne a dépensé plus de 12,9 milliards d’euros pour protéger ses frontières, financer des programmes de recherche et de développement militaires dans le but d’innover dans les systèmes hypersophistiqués de surveillance et de dissuasion. En parallèle, les migrants ont déboursé plus de 16 milliards pour quitter leur pays et tenter d’approcher le rêve européen et ne plus avoir la peur au ventre, cet argent a enrichi des passeurs peu scrupuleux. Ce constat effrayant de vies monnayées, bradées sans d’autres considérations que leurs valeurs marchandes, que l’intérêt de faire fructifier des sociétés capitalistes fait froid dans le dos.

Ceux-que-jai-rencontré-Nimis-groupe_©DR-18_@loelidoliv

Bien sûr tout n’est pas sombre, bien sûr la pièce est montée à charge, mais elle force nos consciences de bons Européens à ouvrir les yeux, à ne plus nous laisser berner par l’opinion commune qui pointe les migrants comme un problème insoluble, un poids à charge pour nos sociétés bien-pensantes. Porté par des comédiens, qu’ils soient professionnels ou amateurs, habités et passionnés, ce spectacle nécessaire et vital offre une très belle tribune aux migrants soulignée avec force et puissance par la mise en scène chorale, dénonçant preuves à l’appui une situation inacceptable et des compromissions criminelles de l’Union européenne. Une pièce de théâtre engagée à ne rater sous aucun prétexte.

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Arlon


Ceux que j’ai rencontrés ne m’ont peut-être pas vu, un projet du Nimis groupe
Théâtre Jean Vilar de Vitry sur Seine
1 Place Jean Vilar
94400 Vitry-sur-Seine
le 8 & 9 mars 2018 à 20H
durée 1h40

Maison de la Culture d’Arlon
Centre Culturel Régional du Sud-Luxembourg
Parc des Expositions
1 B- 6700 Arlon
le 21 février 2018

conception et mise en scène NIMIS Groupe – Romain David, David Botbol, Jérôme de Falloise, Yaël Steinmann, Anne-Sophie Sterck, Sarah Testa et Anja Tillberg
écriture et jeu NIMIS Groupe – Jeddou Abdel Wahab, Samuel Banen-Mbih, Dominique Bela, Tiguidanké Diallo, Hervé Durand Botnem et Olga Tshiyuka
coordination générale et costumes Édith Bertholet
assistants – Sarah Hebborn & Pierrick De Luca
médiatrice culturelle et lien associatif Olivia Harkay
vidéo Yaël Steinmann et Matthieu Bourdon
directeur technique et son Julien Courroye
lumière Pierre Clément et Alice Dussart

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