Vestiges de Benjamin Karim Bertrand. festival ¡Viva Villa! Collection Lambert. Festival d'Avignon. © Louise Quignon

Vestiges, le corpus dansé et ritualisé de Benjamin Karim Bertrand

Dans le cadre de ¡Viva Villa!, Benjamin Karim Bertrand, lauréat de la Villa Kujoyama, invite à une balade dans les Vestiges du mouvement.

Dans le cadre du festival ¡Viva Villa! à la Collection Lambert et de l’ouverture de la Semaine d’Art en Avignon, Benjamin Karim Bertrand, lauréat 2019 de la Villa Kujoyama, invite à une balade transcendantale à travers les mouvements. Passant avec vélocité et précision du classique au contemporain, il trace une route sinueuse entre passé, présent et futur. Une performance hypnotique. 

Depuis 2016, la Casa de Velázquez à Madrid, la Villa Kujoyama à Kyoto et l’Académie de France à Rome – Villa Médicis ont initié le festival des résidences d’artistes ¡Viva Villa!, l’occasion pour ces institutions peu connues du grand public de présenter le travail de leurs pensionnaires – photographes, chorégraphes, chercheurs, historiens, créateurs ou auteurs. Pour la deuxième année, consécutive, ce rendez-vous a lieu au cœur de la cité des papes, à la collection Lambert. Avec plus de 51 artistes à l’affiche et une vingtaine de disciplines à l’honneur, le cru 2020 fait partie des expositions incontournables de cette étrange année que la Covid a malmenée. 

Au plus près des œuvres
Vestiges de Benjamin Karim Bertrand.  festival ¡Viva Villa! Collection Lambert. Festival d'Avignon. © Louise Quignon

Au premier étage de l’Hôtel de Caumont, dans l’une des anciennes pièces de réception devenue salle d’exposition de la collection permanente, une cinquantaine de chaises ont été installées dans un dispositif bi-frontal. Se faisant face, le public attend tranquillement que les derniers arrivants s’installent, tout en regardant la dizaine de dessins, d’objets d’art accrochés aux murs. Tout comme en été, la course des passionnés, des festivaliers pour aller d’un spectacle à un autre, met à mal les horaires. Les retardataires n’ont pas le temps de souffler qu’une étrange mélopée s’élève dans les airs. De sa voix grave, douce, Benjamin Karim Bertrand égrène une série de mots d’abord en français puis en japonais. 

Solo en apesanteur

Silhouette gracile, frêle, le danseur chorégraphe investit avec une délicatesse infinie l’espace. Il s’élance, s’arrête, reprend un mouvement, virevolte. Le visage fermé, concentré, il ne laisse rien paraître de ses émotions. Tout son être n’est que gestes déliés, ronds de jambes ou arabesques. Semblant suivre un rituel dont lui seul a les codes, les secrets, il entre imperceptiblement en transe. Formé à la danse contemporaine au Conservatoire des abbesses-Paris, puis interprète pour Olivier Dubois Tragédie et Auguri – , et pour le collectif (LA) HORDE, le jeune homme a été à bonnes écoles. La maîtrise de son corps, de ses os, de ses muscles est impressionnante. 

Danse aérienne autant que tellurique
Vestiges de Benjamin Karim Bertrand.  festival ¡Viva Villa! Collection Lambert. Festival d'Avignon. © Louise Quignon

Entremêlant des figures classiques à des enchaînements plus contemporains, tout en profitant d’être au Japon pour s’inspirer du théâtre Nô, des rites funéraires et du Butō, Benjamin Karim Bertrand revisite la grammaire chorégraphique, cherche à en fixer les grandes lignes, à en recueillir une multitude d’attitudes, de gestes pour en garder traces, en réinventer l’orthographe. S’appuyant sur un corpus de 196 danses qu’il a lui-même filmées à Kyoto durant sa résidence à la Villa Kujoyama, il esquisse une fresque dansée entre légèreté et pesanteur, entre nostalgie et espoir. 

Un appel ritualisé aux fantômes

Suivant les rythmes d’une musique où les airs pop se conjuguent avec les bruits urbains et des envolées lounges, le jeune chorégraphe signe une œuvre hypnotique encore fraîche, fragile. La sincérité de son engagement, l’énergie qu’il déploie une heure durant, le travail de recherche qui transparait de cette riche partition touchent et captivent. 

Première partie d’un diptyque, dont la création est souhaitée en 2021, Vestiges laisse entrevoir les belles qualités d’interprète et de créateur de Benjamin Karim Bertrand, Un artiste à suivre de près.

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Avignon

Vestiges de Benjamin Karim Bertrand.  festival ¡Viva Villa! Collection Lambert. Festival d'Avignon. © Louise Quignon

Vestiges de Benjamin Karim Bertrand
Festival
¡Viva Villa!
Semaine d’Art en Avignon – Festival d’Avignon

Collection Lambert
5 rue Violette
84000 Avignon
Durée 1h00

Les 27 et 28 novembre 2020 à La Ménagerie de Verre, Paris

Conception, chorégraphie, interprétation de Benjamin Karim Bertrand
Création sonore de Florent Colautti

Crédit photos © Louise Quignon

Print Friendly, PDF & Email

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.

Contact Form Powered By : XYZScripts.com