Couv_Submission_Adi boutrous_© Ariel Tagar_@loeildoliv

Submission, les corps emmêlés d’Adi Boutrous

Au théâtre de la Ville, Adi Boutrous fait danser les préjugés.

Deux hommes, puis deux femmes, se cherchent, se jaugent, s’affrontent, se confrontent pour mieux se retrouver, s’unir en une étreinte charnelle, sensuelle. Dépassant la notion de genre, d’identité sexuelle, s’appuyant sur le jeu de soumission/domination qui régit les rapports humains, Adi Boutrous, jeune chorégraphe arabe israélien, signe un ballet dépouillé, poétique, qui touche au cœur.

La scène est vide. Au fond, côté cour, deux jeunes femmes sont assises à même le sol. Elles semblent absorbées par le couple d’hommes (Adi Boutrous et Avshalom Latucha) qui s’avance au centre du plateau. Regards droits, cheveux noirs, ils focalisent l’attention. Pas un bruit, pas une note, ne viennent perturber leur intense concentration. Côte à côte, ils commencent un mouvement de bascule vers l’arrière. Leurs corps tombent légers, roulent puis se relèvent. Ainsi, de suite, ils répètent à l’infini ce même geste, arpentant peu à peu tout le tatami gris qui recouvre le sol. Chacun a sa trajectoire, jamais elles ne se croisent.

Submission_Adi boutrous_4_© Ariel Tagar_@loeildoliv

La musique emplit l’espace. Tout s’arrête. Face à face, ils s’observent. Lentement, chacun reprend sa route, avant de se retrouver, de s’enlacer. Entre combat et étreinte, entre attirance et répulsion, les deux artistes invitent les spectateurs à dépasser leurs préjugés, à se laisser porter par cette histoire singulière, universelle entre haine, amour et amitié, par ce jeu de domination/soumission. Ici pas de gagnant, pas de perdant, pas de masculin, de féminin, juste une humanité à fleur de peau, dans toute sa diversité, qui révèle sa magnifique palette émotionnelle.

Épuisés, vidés, les deux corps se séparent. Avant de quitter le centre de la scène, ils invitent les deux femmes, Anat Vaadia et Stav Struz, à entrer dans la danse. Reprenant des gestuelles proches mais nullement identiques à celles des hommes, elles inventent leurs propres règles, leurs propres liens, leurs propres langages. Plus âpre, plus astringente, l’écriture chorégraphique libère leur part de virilité dans des enlacements physiques, des embrassades sensuelles autant que rugueuses.

Submission_3_Adi boutrous_© Ariel Tagar_@loeildoliv

Loin d’être un inconnu pour le public français, Adi Boutrous, arabe israélien, doux ténébreux au regard clair, s’est fait un nom grâce au duo We Love arabs imaginé par Hillel Kogan, qui continue cinq ans après sa création à tourner dans le monde entier. Après avoir été un sujet mutique, il reprend pour la cinquième fois la plume et signe un ballet très épuré, très poétique et plein d’humour qui par la beauté du geste, la répétition des mouvements, dévoile une puissante fable humaine. Détournant les clichés, s’amusant des préjugés, des faux-semblants, le chorégraphe de 29 ans, DJ à ses heures – sa composition musicale mélangeant soul, rock, samba brésilienne et mix éléctro – mix, charme et envoûte tout en interrogeant sur les liens qui nous unissent autant qu’ils nous séparent. Un spectacle de chair et de sentiment !

Par olivier Frégaville-Gratian d’Amore


Submission_Adi boutrous_© Ariel Tagar_@loeildoliv

Submission d’Adi Boutros
Théâtre de la Ville – Théâtre des Abbesses
31, rue des Abbesses
75018 Paris
jusqu’au
Durée 1H00

Chorégraphie d’Adi Boutrous
créé & interprété par Avshalom Latucha, Adi Boutrous, Anat Vaadia, Stav Struz
conseillers artistiques et répétiteurs : Anat Vaadia & May Zarhy
Lumières d’Ofer Laufer
COSTUMES Reut Shaibeconception ET MONTAGE BANDES SONORES Adi Boutrous MUSIQUE Francisco López (Untitled #168), Prince Conley (I’m Going Home), Entrance (Make Me A Pallet On Your Floor), Graham Lambkin (Glinkamix, Georgete Da Mocidade, Chuva Na Favela)

Crédit photos © Ariel Tagar

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