© Christophe Raynaud de Lage

Rinse : les sempiternels (re)commencements d’Amrita Hepi

D’origine australienne, avec des racines autochtones et néo-zélandaises, l’artiste, avec la complicité de sa dramaturge Mish Grigor, remonte le fil de son parcours chorégraphique et interroge les notions de courant artistique et de réappropriation culturelle.

Dans un espace blanc immaculé, balisé par des néons jaune orangé, trois cubes bleu électrique et un miroir incliné composent la seule scénographie. Chemisier blanc, pantalon vif, Amrita Hepi apparaît dans le silence. Un vrombissement tonitruant fend l’air, presque assourdissant. Elle bouge à peine, puis commence à parler. Tout débute par l’origine du monde, de la vie, de la religion et des tout premiers mouvements. D’abord, il y a le Big Bang, puis l’ovocyte fécondé, pas plus gros qu’un dragibus. Avec humour, autodérision et sérieux, elle poursuit son long exposé, telle une litanie bien huilée.

© Christophe Raynaud de Lage

Créé en 2020, Rinse, coécrit avec la dramaturge Mish Grigor, est présenté pour la première fois en France. Seule en scène, l’artiste australienne, d’origine bundjalung et maorie, déroule une conférence dansée, drôle et dense, où se mêlent histoire personnelle, culture chorégraphique et critique politique.

Elle revisite son parcours, de la danse classique en Australie, où elle est née, à New York, où elle s’est formée. D’Alvin Ailey, pour qui elle a dansé, à Merce Cunningham, Martha Graham, Anne Teresa De Keersmaeker ou Pina Bausch – à qui elle rend hommage à travers quelques gestes iconiques – elle célèbre ses influences avec une pointe d’ironie, tout en s’éloignant d’une grammaire héritée.

Rapidement, la question de la réappropriation culturelle s’impose. Celle de ses origines, des danses oubliées, des gestes effacés. Elle expose les violences coloniales, physiques et symboliques, sans pathos, mais avec une parole précise, directe – parfois trop abondante. La danse s’efface presque, bien que présente, mais c’est surtout sa pensée et sa manière de la porter au plateau qui prend le pas. 

Rinse déconstruit plus qu’il ne raconte. Il revendique la complexité des origines et le droit de faire récit autrement. Trop bavard, sans doute, mais nécessaire. Et porté par l’énergie vive d’une artiste qui, par la parole, remet en mouvement toute une mémoire.


Rinse de  Mish Grigor 
Gymnase du lycée Mistral – Festival d’Avignon
du 17 au 22 juillet 2025
durée 55 min


Tournée
14 octobre 2025 à The Place (Londres, Royaume-Uni)
22 au 24 janvier 2026 – Centre national des Arts (Ottawa, Canada)

Avec Amrita Hepi 
Texte et mise en scène de Mish Grigor 
Son de Daniel Jenatsch 
Lumière de Matt Adey 
Traduction des surtitres en français d’Elaine Normandeau

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