Festival de Marseille 2023 - Aina Alegre Parades & Désobéissances -La CitadelledeMarseille © Pierre-Gondard

Festival de Marseille, des débuts en fanfare

Le coup d’envoi du 28e festival de Marseille a été l’occasion, pour sa directrice Marie Didier, d’ancrer son projet au cœur de la ville.

Festival de Marseille 2023 - Aina Alegre Parades & Désobéissances -La CitadelledeMarseille © Pierre-Gondard

Le coup d’envoi de la 28e édition du festival Phocéen a été l’occasion pour sa directrice Marie Didier d’ancrer son projet au cœur de la ville. Après un traditionnel spectacle à La Criée, un solo de Benjamin Kahn, c’est à La Citadelle/Fort d’Entrecasteaux, exceptionnellement ouvert au public, que la fête se poursuit sous les étoiles avec Aina Alegre et un dj set.

Parades & Désobéissances d’Aina Alegre © Pierre-Gondard

Un vent léger, bienvenu en ces jours de fortes chaleurs, souffle sur le Vieux-Port. Les habitants, les badauds, les estivants en profitent pour se balader, profiter des quais. Devant La Criée – Théâtre national de Marseille, c’est l’effervescence. Dans une poignée de minutes, Cherish Menzo va entrer en scène. L’édition 2023 du festival aux couleurs de la ville, deuxième programmée par Marie Didier, va pouvoir être lancée. 

Face aux préjugés 
 « Sorry, But I Feel Slightly Disidentified ...» de Benjamin Kahn © Martin Argyroglo
« Sorry, But I Feel Slightly Disidentified …» de Benjamin Kahn © Martin Argyroglo

Au bar du CDN, les conversations vont bon train. Attablés, les festivaliers sirotent un Pac-à-l’eau, un Gambetta, une tisane pétillante… Au loin, du côté de la billetterie, une étrange silhouette fait son apparition. Vêtue de tissus chamarrés tels du wax, ou brodés comme ceux des robes berbères, visage cagoulé de noir, mains gantées de blanc, elle se glisse à pas feutrés entre les spectateurs, prend la pause et se fige telle une statue. Puis imperceptiblement, elle se meut, fait tinter les médailles accrochées à ses hanches. Corps invisibilisé derrière une série de clichés, rappelant qu’elle n’est pas d’ici, mais d’ailleurs, d’Afrique ou du Maghreb, Cherish Menzo fascine par sa gestuelle minimaliste, sa capacité à se fondre dans le paysage que lui impose les autres, à s’en faire une carapace autant qu’une revendication, un étendard.

Le tempo s’accélère. La performeuse entraîne le public dans son sillage, le guide dans la petite salle modulable, où a été installé un dispositif en tri-frontal. Sous les regards des festivaliers, elle se libère de tous les symboles qui la stigmatisent, montre enfin son visage et affirme son identité. Présence magnétique peau noire sur sol blanc, elle tisse, à travers différents mouvements empruntés au hip hop, un récit autour des stéréotypes et des préjugés. Présence lumineuse, Cherish Menzo habite l’espace scénique et dénonce avec une grâce infini le racisme ordinaire dont elle est souvent victime. Avec « Sorry, But I Feel Slightly Disidentified… » , premier solo de sa trilogie sur la récurrence et l’apparence, Benjamin Kahn invite à questionner le monde. Travaillant en collaboration étroite avec son interprète, il esquisse une écriture très intuitive que des lumières stroboscopiques et des sons grondants viennent souligner, les prémisses d’un style autant iconoclaste que physique.

La prise de la citadelle
Parades & Désobéissances d'Aina Alegre © Pierre-Gondard
Parades & Désobéissances d’Aina Alegre © Pierre-Gondard

Un peu plus tard, le temps de longer le quai de Rive-neuve, c’est devant le fort Saint-Nicolas/Fort d’Entrecasteaux que se poursuit cette première journée de festival. Démilitarisé depuis peu, ce lieu en pleine rénovation qui surplombe le Vieux-Port, ouvre ses portes le temps de deux soirées exceptionnelles. C’est dans ce cadre en chantier mais à la vue imprenable sur la ville qu’Aina Alegre invite une centaine de Marseillais et de Marseillaises amateurs à danser, à habiter les cours, les coursives et les contreforts. Vêtus de bleu, ils font face au public. Grelots au bout des doigts, ils donnent le tempo. Puis par groupe, ils guident les spectateurs à travers le bâtiment, leur propose une visite dansée, une balade au son pop électro lounge imaginé par la Chorégraphe et son complice Guillaume Olmeta

Gestes itératifs, saccadés, mouvements de groupe, l’écriture de la Catalane se déploie dans tous les recoins accessibles de l’ancienne forteresse et lui redonne une vie depuis longtemps perdue. Bien que l’ensemble puisse paraître au premier coup d’œil, un peu anecdotique, il suffit de regarder les sourires des participants, leurs joies communicatives, pour se rendre compte que ce n’est pas tant la déambulation qui est importante mais bien les liens tissés, les connivences naissantes qui font le sel de cette parade. Engagés jusqu’au bout des ongles, quel que soit leur âge, ils vibrent à l’unisson, s’amusent et emportent le public dans une folle farandole jusqu’au coucher du soleil… la fête commence à peine, elle durera jusqu’au 9 juillet.

Olivier Frégaville-Graitan d’Amore – Envoyé spécial à Marseille 

« Sorry, But I Feel Slightly Disidentified… » de Benjamin Kahn
Festival de Marseille
La Criée – Théâtre National de Marseille
30, quai de Rive Neuve
13007 Marseille
le 17 juin 2023 à 18h
Conception, direction, chorégraphie de Benjamin Kahn
Création, interprétation de Cherish Menzo
Lumières, costumes, texte de Benjamin Kahn
Composition sonore en collaboration avec Gaggi Petrovic

Parades & Désobéissances d’Aina Alegre – CCN Grenoble & Studio Fictif
Festival de Marseille
La Citadelle de Marseille
les 17 et 18 juin 2023
Conception, direction artistique d’ Aina Alegre
En collaboration avec et transmission – Aniol Busquets, Séverine Beauvais, Elena Sevilla, Pep Garrigues, Yannick Hugron
Assistante du projet – Capucine Intrup
Création son d’Aina Alegre en collaboration avec Guillaume Olmeta
Régie générale et son de Guillaume Olmeta
Accompagnement sur les costumes, accessoires – Andrea Otin

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