Gaëlle Billaut-Danno, enfant de la balle

Radieuse Célimène, époustouflante professeure de Français, dans l’adaptation théâtrale de La journée de la Jupe de Lilienfeld, Gaëlle Billaut-Danno impose par touches délicates un style, une présence scénique unique, bouleversante. En attendant Avignon, pour jouer aux côtés d’Anne Richard au théâtre du Balcon, coupable(s), Pièce adaptée des lois de la gravité, roman de Jean Teulé, la comédienne fait une apparition sur France 2 dans Un si grand soleil. Rencontre avec une artiste lumineuse.

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ? 
Il y en a plusieurs car j’ai passé mon enfance dans les salles de théâtre, ma mère étant comédienne. Mais le premier souvenir marquant, je crois c’est le Cabaret de Jérôme Savary avec Ute Lemper… J’ai encore des frissons quand je repense à l’émotion que j’ai ressenti en voyant ce spectacle. Je me souviens d’une image : à l’entracte un immense drapeau nazi était tiré sur la largeur et la hauteur de la scène. Un choc ! Ce spectacle était foisonnant, inventif, sulfureux, bouleversant et brillant ! Et puis ma mère jouait dedans alors …

Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ? 
Ma mère étant comédienne, j’avais toujours dis que je ne ferai jamais ce métier… J’ai donc embrassé d’abord une autre carrière, dans la communication et le marketing. C’est une amie qui m’a presque forcée à prendre des cours de théâtre avec elle, juste pour le plaisir, parce qu’elle ne voulait pas y aller seule…j’ai d’abord refusé puis j’ai cédé devant son insistance. Elle a très vite arrêté. Pour moi c’est là que tout s’est révélé. 

Qu’est ce qui a fait que vous avez choisi d’être comédienne ? 
J’ai grandi dans les coulisses des théâtres et des salles de spectacle. J’ai toujours été entourée d’artistes. La scène m’était familière. Mais comme je l’ai dit plus haut, ce n’est pas moi qui ai choisi d’être comédienne, c’est la vie – par l’intermédiaire de cette amie – qui m’a amenée à ça. A partir de là je ne me suis pas posée la question. C’était une évidence. C’est comme si je me connectais à ma source…même si j’ai mis du temps à me sentir légitime. Aujourd’hui j’avoue que je suis aussi attirée par la mise en scène.

Quel est le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ? 
C’était un spectacle au théâtre de Nesles. Je venais à peine d’arrêter ma carrière dans la communication. Ce n’était pas très abouti artistiquement je dois dire mais j’en garde un souvenir unique car c’est en emmenant mon père voir ce spectacle, lui laissant croire que j’allais y assister avec lui, que je lui ai annoncé que je voulais être comédienne. En fait je l’ai laissé en plan dans le public et quand le rideau s’est ouvert, j’étais sur scène. Il m’en parle encore…

Votre plus grand coup de cœur scénique ? 
Difficile de n’en choisir qu’un. Il y en a eu plein Je l’ai déjà cité, Le Cabaret de Savary. Inoubliable. Mais aussi la version de 12 hommes en colère, mise en scène par Stéphan Meldegg. Quand les 12 comédiens sont venus saluer à la fin, j’ai été submergée par l’émotion. C’était tellement beau. Une bête sur la Lune mise en scène par Irina Brook avec Simon Abkarian. Un spectacle subtil, émouvant et merveilleusement incarné. Et puis Incendie de Wajdi Mouawad, une claque.

Quelles sont vos plus belles rencontres ? 
Toutes les rencontres avec les metteurs en scène avec qui j’ai travaillé. Chacune est unique et précieuse. Et toutes celles qui sont encore à venir. Je dois tout de même rendre un hommage particulier à Pierre Santini, mon parrain de théâtre. Un homme merveilleux qui m’a donné ma chance alors que je débutais. Je l’ai accompagné pendant ces huit années passées au théâtre Mouffetard. Ça m’a ouvert beaucoup de portes et offert de nombreuses connexions et ça a sans nul doute été déterminant pour la suite de mon parcours.

En quoi votre métier est-il essentiel à votre équilibre ? 
C’est bien plus qu’un métier, c’est une nécessité, une aspiration. Ma mère me disait quand j’étais petite : « ce métier, on ne le choisit que si c’est vital »…j’ai compris plus tard ce qu’elle voulait dire et elle avait raison. En tout cas pour moi il est de cet ordre-là. Il me nourrit, me donne de la force, du souffle. Il me met en joie et m’exalte. 

Qu’est-ce qui vous inspire ? 
Une musique. Un parfum. Un film. Un personnage. Et puis le besoin de défendre des sujets, des idéaux, des convictions.

De quel ordre est votre rapport à la scène ? 
Charnel. Animal. C’est un endroit où je me sens libre. Tout y est possible. Et puis je me sens comme à la maison dans un théâtre.

A quel endroit de votre chair, de votre corps situez-vous votre désir de faire votre métier ? 
Je suis pleine de ce désir mais je dirais en priorité dans mon ventre d’abord et dans mon cœur bien sûr. 

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ? 
Il y en a plein, Jean François Sivadier, Pauline Bureau, Wajdi Mouawad, Johanna Boyé, Simon Abkarian, Christian Hecq,  François Morel…..et la liste est loin d’être exhaustive.

A quel projet fou aimeriez-vous participé ?
Une tragédie classique revisitée mise en scène par Jacques Audiard… si jamais un jour il décidait de faire du théâtre. Et puis aussi un cadavre exquis théâtral. Un Shakespeare par exemple, dont chaque scène serait dirigée par un metteur en scène différent. Je trouverais ça dingue !

Si votre vie était une œuvre, qu’elle serait-elle ? 
L’Alchimiste de Paulo Coehlo… je suis toujours en quête et en transformation

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore

La journée de la jupe de Jean-Paul Lilienfeld
Théâtre des Béliers Parisiens

Trahisons d’Harold Pinter, mise en scène Christophe Gand
Théâtre du Lucernaire 

Célimène et le cardinal de Jacques Rampal, mise en scène Pascal Farber
Comédie Bastille

Crédit photos © Fabienne Rappeneau, © Fabienne Rappeneau et © DR

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