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Naufragé(s) du cœur

A la Comédie Saint-Etienne puis au Théâtre du Rond-Point, Gabriel F. parle d'amour et de théâtre dans Naufragé(s).

L’amour, sentiment étrange qui ouvre le champ des possibles, qui réinvente le quotidien. Sa perte est une blessure difficilement soignable. Tentant de redonner vie à sa plus belle passion largement fantasmée, le brésilien Gabriel F. convie à une fable burlesque, décalée des plus savoureuses, un moment de théâtre joliment bancal et fragile qui fait chavirer les cœurs.

Dans le noir le plus complet, les premières notes de Bach à la jazz de Matt Herskowitz envahissent la salle. Lentement, une lumière diffuse laisse apparaître au centre de la scène, une masse étrange. L’intensité de l’éclairage se fait de plus un plus forte, révélant un corps en position fœtale qui se déploie, se tord, tente de se lever puis retombe. Le moment est suspendu, itératif, d’une singulière beauté. En guise de préambule, Gabriel F., auteur, metteur en scène, comédien, offre sa renaissance au monde des vivants, des êtres d’os et sang.

naufrage(s) - foto ©diego bresani - apresentacao bsb31082016-_CAL0829_@loeildoliv

Pour lui, la vie s’est arrêtée un beau matin dans une chambre d’hôtel avec vue sur mer. Non qu’il soit mort, mais son cœur s’est brisé. Sa plus belle histoire d’amour s’est terminée, alors qu’elle avait à peine commencé. Enfermé dans le deuil de cette relation, incapable d’en dépasser la triste réalité, il tente de s’en libérer en contant inlassablement la même rengaine, la même fable passionnelle. Afin de rompre la monotonie, la solitude, il invite un escort boy (Gaspard Liberelle) à partager la scène, à la seule condition qu’il ne dise mot.

Évidemment, rien ne se passe comme prévu. Tout dérape. Les quiproquos s’enchaînent, les fausses vérités prennent du plomb dans l’aile. L’homme objet ne peut s’empêcher de faire entendre sa voix. Avec beaucoup de malice, Gabriel F. joue avec les codes, s’amuse à les casser et esquisse ingénieusement une mise en abîme du théâtre, drôle, touchante. Passant du style direct type improvisation à une écriture tout en émotion genre confession intime, le jeune brésilien entremêle le vrai, le faux, la réalité la fiction et invite à une ronde folle, vacillante souvent, troublante parfois. C’est d’ailleurs dans ses défauts, ses imperfections que la pièce dévoile ce qu’elle a de plus joli, de plus charmant, son authenticité.

Abordant l’amour, la passion, l’abandon, la perte, l’homosexualité, Gabriel F. entraîne le spectateur au cœur vibrant du vivant, de l’humain. Et avec son comparse, le plaisant Gaspard Liberelle, qui prend un malin plaisir à jouer faux, décalé, il signe une pantalonnade acidulée des plus jouissives.

Par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore


AFF_naufrage(s)-theatre-du-rond-point-paris-08_© Stéphane Trapier_@loeildoliv

Naufragé(s) de Gabriel F.
Comédie de Saint-Etienne
Place Jean Dasté
42000 Saint-Étienne
jusqu’au 20 décembre 2018
tous les jours à 20h00
durée 1h20

Reprise au Théâtre du Rond-Point
2bis av Franklin D. Roosevelt
75008 Paris
du 8 janvier au 3 février 2019
du mardi au samedi à 20h30 & le dimanche à 15h30, relâche les lundis et le 13 janvier

mise en scène de Gabriel F. assisté de Luiza Guimarães
avec Gabriel F. et Gaspard Liberelle
traduction de Gaspard Liberelle
direction artistique et musicale de Marco Michelângelo
chorégraphie d’Igor Calonge
direction technique et création lumière de Cristina Bolívar
art graphique de Luísa Malheiros
scénographie et costumes du Teatro de Açúcar
construction décor Ateliers de La Comédie de Saint-Étienne

production Teatro de Açúcar ; La Comédie de Saint-Étienne – CDN
avec le soutien du DIESE # Auvergne-Rhône-Alpes, dispositif d’insertion de L’École de la Comédie de Saint-Étienne, Aliança Francesa Brasília, l’Ambassade de France au Brésil, Cielo rasO, Dantzagunea – Diputación Foral de Gipuzkoa, FAC – Secretaria de Cultura do Distrito Federal – Governo de Brasília et Cena Contemporânea – Festival Internacional de Teatro de Brasília
Le texte est publié aux Éditions d’ores et déjà

Crédit Photo © Diego Bresani

Crédit illustrations © Stéphane Trapier

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