Les bacchanales nordiques de Chaignaud

Invité des Boréales à Caen, François Chaignaud fait danser les saisons.

Dans le cadre du festival Les Boréales à Caen, François Chaignaud présente sa pièce Soufflette, née de sa rencontre avec la compagnie nationale de danse contemporaine norvégienne Carte Blanche. Passant d’une saison à l’autre, d’un univers à l’autre, il invite à un voyage onirique et bucolique à travers le temps et l’espace.

Dans la pénombre, on distingue de grandes malles de voyage posées çà et là. Le sol en noir vinyle, effet miroir, dédouble la profondeur du décor. Lentement, les boites s’ouvrent, laissant passer une lumière diffuse. D’étranges créatures vêtues d’immenses tricots à larges mailles en sortent. Envahissant l’espace, elles virevoltent telles des feux follets, convient à une sorte de rituel qui invoque le monde, la fête, la bienveillance, le partage. 

Entremêlant battements de pieds, gestes amples, mouvements ralentis et chants polyphoniques, l’iconoclaste François Chaignaud plonge la salle dans une transe singulière et convoque les muses d’antan, les satyres. S’appuyant sur la belle scénographie et les costumes surréalistes de l’extravagant Romain Brau, le chorégraphe casse les codes, dépasse la notion de genre. Passionné d’histoire, il réfute le cliché qui voudrait que le Moyen-Âge s’oppose au siècle des Lumières, que l’obscurantisme qui colle à la peau du premier soit balayé par le rationalisme philosophique et scientifique du second. Il créé ainsi un spectacle qui allie traditions médiévales, textes pop et danses contemporaines. 

S’inspirant de chefs d’œuvre picturaux tels Le Printemps de Boticelli, les saisons d’Arcimboldo ou la danse des nymphes de Corot, il soigne avec minutie les différents tableaux, tous saisissants de beauté de lyrisme, qui se succèdent avec une lenteur mesurée. Étirant le mouvement à l’envie, allongeant les silences, François Chaignaud invite à un songe, une rêverie. Parfois, l’esprit divague, le corps s’assoupit mais toujours il sait rattraper l’attention. 

De son écriture riche, foisonnante, il souligne la présence scénique et la virtuosité des quatorze danseurs de la compagnie nationale de danse contemporaine norvégienne Carte Blanche et fait de Soufflette une pièce obsédante, loufoque qui charme par sa belle facture, son étrangeté burlesque. 

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – envoyé spécial à Caen


Soufflette de François Chaignaud
Festival les Boréales
Comédie de Caen – Théâtre d’Hérouville
1 square du théâtre
14200 Hérouville-Saint-Clair
Le 20 novembre 2019
Durée 1h00


Chorégraphie de François Chaignaud
Set design de Romain Brau
Création lumière d’Abigail Fowler
Costume design de Romain Brau
Composition et arrangement de Jostein Gundersen
Avec Ole Martin Meland, Mathias Stoltenberg, Caroline Eckly, Dawid Lorenc, Noam Eidelman Shatil, Daniel Mariblanca, Olha Stetsyuk, Adrian Bartczak, Irene Vesterhus Theisen, Harald Beharie, Timothy Bartlett, Aslak Aune Nygård, Chihiro Araki, Anne Lise Rønne

Crédit photos © Helge Hansen

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