Les trop lisses fantômes de Mogador

A Mogador, les fantômes de Ghost, le musical hantent la scène sans l'habiter vraiment.

Après le très rockabilly Grease et le très jazzy Chicago, Stage Entertainment joue la carte du slow sirupeux en produisant la version française du musical adapté du film Ghost. A la scène, la bluette cinématographique des gentils et romantiques fantômes, qui valait surtout pour le trio Whoopi Goldberg, Demi Moore et Patrick Swayze, manque de corps, de chair. 

Qui n’a pas chanté, dansé, aimé sur Unchained Melody, interprétée par The Righteous Brothers ? Chanson culte des booms dans les années 1990, tube au succès interplanétaire, elle est quasi indissociable du film Ghost de Jerry Zucker, comédie romantique par excellence. A New York, Sam (Grégory Benchenafi) et Molly (Moniek Boersma) se lovent dans un magnifique loft, qu’ils viennent d’acquérir. Lui bosse dans une banque, elle est artiste. Tout va pour le mieux. Malgré leurs différences, la passion les unit. 

Un soir, dans la rue, ils sont agressés. Sam meurt sous les yeux de sa belle. Instantanément, il devient fantôme. Errant sur terre, il cherche à comprendre ce qui s’est passé. Loin d’un crime dû au hasard, il est victime d’une machination qui met en danger la vie de Molly. Il va tout faire pour entrer en contact avec elle, la protéger, quitte à utiliser les pouvoirs d’Oda Mae Brown (Laura Nanou en alternance avec Claudia Tagbo), une arnaqueuse, fausse vraie médium. 

Fidèle en tout point au scénario de Bruce Joel Rubin, la comédie musicale manque de sel. Tous les ingrédients sont pourtant là : un beau décor, mobile sur roulettes ou descendant des cintres, qui permet de passer de la banque au loft, en passant par les bas-fonds de la grande pomme, des comédiens-chanteurs plutôt solides, des numéros énergiques, une musique pop rock aux accents jazzy signé Dave Stewart, une Oda Mae désopilante et flamboyante. Rien n’y fait le show ne décolle pas.

Les traductions en français du livret n’aident pas. Le son saturé empêche d’entendre les chants choraux. La romance tourne à la mièvrerie. C’est bien dommage d’autant que Laura Nanou, la doublure de l’excellente  Claudia Tagbo, ne démérite pas. Elle s’en donne à cœur joie et campe une voyante totalement déjantée. La scène du métro est une belle réussite. Le ralenti est virtuose. Elle doit beaucoup à l’interprétation d’Abdel-Rahym Madi, parfait en fantôme punk. Toutefois, et c’est l’un des points faibles du show, trop lisse bien que charmant, le couple phare a de la voix mais manque de chair. 

Malgré tout, Ghost, le musical reste un divertissement de bonne facture, avec de beaux morceaux de bravoure, et permet d’attendre gentiment le retour l’an prochain du magnifique spectacle signé Julie Taymor, l’adaptation scénique du Roi Lion

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore


Ghost, le musical d’après le film de Jerry Zucker
Théâtre Mogador
25 Rue de Mogador
75009 Paris
Jusqu’au 31 janvier 2020
Durée 3h00 environ avec entracte

Mise en scène de Bob Tomson et Alistair David
Livret et paroles de Bruce Joel Rubin
Musique et paroles de Dave Stewart et Glen Ballard
Création Lumières de Nick Richings
Avec Claudia Tagbo en alternance avec Laura Nanou, Grégory Benchenafi, Moniek Boersma, Philippe Touzel, Benoit Charron et Abdel-Rahym Madi
Scénographie de Mark Bailey
Création sonore de Dan Samson

Crédit de Photos © Alessandro Pinna

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