Pauline Chagne, une longue et belle dame brune

Dans Moi aussi je suis Barbara de Pierre Notte, la comédienne Pauline Chagne incarne brillamment Geneviève, une jeune fille qui se prend pour la chanteuse. En répondant à notre questionnaire, en toute élégance et spontanéité, l’artiste polyvalente retrace « la longue route » artistique qui l’a menée vers nous.

© Simon Larvaron

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
Mes parents sont musiciens de jazz. Dès mes premiers mois, j’étais avec eux en salle de répétition. Il y a des photos de moi à environ 2 ans dans le parc bébé au pied d’une contrebasse. Sinon, je pense que mon vrai premier souvenir est la Comédie-Française, avec mes grands-parents, où en bord de scène, les couettes au ras des pieds des musiciens, j’étais trop fière d’être la fille de la chanteuse et du saxophoniste.

Moi aussi je suis Barbara © Thibaut Darnat

Qu’est-ce qui a fait que vous avez choisi d’être comédienne ?
Au départ, je me destinais au métier de harpiste. J’ai commencé la harpe à 4 ans. J’avais un immense plaisir avec cet instrument, à être enveloppée par la musique et je ne voyais ma vie que sur scène. Après 15 ans de pratique et de conservatoire, de concours, des albums et des orchestres, après une mauvaise rencontre qui a détruit mon rapport à cet instrument j’ai décidé d’arrêter. J’ai eu l’impression qu’on m’avait coupé un membre. Mais je me suis rendu compte que ce que j’aimais, au-delà de la harpe, c’était d’être sur scène. C’est à ce moment-là que j’ai désiré devenir actrice.

Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous 
Quand j’étais enfant je montais chaque Noël un spectacle pour ma famille. Il me semble que j’avais 5 ans pour le premier et 12 ans pour le dernier. Je mettais tout le monde à contribution. Je décidais des chansons que je voulais chanter et je demandais à mon père de faire des arrangements ou de m’accompagner. Ma mère m’aidait à chorégraphier et à faire mes costumes et, certaines fois, ils jouaient et chantaient avec moi…

Pauline Chagne enfant et sa harpe © DR, collection privée

Votre plus grand coup de cœur scénique ?
J’en ai eu beaucoup ! Mais si je dois en citer quelques-uns, j’ai adoré La Nuit des Rois mis en scène par Clément Poirée, La Nostalgie des Blattes de Pierre Notte et dans un autre registre, car j’aime profondément la comédie musicale, j’ai été transportée par Chantons sous la pluie au Châtelet, mis en scène par Robert Carsen. J’ai dû y aller 3 ou 4 fois.

Quelles sont vos plus belles rencontres ?

Barbara qui est ma plus belle rencontre spirituelle. Je n’ai malheureusement pas pu la rencontrer en chair et en os. Pierre Notte qui est un artiste que j’admire et je mesure la chance que j’ai de le voir travailler de près. Antonin Tardy qui est le compositeur de mes chansons. Je l’ai rencontré en 2019 et ma vie n’a plus jamais été la même. Bernard Serf, le neveu de Barbara m’a aidée à porter le spectacle Moi aussi je suis Barbara, avec Jean-Charles Mouveaux le metteur en scène de la pièce, dès ma sortie d’école. Tous deux m’ont donné confiance en moi pour ce projet.
Et je n’oublierai pas la harpe Delta. Après mon expérience douloureuse avec la harpe de concert, cette harpe électrique novatrice a bouleversé ma vision de l’instrument et m’a permis de me réconcilier avec mon passé.

Qu’est-ce qui vous inspire ?
Les imprévus, les grands et grandes artistes, la lumière dans les moments sombres. Je me rends compte qu’en musique, les paroles que j’écris sont souvent à propos d’une réflexion sur un sujet douloureux et comment j’essaye d’y apporter une issue heureuse ou lumineuse.

De quel ordre est votre rapport à la scène ?
Cela ressemble beaucoup à une addiction. J’en ai viscéralement besoin. Je suis mal jusqu’au moment d’y être et à ce moment précis me voilà transportée dans l’extase, puis arrive la descente et les moments qui suivent.

© Pauline Chagne

À quel endroit de votre chair, de votre corps, situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Dans mon ventre et dans mes mains. Mon trac et mon envie se situent souvent au niveau des viscères ou sur le plexus solaire. Mes mains sont toujours en mouvement, en quête d’une harpe imaginaire à jouer.

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ?
Je suis inspirée par des artistes de différents corps de métier. Les réunir autour de projets serait vraiment ce dont je rêve sur le long terme.
J’aime des auteurs et autrices comme Pierre Notte et Marie Nimier avec qui j’ai déjà eu la chance de travailler, Barbara Pravi, Annie Ernaux, Mona Chollet, Dominique A, Etienne Daho, Brigitte Fontaine et bien d’autres, des metteurs et metteuses de scène comme Johanna Boyé, Tristan Petitgirard, Clément Poirée, David Bobée, des musiciennes et musiciens comme Foé, Jeanne Added, Woodkid, Fishbach, Pierre de Maere, des photographes comme Sarah Balhadere, Thibaut Darnat, Hugo Lardenet… J’aimerais jouer dans une scénographie de Raymond Sarti, évoluer dans des costumes dessinés par Robert Wun, Marvin M’toumo, Bérengère Roland, sur des chorégraphies de Marion Motin…

À quel projet fou aimeriez-vous participer ?
Un projet qui réunirait plusieurs arts différents, auquel je pourrais prendre part à différents niveaux et sur scène bien évidemment. Qui rassemblerait des artistes que j’admire et que j’aime.

Propos recueillis par Marie-Céline Nivière

Moi aussi je suis Barbara de Pierre Notte et Pauline Chagne.
Studio Hébertot
78 bis boulevard des Batignolles
75017 Paris.
Jusqu’au 2 avril 2023.
Du jeudi au samedi à 21h, dimanche à 15h.
Durée 1h15.

Mise en scène et scénographie de Jean-Charles Mouveaux.
assisté d’Esther Ebbo.
Avec Jimmy Brégy, Pauline Chagne, Flore Lefebvre des Noëttes en alternance avec Chantal Trichet, Marie Nègre, Clément Walker-Viry.
Chansons de Barbara et Pierre Notte.
Lumière de Pascal Noël.
Adaptation musicale de Clément Walker-Viry.
Costumes de Bérengère Roland.
Directeur technique Thomas Jacquememart.

Tease de Moi aussi je suis Barbara de Pierre Notte © Studio Hébertot
Surexposition